Il est fréquemment admis que les appareils soviétiques ayant pris part à la Seconde Guerre mondiale n’étaient majoritairement pas équivalent à leurs homologues allemands ou britanniques. Bien souvent il s’agissait de machines fragiles et démodés mais quelques appareils réussirent à sortir du lot. Parmi ces machines, il existait un biplan robuste et fiable capable de remplir des missions très éloignées de celle pour laquelle il fut conçu : l’entrainement. Cet avion est le Polikarpov U-2.
Au milieu des années 20 le constructeur soviétique Polikarpov chercha à amélioré son prototype U-1. Il s’agissait alors d’un biplan d’entrainement et d’aviation générale conçu de manière à faciliter les opérations de maintenance. Le U-1 était en fait un véritable puzzle volant dont les ailes et le fuselage pouvaient se démonter en plusieurs morceaux. Bien que révolutionnaire sur le papier le U-1 s’avéra rapidement être impossible à mettre en œuvre et l’avionneur préféra finalement abandonner sa conception. Mais la toute jeune URSS ne voulant pas demeurer en reste sur les questions aéronautiques, une commission moscovite chargea Polikarpov d’étudier une version d’entrainement issu du U-1. Le nouvel avion reçu naturellement la désignation de U-2.
Le U-2 était un biplan biplace d’entrainement mû par un moteur en étoile. Le train d’atterrissage classique avait été renforcé par l’adjonction d’un essieu fixe entre les deux jambes afin de permettre l’utilisation depuis des pistes en herbes peu préparées. Les deux plans d’ailes furent décalés, fournissant ainsi une grande manœuvrabilité à l’appareil. Extérieurement le U-2 ressemblait fortement aux biplans d’entrainement Consolidated de l’US Navy. Mais l’avenir démontra que l’avion soviétique était bien plus solide que l’américain. Le Polikarpov U-2 effectua son premier vol le 7 janvier 1928. Il s’agissait alors d’un avion révolutionnaire.
Cette même année la toute jeune aviation militaire soviétique (ou VVS) reçu ses premiers U-2 mais également la compagnie aérienne nationale Aeroflot. Au cours des années 30 des U-2 furent livrés dans plusieurs pays dont la Bolivie et le Japon. Ce second pays acheta par la suite deux cent cinquante exemplaires de ce biplan pour ses écoles et les centres de formations de l’aviation civile. Les livraisons se prolongèrent durant toute la décennie. Lors de l’entrée en guerre de l’Union Soviétique le 13 septembre 1939, plus de douze mille exemplaires avaient été assemblés. Mais il ne s’agissait encore massivement que d’avions d’entrainement et de servitude.
La première missions offensive d’un U-2 fut réalisé le 6 octobre 1939 quand un avion largua des tracts au-dessus de la ville balte de Vilnius, appelant les habitants à se rendre à l’Armée Rouge sans résistance. Mais les choses devinrent vraiment sérieuses le 30 novembre de cette même année lors de l’attaque russe contre la Finlande. En effet plusieurs dizaines de U-2 furent transformés en biplaces de reconnaissance armée par l’ajout d’une mitrailleuse de 12.7mm en affût annulaire et de bombes de 40kg sous les ailes.
Lorsque en 1941 le Troisième Reich attaque l’URSS la donne change radicalement. En effet de nombreux U-2 sont transformés en monoplaces de harcèlement et reçoivent comme armement principal la roquette à haute vélocité RS-82, alors l’une des meilleurs armes antichar au monde, en dotation notamment sur les terrifiants Illyushin Il-2. Face aux chasseurs allemands, et surtout aux très manœuvrant Messerschmitt Bf-109, les U-2 ne font pas le poids, mais la détermination et le courage des pilotes à défendre la Mère Patrie réussissent toujours à faire des merveilles.
Les U-2 armés connaitrons leurs heures de gloires lors des batailles de Toula, Moscou, et Leningrad. Mais c’est sans conteste à Stalingrad que ces petits biplans firent le plus de dégâts aux blindés de la Wermaacht et des Waffen SS. En effet plus de mille cinq cents Polikarpov U-2 participèrent aux opérations de harcèlement diurne et nocturne contre les formations de panzers et les positions d’artillerie allemande.
Quelques U-2 participèrent également à des missions de reconnaissance maritime en Mer Noire et dans la Baltique afin de repérer d’éventuels mouvements de U-Boots de la Kriegsmarine. Mais la charge offensive s’avéra trop faible et ses avions furent retirés de cette mission en janvier 1942.
Une petite dizaine d’exemplaires fut versée à l’escadrille des Normandie-Niemen, une unité des Forces Aériennes Françaises Libres qui se battaient en URSS sur des avions soviétiques. Leurs Polikarpov U-2 sont demeurés moins célèbres bien sûr que les fameux Yakovlev Yak-3 à casseroles d’hélice tricolore.
A partir de 1944 les U-2 reçurent la désignation de Po-2 mais celle-çi ne fut jamais usitée par les pilotes et personnels russes. Plus de dix sept mille biplans Polikarpov U-2 ont été construits jusqu’en 1945. On estiment que six à sept mille de plus furent produits jusqu’en 1952.
Après guerre la Pologne se lança dans la construction de l’appareil sous la désignation de CSS-13. Les derniers U-2 ont été retirés du service en URSS en 1961. Ils avaient reçu la désignation OTAN de Mule.
C’est la Bulgarie et la Tchécoslovaquie qui se séparèrent en dernier de leurs U-2 du service, dans la seconde moitié des années 1970. Belle longévité pour un avion conçu dans les années 1920.
S’il n’a jamais eu la célébrité d’un biplan comme le Tiger-Moth ou le Swordfish, le Polikarpov U-2 peut aisément être considéré comme un des grands avions alliés de la Seconde Guerre mondiale, et certainement le meilleur aéronef de servitude soviétique. Il a été construit en bien plus d’exemplaires que les Storch allemands et Lysander britanniques, ses deux plus proches « cousins ».
Quelques exemplaires de Polikarpov U-2 volent actuellement comme warbirds, notamment en Amérique du nord et en Europe. Il est original qu’un autre avion de reconnaissance a porté une désignation similaire, le légendaire Lockheed U-2 américain.
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