C’est en vue de donner un successeur à son A.17, un hydravion commercial de grande qualité que la firme Saro (contraction de Saunders-Roe) lança en 1929 le développement du modèle A.19 bimoteur. Celui ci devait alors pouvoir transporter huit passagers sur une distance d’environ 500 km. Saro cherchait notamment à placer son hydravion sur le marché très porteur des liaisons civiles Londres-Paris avec des déjaugeages et des amerrissages sur les fleuves Tamise et Seine. Le A.19 suscita dès le début une certaine attention de la part des transporteurs britanniques et notamment d’Imperial Airways et de Guernesey Airways, une compagnie aérienne faisant des liaisons entre les îles anglo-normandes et Londres. Mais le projet A.19 intéressait également la Royal Air Force, pour une toute autre mission : l’entraînement au vol sur hydravion à coque. Un prototype fut commandé par l’Air Ministry et livré, avant même son premier vol, au Royal Aircraft Establishment, le RAE, équivalent britannique du Centre d’Essais en Vol français.
Le Saro A.19 se présentait sous la forme d’un hydravion à coque monoplan à aile haute construit en bois, toile, et métal. Outre sa coque à double redan, il disposait de deux petits flotteurs installés sous l’intrados de voilure. L’empennage assez classique disposait néanmoins de volets horizontaux hypersustentateurs, que l’on retrouvait également sur l’aile principale, destinés à favoriser les déjaugeage depuis des plans d’eau de courte distance, comme par exemple un fleuve disposant de ponts. L’une des caractéristiques remarquables de cette machine était ses deux moteurs en étoile Wright d’une puissance 300 chevaux entraînant chacun une hélice bipale. En effet ils était installé en nacelle d’extrados de voilure, un peu à la manière des hydravions transatlantiques allemands construits par Dornier. Le A.19 disposait d’un cockpit biplace côte à côte largement vitré et d’une cabine pouvant accueillir huit passagers. Son prototype réalisa son premier vol entre les mains des pilotes d’essais du RAE en juin 1930.
Si cinq exemplaires furent en effet vendus à divers clients civils, le gros de la production alla à la RAF qui passa commande fin 1930 pour 17 exemplaires, dont un de présérie. En effet l’aviation militaire britannique ne désirait pas un hydravion de transport de personnel mais bel et bien un appareil d’entraînement avancé. L’exemplaire de présérie fut désigné A.29 dans la nomenclature du constructeur et vola au début de l’année 1931. Par rapport au A.19 le A.29 disposait de nouveaux moteurs Armstrong-Siddeley Serval Mk-III plus puissants et avait vu sa cabine transformée pour permettre l’emport de cinq élèves navigateur. En outre le cockpit était devenu triplace grâce à l’installation d’un strapontin sur lequel un élève ou un instructeur pouvait prendre place. L’appareil disposait de doubles commandes comme sur n’importe qu’elle aéronef d’instruction. La RAF baptisa ses Saro A.29 du nom de Cloud.
Les Saro Cloud Mk-I furent immédiatement mis en service au sein du Squadron 48, à l’exception de l’appareil de présérie qui demeura au RAE comme hydravion de servitude et d’entraînement propre au centre d’essais. Les seize bimoteurs formèrent durant une décennie les pilotes et équipages destinés à servir sous les couleurs du Coastal Command de la RAF. Toutefois avec l’entrée en guerre du pays contre l’Allemagne nazie ses responsables estimèrent que les Cloud Mk-I représentaient une cible trop aisée pour les chasseurs de la Luftwaffe, du fait de leur absence d’armement, et ils décidèrent de leur interdire les missions au-dessus de la Manche. Le Squadron 48 quitta sa base de la côte orientale pour se rendre à RNAS-Culdrose, une base de la Fleet Air Arm installé sur la pointe sud-ouest de l’Angleterre. De là les élèves du Coastal Command pouvaient tranquillement apprendre à piloter au-dessus de la Mer d’Irlande, inaccessible aux chasseurs allemands, y compris à leurs dangereux bimoteurs Messerschmitt Bf-110.
La RAF conserva ses Saro Cloud Mk-I jusqu’en 1942, année au cours de laquelle ils cédèrent la place à divers appareils tels le Saro London ou encore le Supermarine Stranraer. Toutefois la carrière du petit bimoteur n’était pas totalement finie sous les cocardes britanniques. En effet un des cinq appareils civils, appartenant à Imperial Airways fut transféré à la Fleet Air Arm comme hydravion de servitude, où il vola jusque fin 1943 sous la désignation de Cloud Mk-IA. Il s’agit du seul appareil de ce type à avoir porté les couleurs de la Royal Navy.
Sur 22 hydravions assemblés 18 ont connu une carrière militaire, et au moins trois furent perdus en mission. Appareil discret le Saro Cloud remplit néanmoins sa mission durant une dizaine d’années sans jamais faillir. Il demeure aujourd’hui un des très rares hydravions bimoteurs acquis exclusivement pour former les pilotes et équipages.
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