Au cours de l’entre-deux-guerres l’avionneur britannique Supermarine se fit une spécialité dans la conception et la réalisation d’hydravions à coque. Certaines de ces machines participèrent aux combats de la Seconde Guerre mondiale tandis que d’autres quittèrent le service actif peu de temps avant le déclenchement des hostilités. Ce fut notamment le cas d’un hydravion de reconnaissance côtière qui servit également à l’entraînement avancé des équipages : le Supermarine Scapa.
Fin 1931 l’Air Ministry britannique émit la Specification 20/31 relative à un hydravion à coque bimoteur de construction métallique destiné à des missions de reconnaissance armée. À cette époque la construction mixte, c’est à dire mélangeant le bois et le métal était la norme au Royaume-Uni. Cette Specification 20/31 était donc ô combien moderne.
De manière assez surprenante seuls constructeurs y répondirent avec des avant-projets très différents : Saunders-Roe et Supermarine.
En fait la compétition était biaisée, mais les responsables de Saunders-Roe ne le comprirent que trop tard. Supermarine l’avait gagnée avant même qu’elle soit lancée. En effet le futur appareil était alors connu comme Southampton Mk-IV, dérivant donc du fameux Supermarine Southampton alors en dotation au sein de la Royal Air Force depuis six ans.
Cependant l’Air Ministry ordonna tout de même à Supermarine de produire un prototype de son Southampton Mk-IV.
Extérieurement le Supermarine Southampton Mk-IV était clairement dérivé de son grand frère. Pourtant le profil de voilure était sensiblement différent. L’avant de l’hydravion fut rectifiée, accueillant un poste de pilotage fermé en lieu et place de celui à l’air libre des autres versions du Southampton.
La grosse nouveauté était donc l’assemblage métallique tandis que la propulsion avait été changée. Deux moteurs à douze cylindres en V Rolls-Royce Kestrel d’une puissance nominale de 525 chevaux remplaçaient ainsi les traditionnels Napier Lion en W. Le Kestrel n’était pas à proprement parler habituel sur un hydravion à coque. On le retrouvait alors sur des avions terrestres comme les bombardiers légers Fairey Fox et Hawker Hart. Seul le constructeur Short l’avait déjà employé dans un rôle de motorisation d’hydravions.
L’armement du Southampton Mk-IV était limité au strict minimum, l’appareil n’étant destiné qu’à des missions de reconnaissance côtière. Trois postes de tirs pour chacun une mitrailleuse mobile Lewis de calibre 7.7mm furent installés. En outre l’hydravion pouvait emporter 450 kilogrammes de bombes et de charges de profondeurs sous voilures.
Le premier vol de l’appareil intervint le 8 juillet 1932.
Quelques semaines plus tard la Royal Air Force passa commande pour quatorze exemplaires de série. À cette occasion l’avion changea de nom. De Southampton Mk-IV il devint Scapa Mk-I. La RAF et Supermarine comptaient ainsi marquer les différences entre les machines métalliques et celles mixtes.
Pourtant Supermarine eut bien du mal à usiner son Scapa, si bien que les six premiers exemplaires n’entrèrent pas en service avant 1935. Au printemps 1936 la RAF possédait sa pleine dotation, recevant même à l’été suivant le prototype qui fut utilisé pour l’entraînement avancé des pilotes et équipages.
Quatre Supermarine Scapa furent affectés au N°202 Squadron de la RAF, basé sur l’île de Malte. Ils y réalisèrent des missions de reconnaissance maritime et côtière et de recherches et sauvetages en mer en Méditerranée.
Les autres exemplaires furent versés aux N°204 et N°228 Squadrons pour des missions de reconnaissance autour des côtes britanniques, notamment en Manche et au nord des côtes écossaises. Cependant à quelques reprises de tels hydravions furent envoyés en mer Baltique afin de surveiller les agissements de l’Allemagne hitlérienne en plein réarmement.
Entre mars et mai 1937 les douze Supermarine Scapa Mk-I encore en état de vol furent regroupés au sein du N°240 Squadron pour des missions de reconnaissance côtière et d’entraînement avancé aux recherches et sauvetages en mer. En fait à cette époque l’hydravion bimoteur métallique n’avait plus les faveurs de la Royal Air Force. Trop fréquemment en panne, et surtout sujet à une corrosion excessive il était devenu urgent de le remplacer.
Le Saro London s’annonçait comme le candidat idéal. Supermarine en avait décidé autrement, développant un hydravion tirant les enseignements des échecs du Scapa. Ainsi venait de naître le mythique Stranraer.
Finalement les derniers Supermarine Scapa Mk-I furent retirés du service en janvier 1939. Six furent versés à une école de mécaniciens de la RAF, spécialisés dans les hydravions à coques. Ils les utilisèrent jusqu’au déclenchement de la Seconde Guerre mondiale en septembre de la même année. Les Scapa furent envoyés à la ferraille.
Hydravion retombé dans l’oubli le Supermarine Scapa eut la particularité de faire la liaison entre deux franches réussites alors même que lui n’en était pas une. Il avait la réputation d’un hydravion sous-motorisé, difficile de pilotage, et finalement raté. Ce qui explique sans doute sa carrière finalement si courte. La preuve que même Reginald Mitchell avait le droit de se tromper dans ses conceptions.
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