Si aujourd’hui encore la Russie et l’Ukraine ont conservé le système de désignations des aéronefs hérité de l’URSS et donnant les initiales de chaque constructeurs aux aéronefs il n’en a finalement pas toujours été ainsi. Jusqu’en 1941 l’aviation soviétique disposait d’un système beaucoup plus rationnel basé sur la mission première de chaque avion lors de leur conception. C’est pour cela que les chasseurs de cette époque sont connus comme I pour iztrebitel à l’image du célèbre monoplan Polikarpov I-16. De la même manière apparut peu avant la Seconde Guerre mondiale le Yakovlev BB-2 plus tard connu comme Yak-2 et son dérivé amélioré Yak-4.
C’est en 1938 que le nouveau bureau d’étude Yakovlev reçut l’ordre de Moscou de développer un bombardier léger rapide sous la désignation de BB-2. Celle-ci signifiait que le futur avion était un Blizhniy Bombardirovshchik, c’est à dire un bombardier à court rayon d’action. Il était donc chargé de pouvoir frapper des cibles ennemies particulièrement proches des aérodromes d’où il allait décoller. Le concept du BB-2 avait été tiré de l’engagement soviétique aux côtés des forces républicaines espagnoles et de l’observation des Dornier Do 17 de la Luftwaffe qui volaient alors dans le camp ennemi.
Au sein de la nomenclature constructeur le BB-2 reçut la désignation de Ya-22.
Alors que la majorité des avions américains et européens de l’époque étaient déjà assemblés totalement en métal le Yakovlev BB-2 était appelé à disposer d’une voilure en bois et d’un fuselage en métal et contreplaqué. Cette solution fut dictée par la volonté du dictateur Joseph Staline lui-même qui exigea que ce bombardier bimoteur entre rapidement en service actif. Pour le motoriser l’avionneur sélectionna le Klimov M-103 à douze cylindres en V d’une puissance de 965 chevaux entraînant une hélice tripale en métal. Ce dérivé du célèbre Hispano-Suiza 12Y français équipait alors l’hydravion de reconnaissance Beriev MBR-7 et le bombardier rapide Tupolev SB. Il avait de ce fait une excellente réputation en URSS. Son armement se composait de deux mitrailleuses ShKAS de calibre 7.62 millimètres, une position de chasse et l’autre montée sur affût arrière. Sa charge de bombe pouvait atteindre 600 kilogrammes.
En parallèle Yakovlev développa deux sous-versions.
La première fut désignée I-29 et préfigurait un futur chasseur d’escorte à long rayon d’action. Elle reprenait la motorisation du BB-2 mais voyait l’armement en position de chasse doublée et la charge offensive disparaître. Bien que développé sur fonds propres ce Yakovlev I-29 intéressa très vite les généraux soviétiques. Son développement eut lieu dans l’usine dédiée à la construction en série des BB-2.
La seconde reçut la désignation de BB-2 Bis. Elle ne s’en différenciait que par un changement de moteurs aux profit d’un Klimov M-105 de même architecture mais développant 1100 chevaux. Sa charge de combat fut ainsi portée à 900 kilogrammes. Si le BB-2 Bis était bien conçu dans le même bureau d’étude son futur usinage était prévu pour d’autres ateliers.
Les premiers Yakovlev BB-2 entrèrent en service au printemps 1940 et furent affectés en premier lieu sur les actions de guerre en Bessarabie, un territoire aujourd’hui compris entre la Moldavie et l’Ukraine. Ils furent également employés pour des bombardements de troupes roumaines et de populations civiles en Bucovine.
De leur côté les BB-2 Bis entrèrent en service en janvier 1941 et furent déployés au plus près de la Finlande. Le développement du I-29 se poursuivaient.
Malheureusement pour Yakovlev l’usine qui fabriquait les BB-2 et assurait la conception du I-29 fut totalement détruite dans les premières heures de l’opération Barbarossa quand Adolf Hitler se retourna contre son allié Joseph Staline. Prises au dépourvu les troupes soviétiques connurent un flottement de quelques heures durant lesquelles de nombreuses cibles prioritaires furent frappés par les bombardiers Heinkel He 111 et Junkers Ju 88 de la Luftwaffe. Avant la destruction de l’usine seuls cent onze BB-2 avaient été assemblés et réceptionnés par l’Aviation du Front. L’intégralité de la production, dont vingt avions en attente de livraisons, fut détruite. De ce fait le programme I-29 fut abandonné.
Fort heureusement les BB-2 Bis était assemblé à 200 kilomètres de là.
C’est à la même époque qu’apparut le nouveau système de désignation soviétique. Les Yakovlev BB-2 et BB-2 Bis devinrent alors Yak-2 et Yak-4. Malheureusement pour ce dernier ses faibles résultats au combat ne permirent pas la poursuite de son usinage, d’autant que Moscou entendait désormais privilégier la construction des monomoteurs de chasse Yak-1 et Yak-3 assemblés sur le même site industriel. La production du Yak-4 prit fin après la livraison du quatre-vingt-dixième exemplaire de série. Yak-2 et Yak-4 confondus atteignirent à peine les deux cents machines construites et livrés. Un chiffre qu’on considère comme très petit au regard des cadences de production de l’industrie aéronautique soviétique de la Seconde Guerre mondiale.
Plus la guerre s’intensifia et plus les défauts en matière de champ de vision du pilote et de structure partiellement en bois se firent jours. Finalement début 1942 l’ensemble des Yakovlev Yak-2 et Yak-4 fut déployés dans l’Extrême-Orient soviétique là où à priori ils ne craignaient rien Moscou n’ayant pas déclaré la guerre à l’empire du Japon.
Ils y réalisèrent surtout des missions de reconnaissance armée le long des frontières du pays. Les Yak-2 furent retirés du service début 1944, surtout faute de pièces détachées tandis que les Yak-4 volèrent jusqu’à la fin du conflit. Au matin du 9 août 1945 quatre d’entre eux réalisèrent un raid aérien contre les positions japonaises du Mandchoukouo. Neuf jours plus tard une dizaine de Yak-4 participe à l’invasion de l’archipel des Kouriles larguant des bombes incendiaires contre un port de pèche et un cantonnement de chars japonais. Au moins quatre avions furent perdus lors de l’opération, en partie du fait de la DCA ennemie.
L’Aviation du Front officialisa le retrait du service du Yakovlev Yak-4 en octobre 1945.
Bien moins médiatisés que les Petlyakov Pe-2 et Tupolev Tu-2 les Yakovlev Yak-2 et Yak-4 ne furent jamais des bombardiers de première ligne sauf sur la fin de la carrière du second d’entre eux. Ces avions n’avaient pas la réputation d’être adaptés aux opérations ni même d’être agréables de pilotage. Ils ne laissèrent donc pas un souvenir impérissable dans l’histoire de l’aviation. Il n’en reste plus rien de nos jours.
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