Indissociable du monde de l’aviation d’entraînement grâce à ses monoturbopropulseurs, la firme suisse Pilatus a connu un démarrage pour le moins laborieux. Après avoir tenté de lancer sur le marché deux avions n’ayant pas dépassé le stade de prototype pour le premier et la planche à dessins pour le second, respectivement le SB-2 Pélican de transport léger et le P-1 d’entraînement, le succès est enfin venu, de manière limité mais réel, avec un petit monomoteur d’entraînement et de voltige, le P-2.
En fait, lorsque Pilatus commence à travailler sur cet avion l’Europe se déchire pleinement, c’est alors la Seconde Guerre mondiale. De par sa neutralité officielle, la confédération helvétique ne peut théoriquement pas acheter d’avions militaires aux Allemands, pas plus qu’aux Britanniques ou aux Américains. Du coup, les ingénieurs suisses se sont largement inspirés d’un avion allemand d’entraînement, un Arado Ar 96 avec lequel un pilote instructeur avait décidé de faire défection, et était donc venu poser son appareil en Suisse. Ni le pilote ni la machine n’ont revu l’Allemagne nazie. Une fois démonté, et décortiqué, il a livré pleinement ses secrets aux ingénieurs et designers de Pilatus.
Un premier prototype fut assemblé à la fin de l’année 1944. Désigné P-2 cet avion se présentait sous la forme d’un monomoteur monoplan à aile basse cantilever, de construction mixte en métal et bois. Doté d’un cockpit biplace en tandem et disposant d’une verrière de grande taille, l’avion présentait une ressemblance forte avec l’Ar 96. Il est à noter que certaines pièces de l’avion provenaient d’un Messerschmitt Bf-109 militaire suisse, notamment le train d’atterrissage et une partie du système hydraulique. Sa motorisation faisait appel à un Argus en ligne de 350 chevaux entraînant une hélice bipale en métal. Le premier vol de l’avion intervint le 27 avril 1945.
Rapidement l’avion fut sélectionné par les Troupes d’Aviation Suisses. Cependant, elles demandèrent à l’avionneur d’envisager une propulsion alternative. Deux autres prototypes furent donc construits, l’un pour recevoir un moteur français Hispano-Suiza et le second pour recevoir un Argus légèrement plus puissant que celui du premier vol. C’est finalement ce troisième moteur qui fut choisi par les autorités. Une première commande fut passée pour 26 avions d’entraînement basique non armés. Quelques semaines plus tard une seconde commande fut passée pour autant de machines, mais légèrement armées cette fois-ci.
Ceux-ci avaient en effet la capacité d’emporter une mitrailleuse de calibre 7.7 mm sous chaque aile dans un pod spécialement adapté, ainsi que des bombes légères d’entraînement à concurrence de 150 kilos, ou encore deux roquettes à haute vélocité HVAR, les mêmes que celles emportées durant la guerre par les Hawker Typhoon de la Royal Air Force. Malgré tout cet armement restait uniquement destiné à l’entraînement au tir et nullement pour des missions offensives.
Les premiers exemplaires de série entrèrent en service à la fin de l’année 1946. Les livraisons furent très rapides puisque deux ans plus tard l’intégralité des Pilatus P-2 servaient au sein des Troupes d’Aviation. A l’usage, l’avion démontra de bonnes qualités de voltige aérienne. Si bien qu’il fut rapidement présenté en meeting par les équipes de l’aviation helvète. Néanmoins, il se heurta très vite à la concurrence des avions américains et britanniques, mieux implantés que lui sur le marché et qui raflaient la majorité des marchés. D’autant que les Français étaient eux aussi de retour, ne facilitant là pas non plus les choses pour Pilatus.
Finalement le P-2 demeura le principal avion d’entraînement basique en Suisse jusqu’en 1962, laissant peu à peu la place au Pilatus P-3. Cependant près de la moitié des appareils encore en état de vol furent utilisés pour des missions d’entraînement annexes, notamment pour les réservistes, nombreux dans le pays, jusqu’en 1981.
Jamais exporté, construit au total à 55 exemplaires, les trois prototypes compris, le Pilatus P-2 connut une seconde carrière dans le monde des avions de collection. En effet début 2013, une grosse vingtaine de ces avions étaient encore en état de vol un peu partout dans le monde, principalement aux Etats-Unis et en Europe.
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