À l’instar du Royaume-Uni le Japon est une nation insulaire. Ce qui implique que le contrôle des eaux l’entourant a toujours été au cœur de son système défensif. Et cela se vérifie autant aujourd’hui que dans le passé. C’est ce qui a poussé l’industrie aéronautique locale à développer dès les années d’entre-deux-guerres des aéronefs spécialisés dans ce rôle. Ce fut pendant plus de trente ans le rôle des hydravions, qu’ils soient à coque ou à flotteurs. Si certains sont entrés dans la légende des airs à l’image de l’Aichi E13A ou encore du Kawanishi H8K d’autres ne connurent jamais vraiment le succès et furent vite oubliés. Ce fut notamment le cas du biplan de reconnaissance polyvalent Yokosuka E5Y.
C’est début 1929 que l’arsenal aéronautique de Yokosuka commença les travaux de développement d’un hydravion de reconnaissance côtière disposant d’une capacité d’appui tactique et d’attaque au sol. L’idée des ingénieurs était de réitérer l’exploit de la conception de l’E1Y alors en dotation à plus de 300 exemplaires. Mais si la conception de ce dernier avait été relativement simple cette fois les têtes pensantes de Yokosuka cherchaient à développer une machine aux standards européens, c’est à dire dans leur esprit : britannique.
Or en cette fin des années 1920 le Japon n’avait pas encore atteint sa maturité aéronautique et la majorité des aéronefs conçus par les seuls ingénieurs nippons étaient encore considéré en Amérique du nord et en Europe comme brouillons et peu évolués. Malgré des propositions d’ingénieurs britanniques et français de venir les aider les dirigeants de Yokosuka décidèrent d’œuvrer seuls. Le nouvel appareil reçut la désignation de Yokosuka E5Y. À ce moment là l’hydravion devait pouvoir dans le futur réaliser des missions depuis des ports-bases situés au Japon.
Pour la motorisation l’avionneur sélectionna le Bristol Jupiter VIII à neuf cylindres en étoile d’une puissance de 450 chevaux. L’armement standard retenu était le mitrailleuse type 89, une copie sous licence locale de la fameuse Lewis qui remporta un franc succès durant la Première Guerre mondiale. Pour le reste le Yokosuka E5Y n’avait rien de révolutionnaire. Il se présentait sous la forme d’un biplan de construction mixte en bois, contreplaqué, et tubes d’acier. Il disposait de deux flotteurs et d’un poste de pilotage biplace en tandem à l’air libre.
C’est dans cette configuration que le prototype réalisa son premier vol au cours du mois de juillet 1929. Jusque là la conception de l’avion et a réalisation de ce prototype avait été rapide.
Seulement voilà à la suite d’une querelle entre les dirigeants de Yokosuka et ceux de Kawanishi il fut décidé de faire entrer ces derniers dans le programme de conception du E5Y. Et dans leur idée le moteur britannique en étoile n’avait rien d’une bonne idée. Les gens de chez Kawanishi croyaient plutôt dans un original moteur en W venu de France : le Lorraine Modèle 12E également de 450 chevaux de puissance. Un second prototype fut construit alors cette fois sous la désignation de Kawanishi E5K. Hormis ce nouveau moteur rien ne différenciait les deux hydravions. Son premier vol intervint en décembre 1929.
Dès lors l’état-major de la marine impériale décida de commander les deux hydravions afin de satisfaire tout le monde. Mais surtout l’irruption de Kawanishi dans le programme allait rebattre les cartes. Si les Yokosuka E5Y continuaient de n’être que de simples hydravions de reconnaissance côtière et d’appui tactique les Kawanishi E5K devenaient quant à eux des hydravions de reconnaissance embarqués, destinés aux navires de soutien de la marine impériale. Finalement en février 1930 l’E5Y d’origine fut commandé à treize exemplaires et le l’E5K à dix-sept.
Cependant après une série de brouilles entre Kawanishi et le motoriste français Lorraine l’option du Modèle 12E comme propulseurs de l’E5K fut abandonné. Le motoriste japonais Hiro proposa alors son Type 91 également en W mais développant 520 chevaux. Il s’agissait en réalité d’un Napier Lion britannique construit sous licence. La proposition fut acceptée.
Tous ces atermoiements firent qu’au final le premier E5K-1 ne fut livré en unité que six mois après la livraison du premier lot de sept E5Y-1. Ces derniers devaient également assurer la formation avancée des futurs pilotes et équipages.
Entrés en service en novembre 1930 les premier Yokosuka E5Y furent très rapidement considérés comme ratés. Malgré une motorisation et un armement adapté ces hydravions étaient trop fragiles et ne pouvaient généralement pas décoller quand la mer était trop formée. Quand au début du printemps 1931 les premiers Kawanishi E5K arrivèrent en unité ils furent versés à bord des sept pétroliers-ravitailleurs à raison d’un seul hydravion par bâtiment. À l’été de la même année les dix E5K restant furent affectés à bord du navire de transport d’hydravions Kamoi. Et là encore l’appareil s’avéra décevant. Pis encore cette version embarquée se révéla rapidement fragile aux manœuvres de grue qui permettaient de les hisser à bord une fois la mission terminée.
Aussi à l’été 1932 la totalité des Yokosuka E5Y et Kawanishi E5K fut retirée du service au profit de Nakajima E4N de conception plus simple mais plus efficace. À la fin de l’année 1932 les trente hydravions E5Y/E5K de série ainsi que les deux prototypes avaient été envoyé à la ferraille. Ainsi se terminait l’un des épisodes les plus hasardeux de l’aventure aéronautique japonaise.
En savoir plus sur avionslegendaires.net
Subscribe to get the latest posts sent to your email.