L’un des plus grands défis de l’US Navy dans les années d’entre-deux-guerres fut de concevoir des moyens de projeter son aéronavale au-delà des océans. Le porte-avions se révéla la solution la plus efficace et la moins difficile à mettre au point. À l’instar de la France et du Japon les États-Unis s’essayèrent aux sous-marins capables d’emporter un hydravion mais le résultat fut rapidement décevant et la méthode trop onéreuse. L’idée d’engager des dirigeables géants comme porte-avions du ciel trouva son aboutissement avec le célèbre USS Macon prématurément disparu en février 1935. Afin de permettre aux pilotes d’avions d’apprendre à accrocher et à se décrocher de ce mastodonte des airs il fallait prévoir une machine d’entraînement. Après quelques atermoiements c’est au surprenant Waco XJW que ce rôle revînt.
C’est à la fin de l’année 1931 que l’US Navy commença à s’intéresser à un futur avion d’entraînement dédié à la préparation des pilotes aux manœuvres d’accrochages et de décrochages depuis le dirigeable USS Macon, alias ZRS-5 dans les documents officiels.
La première option fut d’acquérir un lot de six avions d’entraînement Fleet PT-6 de facture canadienne et déjà en service dans l’US Army Air Corps à hauteur de seize exemplaires.
Au sein de la nomenclature navale américaine ces biplans furent désignés Fleet N2Y-1. Une tubulure en acier et un crochet leur fut rapidement monté afin de procéder aux premiers essais depuis Naval Air Station Patuxent River sur la côte est des États-Unis. Si sur le papier tout allait bien dans la réalité des choses l’état-major américain se rendit compte d’un point : jamais le petit moteur à cinq cylindres en étoile Kinner K-5 du N2Y-1 ne réussirait à permettre aux N2Y-1 alourdis par le système spécial d’accrochage de justement s’accrocher lors des phases de vols. Et la situation devenait critique puisque désormais l’US Navy connaissait le nom des chasseurs appelés à voler depuis l’USS Macon.
En effet le contrat de développement et de construction en petite série des chasseurs Curtiss F9C Sparrowhawk précipita encore un peu plus le remplacement de ces Fleet N2Y-1 morts nés faute de motorisation suffisante. L’US Navy établit qu’il lui fallait un biplan d’une puissance minimale de 200 chevaux. Ne voulant pas éveiller la curiosité sur ce programme très confidentiel Washington DC n’émit aucun cahier des charges officiel. C’était donc aux membres de l’US Navy de se débrouiller seuls pour essayer en vol d’éventuels candidats en tenant les constructeurs dans l’ignorance. Cela leur ferma pas mal de portes.
Les amiraux américains hésitèrent durant quelques temps entre trois machines. La première servait déjà à hauteur de six exemplaires depuis 1927 : le Huff-Daland HN doté d’un moteur en V Wright de 150 chevaux. Des négociations avec l’avionneur permettaient d’envisager une version HN-3 disposant d’un moteur de 180 chevaux. Les deux autres machines étaient des avions civils : le Stearman Cloudboy doté d’un moteur en étoile Lycoming de 200 chevaux et le Waco UPF-7 à moteur en étoile Continental de 220 chevaux.
À la surprise générale ce dernier fut l’avion sélectionné et deux exemplaires en furent commandés comme Waco XJW. Ils reçurent les serials militaires 9521 et 9522. Les empennages portant le marquage XJW-1. Hormis leur schéma de camouflage et leur équipement spécifique lié à la fonction d’entraînement des pilotes de Curtiss F9C Sparrowhawk ces avions demeuraient strictement identiques aux UPF-7 civils de série.
C’est en mars 1934, soit seulement deux mois après la signature du contrat de commande des avions, que le premier XJW vola depuis la base d’essais de Moffet Field en Californie. Quelques aménagements furent nécessaires suite au début des vols d’essais comme par exemple la transformation des avions en biplaces. À l’origine les Waco UPF-7 étaient des triplaces.
En vol le Waco XJW se révéla rapidement plus aisé de pilotage que les Fleet N2Y-1 qui pourtant continuaient d’essayer de former les pilotes de F9C Sparrowhawk. Malheureusement un de ces biplans d’entraînement d’origine canadienne s’écrasa à l’issu d’un décrochage raté, tuant ses deux membres d’équipage. Ils n’avaient pas réussi à lancer le moteur à temps et étaient tombés comme une pierre. L’US Navy envisagea alors un système permettant de lancer le moteur dès lors que l’avion se décrochait de l’USS Macon. Une technologie qui ne fut finalement jamais appliquée en raison de la perte au large de la Californie du dirigeable porte-avions le 12 février 1935.
Ironie de l’Histoire il devait débuter les essais de Waco XJW le lendemain de l’accident.
La perte du dirigeable mit fin au programme d’avions parasites, et donc au développement du Waco XJW. Les deux avions furent pourtant conservés par l’US Navy qui en affecta un à Naval Air Station Lakehurst dans le New Jersey et le second à Naval Air Station Anacostia dans la banlieue de Washington DC. Ils furent utilisés jusqu’en mars 1942 comme avions de soutien aux essais en vol, une fois leur système de crochetage déposé définitivement.
Après guerre ils furent revendus sur le marché civil de seconde main.
Avion mal connu le Waco XJW est symptomatique d’une aéronavale américaine qui se cherchait dans les années 1930. Ces biplans furent pourtant au cœur d’un des programmes de développement parmi les plus secrets des États-Unis. Et ils finirent leur carrière discrètement tout en sachant assurer les rôles qui leur furent confiés.
Il est à signaler que l’UPF-7 connut une carrière militaire durant la Seconde Guerre mondiale au sein de l’US Army Air Force en tant que Waco PT-14. Mais c’est là une autre histoire.
En savoir plus sur avionslegendaires.net
Subscribe to get the latest posts sent to your email.