L’insularité du Royaume-Uni en a toujours fait un pays particulièrement adapté à l’emploi des hydravions. L’entre-deux-guerres fut à ce niveau là un véritable âge d’or avec des machines souvent développées pour les besoins concrets de la Royal Air Force ou de la Fleet Air Arm. Il arriva également que de tels aéronefs soient développés et produits hors de tout marché, ce que l’on appelle sur fonds propres. Parmi les nombreuses machines pensées de cette manière une des plus impressionnantes fut le Short S.14 Sarafand.
Au début de l’année 1928 l’ingénieur nord-irlandais Oswald Short figurait parmi les plus influents de Grande Bretagne. Aussi quand il proposa de développer sur fonds propres un hydravion de reconnaissance maritime à très grand rayon d’action dérivé de son Short S.12 Singapore Mk-II les responsables de l’Air Ministry l’écoutèrent avec attention. L’idée d’Oswald Short était en fait de développer une version profondément agrandie du S.12 disposant de rien moins que six moteurs à douze cylindres en V Rolls-Royce Buzzard montés en configuration push-pull. Chacun développait 850 chevaux, soit un total de 5100 chevaux, ce qui était alors inédit outre-Manche.
L’Air Ministry donna son feu vert à la production d’un prototype via la Specification 6/28 rédigée spécialement pour cet hydravion. Aucun financement publique ne fut alloué à la société Short. En fait une bonne partie des plans étaient issus du S.12 Singapore Mk-II. Les ingénieurs britanniques pensèrent un temps lui affecter un patronyme en rapport avec ses origines puis ils se reprirent. L’hydravion devint ainsi début 1929 le S.14 Sarafand.
Afin de favoriser les essais à venir le prototype fut assemblé dans le Kent, et non en Ulster. C’est à Rochester qu’il naquit.
L’armement prévu pour le Short S.14 Sarafand était impressionnant pour l’époque : un canon COW de 37 millimètres et quatre mitrailleuses Lewis de calibre 7.7 millimètres. Chaque arme était montée sur affût mobile annulaire. Deux mitrailleuses jumelées montées dans le nez, deux autres également jumelées montées derrière l’empennage et enfin le canon installé au centre du fuselage. Aucun armement offensif ne fut pensé, le S.14 n’étant donc pas prévu pour tirer des bombes ou des mines antinavires.
C’est sous le serial militaire britannique S1589 et porteur de marquages de nationalités que le Short S.14 Sarafand réalisa son premier vol le 30 juin 1932. Il déjaugea depuis un plan d’eau proche de Rochester sur la Medway, un affluent de la Tamise. Ce vol inaugural se déroula sans embûche. Quelques semaines plus tard le prototype d’hydravion hexamoteur était remis au Marine Aircraft Experimental Establishment. Depuis ses installations de l’île de Grain le MAEE poussa l’hydravion jusqu’à ses limites, et celles ci furent en fait rapidement atteintes. À l’usage les ingénieurs et techniciens britanniques se rendirent compte que les attaches des plans de voilure supportaient mal la puissance des six moteurs. Dans le même ordre d’idée le canon COW de 37 millimètres s’enrayait régulièrement, notamment lors des patrouilles en-dessous de 1000 pieds d’altitude.
Début 1935 l’Air Ministry décida qu’aucune commande en série du Short S.14 Sarafand ne serait passée. L’hydravion fut encore utilisé durant quelques mois par le Marine Aircraft Experimental Establishment comme appareil de soutien aux essais en vol. Il fut envoyé à la ferraille en 1936. Ainsi se terminait l’aventure de la version hexamoteur du Singapore Mk-II.
Ce S.14 Sarafand fut le plus gros hydravion britannique jusqu’à l’entrée service actif du Short S.26 Sunderland.
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