Nation insulaire donc par définition tournée vers les mers le Royaume-Uni a toujours été pionnière en matière d’hydravions et d’avions amphibies. Et l’une de ses spécialités fut durant l’entre-deux-guerres et la Seconde Guerre mondiale de posséder des hydravions à coque capables d’être catapultés depuis des navires de guerre puis d’y revenir, moyennant l’emploi d’une grue, une fois la mission terminée. L’avènement du radar embarqué ainsi que des hélicoptères allait bien évidemment tuer ce concept. Pour autant un ultime appareil de ce type fut réalisé : l’étonnant Supermarine Seagull.
C’est au début de l’année 1940 que la Royal Navy demanda à l’Air Ministry d’émettre un cahier des charges relatif au remplacement de ses amphibies embarqués Supermarine Walrus. Le futur appareil se devait d’être monomoteur et d’envisager à plus long terme le succession des Supermarine Sea Otter alors en phase finale de développement. C’est dans ce sens que fut publiée la Specification 12/40. De manière assez étrange seuls deux constructeurs y répondirent : Fairey et Supermarine.
Le premier n’avait aucune expérience des hydravions monomoteurs à coques embarqués tandis que le second en était le spécialiste. Pourtant chacun soumit son avant projet à l’Air Ministry. Le plus ambitieux était celui de Supermarine, désigné Type 347. Rapidement c’est celui-ci qui fut sélectionné, notamment du fait que Fairey avait jeter l’éponge préférant se concentrer sur son chasseur-bombardier Firefly. Alors même que le moteur à douze cylindres en V Merlin choisi par l’Air Ministry venait juste d’être livré les usines Supermarine de Woolston, dans la proche banlieue de Southampton, furent bombardées. Nous étions à l’été 1940 et la Luftwaffe faisait peser un lourd tribut à l’industrie britannique. Un raid de bimoteurs allemands Dornier Do 17 et Heinkel He 111 détruisit totalement les premiers travaux autour du Type 347.
En même temps qu’on reconstruisit les ateliers de l’avionneur ses ingénieurs obtinrent de l’Air Ministry que le moteur Merlin soit abandonné au profit d’un Griffon de même architecture mais beaucoup plus moderne et bien plus puissant. Celui-ci était appelé à actionner une double hélice contrarotative. Le Supermarine Type 347 devint alors le Type 381. En mars 1943 une commande fut passée par la Royal Navy pour trois prototypes. L’avion amphibie reçut le nom de baptême de Seagull, en référence à un hydravion patrouilleur des années 1920.
Extérieurement le Supermarine Type 381 Seagull détonnait. C’en était fini des architectures en biplans qui avaient fait la réputation de ces aéronefs, le nouvel appareil était un monoplan à aile haute cantilever. Construit entièrement en métal l’amphibie possédait un train d’atterrissage tricycle escamotable et un empennage double dérive très innovant car conçu afin de permettre les catapultages même par mauvaise mer. En fait les ingénieurs de Supermarine avaient pu imaginer de nouveaux concept pour lui le Seagull étant le premier hydravion conçu par l’avionneur après le décès de Reginald Mitchell. Pour autant il conservait la fameuse coque à double redan qui avait fait la renommé des hydravions embarqués Supermarine. Le Type 381 mélangeait donc traditions et modernité. Quatre mitrailleuses lourdes étaient prévues, deux jumelées dans le nez et deux autres dans une tourelle Boulton Paul installé derrière le moteur au niveau du fuselage. En outre 200 kilogrammes de charges de profondeurs devait permettre au Seagull de remplir des missions anti-sous-marines.
Malheureusement pour lui l’Air Ministry changea son fusil d’épaule et, au travers de la Specification 14/44 le modifia en profondeur. Nous étions alors en mars 1944 et aucun prototype n’avait encore volé. La mission première du Seagull devint alors les recherches et sauvetages depuis la terre ferme et plus depuis un pont de navire. Le Type 381 devint alors le Type 530. L’armement fut déposé et de nouvelles études aérodynamiques lancées. La commande fut ramenée à deux prototypes, immatriculés PA143 et PA147. Finalement la guerre se termina et le programme du Seagull avançait péniblement.
Il fallut attendre le 14 juillet 1948 pour que le premier vol d’un Supermarine Seagull ait lieu. Le 2 septembre 1949 le second prototype décollait à son tour. Début 1950 la Royal Navy testa les deux prototypes à bord du porte-avions HMS Ark Royal. L’idée était de les employer pour le sauvetage en mer à longue distance et pour les évacuations sanitaires. Des tests permirent de simuler une mission avec sept rescapés. Cependant l’avionneur déconseillait d’accueillir plus de trois blessés en plus des trois membres d’équipage. L’émergence du Westland Dragonfly eut comme impact direct de stopper le programme en janvier 1952. L’hélicoptère avait remplacé l’hydravion dans le cœur des amiraux britanniques. Supermarine tenta alors de placer son Seagull auprès de pays déjà clients comme le Danemark, la France, ou encore la Nouvelle-Zélande mais sans succès. Vendre un aéronef à l’export alors que son pays d’origine l’a refusé est quasi mission impossible.
Envoyés à la ferraille au printemps 1952 les Supermarine Seagull restent aujourd’hui encore comme les plus aboutis des hydravions embarqués britanniques. Ils n’ont cependant jamais réussi à démontrer leur utilité, faute de missions claires à remplir.
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