L’une des options les plus surprenantes pour disposer efficacement d’avions de transport tactique à bas coût fut pendant la Seconde Guerre mondiale de motoriser des planeurs d’assaut. Tous malheureusement ne purent l’être et la plus part des tentatives dans ce sens se soldèrent par des échecs cuisants. Le petit DFS 230 allemand ou le plus imposant Airspeed Horsa britannique par exemple ne virent pas leur motorisation dépasser la planche à dessins. Dans le cas de l’énorme General Aircraft Hamilcar, lui aussi britannique, cela tourna vite au fiasco. Une des rares réussites dans ce genre fut le surprenant bimoteur Gotha Go 244 issu du planeur Go 242. Dans le camp allié les réussites furent également modestes. L’une des rares vînt des États-Unis et fut à l’origine le travail d’universitaires désireux de rendre service à leur pays : le Waco PG-2 Hadrian II.
C’est peu avant Noël 1942 que le conseil d’administration de l’université Northwestern présenta à l’US Department of War un avant projet assez fou : motoriser un planeur d’assaut afin d’en faire un avion de soutien logistique et de transport tactique bon marché. L’idée n’avait en fait rien de révolutionnaire puisque les universitaires américains se basaient sur des travaux allemands menés entre 1934 et 1937 par le Deutsche Forschungsanstalt für Segelflug. L’étude fut publiée au printemps 1938 et suscita un vif engouement un peu partout dans le monde. D’abord réticente l’US Army Air Force accepta la proposition.
Les chercheurs établirent alors que le planeur le plus adéquat était le Waco CG-4 Hadrian, la fameuse «boite à chaussures volante».
Seulement voilà l’US Army Air Force n’avait jamais envisagé utiliser, ou même de développer, des planeurs motorisés. Il fallut inventer une nouvelle désignation pour ces engins. Le choix se porta alors sur PG, pour Piloted Glider. L’appareil en développement fut officiellement appelé Northwestern XPG-1, afin de souligner son aspect hautement expérimental.
À vrai dire personne à l’US Department of War n’aurait vraiment parier le moindre dollar sur ce projet jugé un peu fou.
Au sein de l’université américaine c’était très différent. Les 12 000 dollars de subventions des militaires, une somme très importante à l’époque, furent employés de manière stricte. Chaque cent était compté, rien n’était dépensé à outrance. Pour propulser leur avion ils firent appel au Franklin 6AC-298-N3, un moteur de six cylindres en ligne de seulement 160 chevaux. Celui-ci était alors inconnu dans l’aviation, étant réservé à des applications industrielles. Il entraînait une hélice bipale en bois conçu spécifiquement pour lui le laboratoire d’aérodynamique de l’université.
Quand le Waco CG-4 livré à l’université, déposé, puis reconstruit comme XPG-1 l’US Department of War se rendit compte que Northwestern n’avait dépensé que 9800 dollars. C’était alors le moins onéreux de tous les chantiers de développement aéronautique aux États-Unis.
Le prototype vola pour la première fois en septembre 1943.
Le premier vol ne fut pas des plus aisés, le Northwestern XPG-1 étant alors sous-motorisé. Du côté de chez Waco on regardait cette drôle de machine avec beaucoup d’intérêt. Les futures opérations en Europe et dans le Pacifique, planifiée par l’US Department of War et par les Alliés, laissaient entrevoir un vrai potentiel de marché pour une telle machine. L’avionneur décida en décembre 1943 de reprendre la main sur l’université. Pour autant elle invita plusieurs des concepteurs du XPG-1 à la rejoindre, au titre du service à la guerre.
Début 1944 le constructeur lança officiellement les travaux du Waco XPG-2, une version plus approfondie du précédent.
La première décision fut d’abandonné ce moteur Franklin 6AC-298-N3 jugé inadapté. Waco opta plutôt pour le Ranger L-440-1. Ce moteur à six cylindres en ligne de 175 chevaux était du même type que celui équipant l’amphibie Grumman OA-14 Widgeon et l’avion d’entraînant primaire Fairchild PT-19 Cornell alors en dotations dans l’US Army Air Force. Cette dernière se dit rapidement intéressée par le Waco XPG-2 mais pas comme avion de transport tactique. Elle comptait l’utiliser pour des liaisons entre ses bases aériennes afin d’alléger la charge de travail des équipages de Curtiss C-46 Commando et Douglas C-47 Skytrain. Le planeur motorisé avait trouvé sa voie : le soutien logistique !
Le premier vol du XPG-2 intervint en juillet 1944, alors que l’opération d’invasion de l’Europe sous occupation nazie avait pleinement débuté. Immédiatement l’USAAF passa commande pour 250 exemplaires de l’appareil. Il devenait une réalité industrielle. Il reçut le patronyme de Hadrian II.
Extérieurement le Waco PG-2 Hadrian II n’était ni plus ni moins qu’un planeur d’assaut CG-4A sur lequel avait été greffé deux moteurs en ligne et disposant d’un cockpit repensé. Sa charge marchande lui interdisait de facto les champs de bataille, n’ayant plus la capacité de transporter de jeep mais plutôt des colis de petite taille et du personnel.
Au titre de la loi de prêt-bail l’avion fut proposé à plusieurs pays, les Alliés des États-Unis. Après l’avoir longuement envisagé la Royal Air Force le rejeta tandis que la Royal Canadian Air Force en commanda un exemplaire qui reçut la désignation de Hadrian Mk-III.
Malheureusement pour le PG-2 les usines de Waco étaient prioritairement dédiés aux planeurs d’assaut. Et l’équipe Northwestern ne put disposer que d’un petit atelier qui ne permettait la sortie que d’un avion par semaine. L’exemplaire canadien fut le troisième produit «en série».
Aussi quand la Seconde Guerre mondiale prit fin en août 1945 seuls dix Waco PG-2A Hadrian II de série servaient en unité, pour des liaisons entre les bases américaines sur le territoire des États-Unis. L’appareil canadien ne dépassa jamais les essais en vol.
Peu avant la fin des hostilités l’avionneur avait développé l’YPG-2B doté de moteurs en étoile. Il demeura à l’état de présérie et fut employé pour du soutien aux essais en vols jusqu’en juin 1950, époque à laquelle tous les PG-2 furent envoyés à la casse.
Il est à noter qu’en septembre 1947 à la création de l’US Air Force les dix PG-2A et l’unique YPG-2B reçurent la désignation de Waco G-2 Hadrian II qu’ils conservèrent jusqu’à leur retraite.
Il ne reste de nos jours plus rien de cette étonnante aventure. Plusieurs sources bibliographiques font état d’une proposition du Waco PG-2 Hadrian II à l’US Navy sans pour autant en dire plus. Il semble que l’aéronavale américain ait catégoriquement refusé cet avion de transport léger.
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