Toutes les forces aériennes, aussi puissantes soient-elles, ne peuvent exister que grâce à la formation qu’ont reçu leurs personnels. Les meilleurs pilotes de chasse ne peuvent devenir aussi bon que parce qu’ils ont, en amont de leur affectation en unité de combat, été instruit sur des avions d’entraînement performants. C’est à partir de cette théorie que, dés le début des années 1970, l’Armée de l’Air a entreprit la recherche d’un appareil d’entraînement primaire de haut niveau. En 1976, il fut décidé que ce serait la SOCATA (SOciété de Construction Aéronautique de TArbes) qui mettrait en chantier l’avion. Jusque là spécialisée dans les avions de tourisme, la SOCATA n’en était pas moins l’héritière du célèbre avionneur Morane-Saulnier, constructeur du MS-406, principal chasseur de l’Armée de l’Air en 1939.
Les ingénieurs de Tarbes s’inspirèrent largement du Beech T-34 Mentor, le monomoteur léger de l’US Air Force, afin de concevoir leur nouvel avion. Celui-ci reprenait la nomenclature maison, à savoir le « TB » et devenait donc TB-30. Il fut baptisé Epsilon.
L’Epsilon se présentait comme un monoplan biplace en tandem mû par un moteur à piston de 300ch. Son train d’atterrissage hydraulique pouvait toutefois être « rentrer » de manière manuelle. D’aspect simple et robuste, l’avion n’en était pas moins doté d’un cockpit très moderne incluant une liaison VFR/IFR. Il réalisa son premier vol le 22 décembre 1977. L’Armée de l’Air signa un contrat de développement en 1979. Les essais, réalisés par les pilotes du Centre d’Essais en Vol et de l’École du Personnel Navigant d’Essais et de Réception, démontrèrent les très bonnes qualités de l’avion mais aussi de petits défauts. Il fallut redessiner et ré usiner le second prototype: on agrandit et recula la verrière, on redessina les saumons d’aile, et surtout on ajouta une quille sur l’arrière de l’intrados afin de corriger la tendance de l’avion à partir en lacet lors des vols à haute altitude. Le second prototype décolla ainsi modifié le 31 octobre 1980.
Le premier SOCATA TB-30 Epsilon fut livré à l’Armée de l’Air en mars 1982 et mis en service quelques semaines plus tard. Au total le Ministère de la Défense Nationale acquis 150 Epsilon. Ces avions servent actuellement au sein du Commandement des Écoles de l’Armée de l’Air (ou CEAA) sur la Base Aérienne 709 de Cognac. Ces avions après avoir longtemps portés une livrée blanche ont récemment revêtu le nouveau camouflage des avions d’entraînement français: le gris moyen. Le cursus de formation des futurs pilotes de chasse français commence sur TB-30. Les élèves passent ensuite sur l’avion mono turbopropulseur brésilien Embraer Tucano puis sur Alpha Jet E. Les futurs pilotes d’avions de l’Aviation Légère de l’Armée de Terre ainsi que ceux de l’Aéronautique Navale effectuent également leur formation initiale dans le ciel charentais sur TB-30.
Entre les années 1989 et 2016 l’Epsilon fut la monture de la patrouille acrobatique du Cartouche Doré. Ces monomoteurs participaient à la plus part des grands meetings aériens en Europe et ailleurs. Cette formation venait participer également de temps en temps au traditionnel défilé aérien au-dessus des Champs-Élysées le 14 juillet et au Mondial des Patrouilles sur la Base Aérienne 105 d’Evreux.
Les TB-30 Epsilon se sont dotés d’une avionique sans cesse remise au goût du jour, qui inclus désormais un GPS et un HUD.
En 1982 la Força Aéréa Portuguesa décida d’acquérir un lot de 18 Epsilon pour équiper son Esquadra 101. Les avions français remplacèrent alors les vénérables North American T-6 américains qui dataient de la Seconde Guerre mondiale.
Les TB-30 portugais ont été assemblés localement sous licence par la société OGMA.
Les Epsilon les plus surprenants sont sans nul doute les quatre TB-30A acquis en 1982 par le Togo. Ses avions servent pour des missions de lutte anti-guérilla et d’appui au sol. Ce sont les seuls Epsilon armés. Ils emportent une charge offensive de 300kg composée de paniers à roquettes, de bombes légères et de nacelles de mitrailleuses. Les avions togolais effectuent parfois des missions de patrouille maritime en soutien des Cessna O-2.
En 1985, la SOCATA fit voler une version améliorée et dotée d’un turbopropulseur Turboméca Arrius. Cet avion fut désigné TB-31 Oméga. Il visait le marché de remplacement des Fouga CM-170 mais ne fut pas commander en série. L’Oméga participa également au marché américain du JPATS mais fut une fois de plus battu, par le Beechcraft T-6A Texan II. Son programme fut donc annulé.
À terme, à l’horizon 2020-2025, le TB-30 Epsilon devra laisser la place à des avions plus modernes dans les rangs de l’Armée de l’Air. Son remplacement a déjà commencé au travers d’avions comme le Grob G.120 allemand et le Cirrus SR.20 américain. Cependant le petit monomoteur a formé tant de pilotes qu’il laissera une trace indélébile dans l’esprit de bon nombre de ceux qui aujourd’hui volent sur Boeing E-3F, Dassault Aviation Rafale B/C, ou encore Transall C.160R. C’est aussi ça la marque des avions légendaires !
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