Avec la fin du conflit commença une période de « vache maigre » pour l’aviation militaire britannique qui ne pouvait plus, officiellement, se baser sur la manne financière et industrielle des Etats-Unis pour continuer son équipement. Et l’un des secteurs qui fut particulièrement touché est le transport militaire. En effet, les avions de transport avaient été fournis en masse par l’Amérique, mais la fin de la guerre n’incluait pas forcément la fin des opérations aériennes pour la RAF. Très occupée par le rapatriement des soldats prisonniers en Allemagne, mais également en Birmanie ou en Chine la flotte de transport britannique semblait s’user à très grande vitesse. Il devint rapidement primordiale pour la RAF de remédier à cela. Dans cette optique, l’Air Ministry décida de commander en série un avion qui avait été conçu au départ pour relancer l’aviation civile entre l’Angleterre et l’Europe : le Vickers Viking. Avec cette machine s’ouvrait une lignée très prolifique.
En effet, le Viking tirait ses origines d’une Specification commune à l’Air Ministry et au Supply Ministry (respectivement ministère de l’air et ministère de l’industrie et du développement) qui prévoyait la mise au point d’un avion court moyen courrier pouvant permettre des liaisons civiles entre Londres et les principales capitales d’Europe occidentale : Bruxelles, Paris, Copenhague, Amsterdam, voire Berlin. Afin de réduire les coûts de production plusieurs éléments, comme par exemple les ailes ou encore le poste de pilotage et le train d’atterrissage étaient commun avec le bombardier Wellington du même constructeur. Après le premier vol du prototype, intervenu alors même que la guerre en Europe venait tout juste de se terminer, à la date du 22 juin 1945, l’Air Ministry décida d’acquérir un premier lot de douze avions sous la dénomination de Viking C Mk-2. La désignation de Viking C Mk-1 étant réservé au prototype, un avion pourtant considéré comme civil. En fait sur les douze avions construits, seul huit d’entre eux reçurent cette désignation, les autres prenant celle de Viking CC Mk-2, désignation qui montrait bien leur mission de transport de haute personnalité. En effet ces quatre avions furent affectés au King’s Flight, en remplacement de cinq Avro Anson.
Le Vickers Viking se présentait sous la forme d’un monoplan à aile mi-médiane cantilever bimoteur. Il disposait d’un train d’atterrissage principal escamotable et d’une roulette de queue orientable. Son cockpit triplace permettait d’y loger le pilote, le copilote, et l’opérateur radio. L’avion n’étant pas conçu pour transporter des charges de fret, il ne disposait pas de porte de chargement large. Sa cabine pouvait embarquer 24 passagers dans un confort très intéressant. Il disposait de deux moteurs Bristol Hercules. Le Viking est entré en service dans la RAF en mai 1946.
Les huit Viking C Mk-2 remplirent principalement des missions de liaison et de transport léger entre le sud de l’Angleterre et l’Allemagne ou la France. En effet cet avion ne servit jamais au rapatriement des soldats, même ceux qui rentrèrent au pays en dernier. L’un de ces avions connu toutefois une certaine gloire. En effet un de ces avions fut affecté comme avion de transport personnel pour messieurs Geoffrey Lawrence et Hartley Showcross, respectivement juge principal et procureur, tous deux représentants le Royaume Uni au Procès de Nuremberg contre les criminels nazis. Malgré cette affectation le Viking n’avait pas bonne réputation dans la RAF. En effet en dehors du King’s Flight l’avion semblait bel et bien être totalement inutile pour une force aérienne, en raison de son incapacité à transporter le fret et à parachuter des troupes. C’est la raison pour laquelle Vickers décida d’en développer une version spécifiquement militaire : le Valetta.
