Durant la Seconde Guerre mondiale, la mission de bombardement lourd, au sein de la RAF revenait principalement à trois machines, désormais entrés dans la légende ; et en particulier l’Avro Lancaster. Mais celles-ci durent finalement être remplacées, car elles devenaient obsolètes face aux chasseurs modernes. L’une des solutions fut de moderniser en profondeur le Lancaster en afin de donner naissance à une nouvelle machine. C’est ainsi que naquit à la fin des hostilités l’Avro Lincoln, le dernier bombardier lourd à moteurs à pistons conçu au Royaume Uni.
En 1943, l’Air Ministry émit la Specification 14/43 relative à un nouveau type de bombardier lourd pouvant évoluer à haute altitude afin de se mettre le plus possible à l’abri de la Flak, qui faisait des ravages parmi les formations de bombardiers alliés. L’avionneur Avro y répondit en proposant de développer un nouveau quadrimoteur issu de son principal appareil alors en service dans la RAF, le Lancaster. Le développement à partir d’une base existant déjà était une spécialité du constructeur puisque le Lancaster avait lui même été extrapolé du bimoteur Manchester.
Le nouvel avion reçu la désignation de Model 694 de la part du constructeur. Il se présentait sous la forme d’un monoplan à aile médiane de grande envergure, un quadrimoteur disposant d’un empennage double dérive et d’un train d’atterrissage escamotable. A la différence de ses prédécesseurs le nouveau bombardier était prévu dès le départ pour l’emport du radar H2S dans un radôme sous fuselage. Son armement défensif consistait principalement en trois tourelles, une de nez, de queue, et dorsale, toutes équipées de deux mitrailleuses lourdes d’un calibre de 12.7mm. L’armement offensif était quand à lui composé d’un peu plus de six tonnes de bombes contenues en soute. Extérieurement le nouvel avion avait tout d’un Lancaster agrandi. Il fut baptisé Lincoln.
L’avion effectua son premier vol le 9 juin 1944, trois jours seulement après le Débarquement en Normandie. Quelques modifications mineures furent apportées et un second prototype fut construit, menant son vol inaugural le 13 novembre 1944. Les prévisions d’origines prévoyaient la livraison de plus de 2 200 avions. La fin des hostilités sonna le glas du Lincoln dans la RAF, puisque les premiers exemplaires entrèrent en service en août 1945, quelques jours seulement après le bombardement atomique du Japon par les Etats-Unis. Au final le Lincoln B Mk-I n’entra en service qu’à 72 exemplaires, tandis que le B Mk-II mieux protégé fut assemblé à hauteur de 465 exemplaires. Surtout, ce dernier était le seul à être vraiment pleinement doté de son radar H2S et de toutes les possibilités apporté par ce genre de système.
Rapidement les Lincoln de la RAF furent basés en Allemagne, dans le cadre des forces d’occupation, et dans le Pacifique. Les Lincoln remplacèrent après-guerre les Lancaster, Halifax, et Stirling, les trois principaux bombardiers lourds britanniques. Au sein de la RAF, ils volèrent en compagnie des Washington, les Boeing B-29 acquis par le Royaume Uni en 1946. En 1950, la RAF engagea ses Lincoln dans des opérations de combat au Kenya mais surtout en Malaisie face à une guérilla marxiste particulièrement violente. Les Lincoln volaient sous la protection de Gloster Meteor et de De Havilland Mosquito, à bouts de souffle.
Mais le Royaume Uni n’est pas le seul pays à avoir utilisé le Lincoln puisque la Royal Australian Air Force et la Fuerza Aérea Argentina utilisèrent respectivement 73 et 26 exemplaires. Les Lincoln australiens intervinrent eux aussi en Malaisie en renfort de leurs homologues britanniques, tandis que les appareils argentins volaient principalement pour des missions de souveraineté, même si un Lincoln sud-américain fut le premier bombardier d’après-guerre à survoler l’Antarctique, dans une mission de reconnaissance stratégique.
Les Lincoln de la RAF remplirent également des missions d’espionnage aérien et de reconnaissance stratégique, sous la désignation de Lincoln R Mk-I. Ceux-ci conservaient leur armement défensif tandis que la charge de bombes avait disparu au profit d’un système de reconnaissance et d’observation tournant autour du radar H2S et de systèmes photographiques. Une vingtaine de ces avions servirent au sein de la RAF. C’est justement un de ces avions qui fut abattu par un MiG-15 de la chasse soviétique en mai 1957 au-dessus du corridor de Berlin. Il s’agit là du premier avion britannique descendu en Europe depuis mai 1945.
Le Lincoln servit également de banc d’essais volant pour divers turbopropulseurs et turboréacteurs développés par l’industrie britannique. Les Lincoln de bombardement laissèrent la place aux Canberra biréacteurs dès 1955, le dernier d’entre eux quittant définitivement le service en 1963.
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