Dans l’esprit de la majorité des passionnés d’aviation la chasse soviétique se résume bien souvent à des jets de combat très modernes qui ont toujours su être à la pointe de leur temps. Qu’ils s’appellent Mikoyan-Gurevitch MiG-19 Farmer et MiG-23 Flogger ou encore Sukhoi Su-15 Flagon et Su-27 Flanker ces avions ont enflammé l’imaginaire des aérophiles. Pourtant comme d’autres nations l’URSS n’a pas toujours connu que des périodes roses. L’entre-deux-guerres ne fut pas son âge d’or avec des machines souvent assez moyennes voire médiocres. Pourtant quelques rares chasseurs sortirent du lot à l’image du sesquiplan Tupolev I-4.
Au début de l’année 1927 le bureau d’études Tupolev reçut l’ordre du gouvernement soviétique de concevoir un chasseur léger aux standards alors en vigueur en Europe occidentale et aux États-Unis. À cette époque le chasseur standard en URSS était le biplan Grigorovitch I-2 de construction mixte en bois entoilé et métal. Malgré un armement efficace l’avion ne représentait pas vraiment ce que les forces soviétiques voulaient.
C’est pourquoi le programme fut lancé chez Tupolev.
Placé sous les ordres du chef de bureau d’étude Pavel O. Sukhoi l’équipe créa alors l’avion baptisé Tupolev ANT-5. Les lettres ANT signifiaient Andrei Nikolayevich Tupolev et le numéro 5 désignait le cinquième avion conçu par le bureau d’étude.
Extérieurement l’ANT-5 se présentait sous la forme d’un sesquiplan de construction entièrement métallique. Doté d’un moteur à neuf cylindres en étoile Bristol Jupiter de 420 chevaux construit sous licence française par Gnome & Rhône il se présentait sous la forme d’un monoplace à train fixe classique. Son armement se composait de deux mitrailleuses synchronisées de calibre 7.62mm.
Le premier vol de l’avion eut lieu le 10 août 1927.
Dès le départ le Tupolev ANT-5 surclassa les chasseurs soviétiques de son temps. Un second prototype fut commandé, doté cette fois d’un Bristol Jupiter 9Asb là encore assemblé en France par Gnome & Rhône. Celui-ci vola début juillet 1928. La campagne d’essais des deux prototypes s’étala jusqu’en avril 1929.
Entre temps Moscou avait pris sa décision : l’ANT-5 serait son prochain chasseur sous la désignation d’I-4. Trois cent soixante exemplaires furent commandés, dont vingt I-4P qui étaient en fait des hydravions à flotteurs de chasse.
Quelques avions furent assemblés comme I-4K adaptés à l’emport de roquettes sous le plan supérieur de voilure. Malheureusement cet armement ne dépassa pas le stade expérimental. Il représentait alors une évolution soviétique des fusées françaises Le Prieur de la Première Guerre mondiale.
Les premiers exemplaires de série entrèrent en service en mai 1929. Un an et demi plus tard la totalité avait été livrée et équipait dix-huit escadrilles réparties sur l’ensemble du territoire soviétique. Le Tupolev I-4 était alors présenté comme un chasseur ayant des capacités similaires aux meilleurs chasseurs européens. Cependant en l’absence d’affrontement avec de tels chasseurs il était impossible de le vérifier. Malgré tout l’I-4 avait la réputation d’un chasseur nerveux, rapide, manœuvrable, et bien armé. Cependant il était réputé pardonnant peu les erreurs de pilotage et donc déconseillé aux jeunes pilotes fraichement formés.
Le Tupolev I-4 demeura en première ligne jusqu’à l’été 1933, laissant alors la place au monoplan Grigorovitch I-Z globalement considéré comme bien inférieur. Début 1934 plus aucun I-4 ne volait comme chasseur, quelques-uns furent encore employés jusqu’en 1937 comme avions d’entraînement avancé.
En 1931 le Tupolev I-4 fut également essayé comme chasseur-parasite. Deux exemplaires étaient alors fixés sur l’extrados de voilure d’un bombardier Tupolev TB-1 dont ils devaient assurer la protection. Les essais démontrèrent surtout que cette solution n’avait rien de viable et le programme fut abandonné. Amélioré par la suite le principe fut repris sur un bombardier TB-3 équipé de chasseurs Polikarpov I-16 Ishak.
Jamais exporté l’I-4 fut avec le Tu-128 Fiddler de la guerre froide une des rares réussites de l’avionneur Tupolev dans le domaine de l’aviation de chasse. Ce constructeur est bien plus connu pour ses avions de ligne et ses bombardiers. Aujourd’hui un Tupolev I-4 est préservé dans un musée moscovite, malheureusement non visible du public.
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