Par rapport au Viking celui ci se caractérisait par une porte de chargement large pour le fret, un planche renforcé, un cockpit mieux protégé contre les tirs venant du sol, des roulement de soute permettant le transport de palettes, et le montage de sièges en toile plus adaptés aux troupes que les moelleux fauteuils du Viking C Mk-2. Le premier Valetta vola le 30 juin 1947. La production de ces avions de transport représenta 251 exemplaires dont une vingtaine de Valetta C Mk-2 de transport prioritaire, aménagés pour 15 passagers. Les autres avions étaient des Valetta C Mk-1. A ces avions furent ajoutés en 1949 un lot de quarante Valetta T Mk-3 utilisés pour la formation des radio mécaniciens, mais également pour la calibration des radars de défense en Grande-Bretagne et dans tous les pays du Commonwealth. Les Valetta remplacèrent rapidement les derniers biplans De Havilland Dominie encore en service. Ils furent basés sur l’ensemble du territoire britannique mais également en Allemagne et en Belgique.
Fin 1947 la Royal Air Force fit savoir qu’elle recherchait un avion susceptible de remplacer les derniers Wellington T Mk-10 d’entrainement pour les équipages et pilotes de bombardiers. L’Air Ministry émit la Specification 18/47 et choisit rapidement Vickers afin que le constructeur modifie le Viking pour ce genre de mission. Le nouvel avion fut désigné Varsity.
L’avion se différenciait par son aile à l’envergure accrue, par son train d’atterrissage tricycle escamotable, et par sa gondole ventrale renfermant le poste d’entrainement pour les élèves et une soute à bombes permettant l’emport d’une dizaine de bombes d’exercice de 11 kilogrammes chacune. Le premier Varsity effectua son vol inaugural le 17 juillet 1949.
Au total 160 de ces avions d’entrainement multimoteurs furent construits pour les besoins de la RAF. Ils permirent de former les équipages appelés à voler sur des bombardiers aussi différents que l’Avro Lincoln, le Vickers Valiant, ou encore le Handley-Page Victor. Les Varsity volèrent jusqu’en 1976 dans les unités d’entrainement britanniques. La RAF utilisa en outre une dizaine d’avions de reconnaissance sous la désignation Varsity R Mk-1 pour des missions d’espionnage et d’écoute des ondes. Ces avions surveillaient principalement le corridor de Berlin. Les Varsity R Mk-1 restèrent en service de 1954 à 1975 et furent remplacés par une version spéciale du Canberra. Un Varsity fit exception, celui codé WF-425, et désigné Varsity W Mk-1. Il s’agissait d’un avion de la série T Mk-1 spécialement modifié pour servir au sein du Meteorological Research Flight pour des missions de reconnaissance météorologique. Cet avion vola pour cette mission très discrète entre 1960 et 1976. Il ne fut pas remplacé.
Mais l’avion qui eut la carrière la plus longue reste sans conteste le Varsity T Mk-1 codé WL-679, un avion qui servit au sein du Royal Aircraft Establishment entre janvier 1954 et octobre 1999. Quarante-cinq années de service au cours desquelles cette machine participa à la plus part des essais et développements dans laquelle se lança l’industrie aéronautique britannique. Le Varsity du RAE servit notamment au programme du British Aerospace Nimrod et à celui du démonstrateur technologique EAP.
Outre la Royal Air Force, quelques pays utilisèrent des Viking et ses débouchés. En effet la Fuerza Aeréa Argentina acquis 20 Viking Mk-1A, tandis que la Suède utilisa trois Varsity T-Mk-1 transformés en avions de guerre électronique. Les avions suédois furent remplacés à la fin des années 60 par deux Caravelle. La Jordanie utilisa quant à elle cinq Valetta acquis de seconde main auprès de la RAF.
Si le Viking est plus connu comme un avion civil, il faut remarquer que les seules versions qui en furent développées étaient des aéronefs militaires. Le Viking, et ses dérivés, n’étaient pas des avions désirés par la RAF, mais demeurèrent en service très longtemps. Toutefois malgré cette longévité le Viking, le Valetta, et la Varsity restent des avions méconnus.
Quelques-uns uns sont actuellement visibles dans des musées britanniques, comme un Valetta C Mk-1 qui est exposé à Hendon au RAF-Museum. L’avion du RAE est quant à lui présent dans les collections du Cosford Aerospace Museum.
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