Westland Sea King AEW

Si la surveillance aéroportée et la veille radar embarquée ont été inventées après-guerre par l’US Navy la Royal Navy n’est pas restée longtemps à la marge de ces missions ô combien importantes. Les monomoteurs à pistons Douglas Skyraider AEW Mk-1 puis les monomoteurs turbopropulsés Fairey Gannet AEW Mk-3 furent employés dans ce sens. Cependant le retrait du service de ce dernier modèle en 1978 laissa la Fleet Air Arm sans le moindre AWACS embarqué. C’est l’invasion de l’archipel des Malouines par les forces argentines au printemps 1984 qui changea la donne et permit l’émergence d’un nouvel appareil pour le moins très innovant : le Westland Sea King AEW.

La mise en place aux Malouines d’un corps expéditionnaire argentin en avril 1984 et la réponse britannique par l’envoi de la Royal Navy rappela que cette dernière ne possédait plus de moyens embarqués de détection aéroportée. Un amiral britannique fit remarquer qu’à la même époque les Français travaillaient depuis huit ans, via son service d’étude et de fabrication des transmissions, sur la possibilité de transformer un Aérospatiale SA.321G Super Frelon ou un SA.330B Puma en hélicoptère de veille radar. Il proposa de reprendre l’idée mais en accéléré. Il fallait d’abord trouver l’hélicoptère idoine dans l’arsenal de Sa Majesté.

L’expérience française démontra qu’un appareil trop petit, trop compact, serait inadapté. On envisagea un temps l’emploi du Westland Wessex HU Mk-5 comme base de travail. Dans le même temps la recherche du radar le plus rapidement disponible fut un travail herculéen. Et c’est la Royal Air Force qui vola au secours de la Royal Navy quand deux de ses ingénieurs firent comprendre à l’amirauté que le radar Searchwater employé sur l’avion de patrouille maritime BAe Nimrod MR Mk-2 représenterait un bon équipement de veille radar. Le seul hic c’est qu’il fallait trouver un moyen de l’emporter. La cabine du Wessex HU Mk-5 était trop exigue. L’idée apparut alors d’installer le radar à l’intérieur d’un radôme gonflé à l’air chaud afin de prendre sa forme durant la mission. Le tout serait fixé au bout d’un mat articulé permettant de se déplier une fois l’hélicoptère en vol. Rapidement les ingénieurs de la Royal Navy et ceux de Westland comprirent qu’ils s’étaient trompé d’hélicoptère. Ce n’était pas le Wessex HU Mk-5 qu’il leur fallait mais le Sea King HAS Mk-2. Deux exemplaires furent ainsi modifiés.

Ils reçurent la désignation officielle de Westland Sea King AEW Mk-2. Le premier d’entre eux vola sous configuration avec radôme en juin 1984. En le lancement du programme et ce premier vol il ne se passa pas plus de onze semaines. Outre le radar Searchwater l’hélicoptère emportait désormais une plateforme de navigation inertielle FIN1110, un IFF, et un équipement de guerre électronique et de surveillance MIR-2. La campagne d’essais en vol des deux appareils se termina trop tard pour que le Sea King AEW puisse participer à la guerre des Malouines. Pourtant la Royal Navy décida d’acquérir neuf hélicoptères supplémentaires, tous construits désormais de zéro.

C’est en novembre 1984 que le Westland Sea King AEW Mk-2 entra officiellement n service au sein du Squadron 849 de la Fleet Air Arm. Le premier embarquement en opération eut lieu au début de l’année 1985. L’hélicoptère surprenait par son énorme radôme gonflable et par son aspect disgracieux. Pourtant rapidement il intéressa les spécialistes, notamment lors de sa présentation publique au Salon du Bourget. Engagés à bord des porte-avions HMS Ark Royal, HMS Illustrious, et HMS Invincible ils démontrèrent rapidement de bonnes qualités de détection. À l’altitude de croisière de 3000 mètres la couverture à 360 degrés du radar Searchwater permettait de repérer des pistes jusqu’à 160 kilomètres. Les Westland Sea King AEW Mk-2 étaient alors plus précis et aussi efficace en terme de distance de détection que les Avro Shackleton AEW Mk-2 de la Royal Air Force. Ce sont ces réussites qui poussèrent l’amirauté en 1989 à faire modifier quatre Sea King HAS Mk-5 en Sea King AEW Mk-5. Disposant d’une autonomie légèrement accrue ils possédaient les mêmes équipements que les Sea King AEW précédents.

C’est en 1990 que ces hélicoptères eurent leur véritable baptême du feu. Les quatre Sea King AEW Mk-5 furent déployés en Arabie Saoudite suite à l’invasion du Koweït par l’Irak de Saddam Hussein. Dans le même temps des Sea King AEW Mk-2 furent employés depuis la mer afin de faire respecter les embargos ordonnés par l’ONU contre le régime de Bagdad. C’est durant cette guerre du Golfe que ces hélicoptères reçurent des filtres spéciaux sur les turbines et radiateurs. Il s’agissait de les protéger des sables du désert.

Au tournant du nouveau siècle la Royal Navy fit modifier les quatre Sea King AEW Mk-5 et six de ses Sea King AEW Mk-2 au standard Sea King AEW Mk-7. Les exemplaires restants furent déséquipés et livrés à une école de mécaniciens pour la formation au sol. Trois Sea King HAS Mk-6 de lutte anti-sous-marine furent également transformés à ce standard. Désormais le radar d’origine était remplacé par un Searchwater 2000 AEW plus efficace, portant cette fois à 200 kilomètres, toujours à l’altitude de 3000 mètres. Pourtant c’est la dénomination de Sea King ASaC Mk-7 qu’ils entrèrent en service. Désormais donc leur mission passait d’Airborne Early Warning à Airborne Surveillance and Control. Les opérateurs embarqués pouvaient suivre jusqu’à 400 cibles en même temps. Les Westland Sea King ASaC Mk-7 servirent la Royal Navy de 2000 à leur retrait du service en octobre 2018. Son remplaçant officiel est l’Agusta-Westland Crowsnest ASaC.2 dérivé du Merlin HM.2.

Ils furent les derniers Sea King à encore voler au sein des forces britanniques, la Royal Air Force retirant du service les siens en 2015 et les versions de lutte anti-sous-marine de la Royal Navy en 2016. Le Westland Sea King AEW ne fut jamais exporté malgré des approchées réalisées au début des années 1990 par la Royal Australian Navy. Le Fleet Air Arm Museum préserve actuellement un Sea King ASaC Mk-7. Le seul hélicoptère comparable à lui est le Kamov Ka-31 Helix-D soviétique.