Début 1935, l’état-major de la marine américaine fit savoir qu’il recherchait un nouveau bombardier en piqué embarqué destiné au remplacement du biplan Great Lakes BG-1 utilisés depuis deux ans. Même si ces avions donnaient pleine satisfaction, ils s’avérèrent rapidement dépassés, notamment vis-à-vis des avions similaires développés à la même époque en Europe.
Assez étrangement, seulement deux avionneurs proposèrent une réponse au cahier des charges. Ce dernier préconisait que l’avion soit monomoteur et puisse emporter une charge offensive de 454 kg . Ainsi Great Lakes et Northrop apportèrent deux projets très différents l’un de l’autre. Le premier était un biplan à train rentrant et cockpit fermé, tandis que le second était un monoplan lui aussi à train rentrant et cockpit fermé. Un prototype de chaque avion fut commandé en mars 1935, sous les désignations respectives de XB2G et XBT.
En fait, les ingénieurs de Northrop se sont inspirés de leurs travaux de 1932 pour le prototype d’avion d’assaut YA-13 Gamma, un avion refusé en son temps par l’US Army Air Corps mais riche en enseignements concernant la conception des avions d’attaque en piqué. Du coup le nouveau Northrop XBT reprend beaucoup de son architecture. C’est d’ailleurs rapidement que ce prototype est assemblé puisqu’il réalise son premier vol en août 1935, quelques semaines seulement après sa commande officielle.
Du côté de chez Great Lakes les travaux sont plus longs, car bien que biplan le XB2G n’a plus grand chose à voir avec son prédécesseur et les ingénieurs travaillent de manière âpre. Celui-ci ne réalisera son premier vol qu’en 1936. Assez logiquement, c’est le Northrop XBT qui fut sélectionné et commandé en série à soixante exemplaires.
Le premier avion de série entra en service en mars 1938 en tant que Northrop BT. Il est à signaler qu’il ne reçut aucun nom de baptême. Trente exemplaires allèrent à l’escadrille VB-5 tandis que les 30 autres prirent la direction de la VB-6. Elles étaient rattachées respectivement à l’USS Yorktown (CV5) et à l’USS Enterprise (CV6) les deux porte-avions les plus modernes de l’US Navy à cette époque.
Extérieurement, le Northrop BT se présentait sous la forme d’un monoplan à aile basse cantilever . Il était construit en métal et contreplaqué, et disposait d’un train d’atterrissage semi-rétractable. Sa propulsion était assurée par un moteur en étoile Pratt & Whitney R-1535-94 Twin Wasp Junior d’une puissance de 825 chevaux entraînant une hélice bipale en métal. Le pilote et l’officier de bombardement prenaient place dans un cockpit biplace en tandem disposant d’un vaste champs de vision. L’armement défensif se composait d’une mitrailleuse de calibre 12.7mm tirant en position de chasse et d’une seconde de calibre 7.62mm en position arrière sur affût mobile. L’armement offensif se composait de 454 kg de bombes, avec la possibilité d’en emporter une unique de cette masse en point central. Des volets perforés avaient été montés dessus, afin de permettre les opérations en piqué.
Les Northrop BT-1 embarqués à bord de l’USS Yorktown opéraient principalement en Atlantique Nord et autour de l’Europe tandis que ceux servant sur l’USS Enterprise volaient au-dessus du Pacifique et se retrouvaient régulièrement sur la base aéronavale de Pearl Harbor à Hawaï.
Au début de l’été 1938, alors que les livraisons allaient bon train les ingénieurs de Northrop eurent l’idée de développer une version améliorée du BT-1. Pour cela, ils prélevèrent des stocks un avion et le modifièrent en profondeur. Cependant à la même époque la société créée par Jack Northrop fut aspirée par Douglas et le programme du « futur » BT-2 prit la désignation d’un avion de la nouvelle raison sociale. Alors que l’on aurait pu s’attendre à ce que sa désignation devienne Douglas BD, il fut finalement modifié en Douglas SBD, le fameux Dauntless qui allait s’illustrer quelques années plus tard dans la guerre du Pacifique.
Pendant ce temps, les Northrop BT-1 continuaient de voler au sein des VB-5 et VB-6. Quand la Seconde Guerre mondiale éclata en Europe en septembre 1939, l’USS Yorktown se trouvait en Atlantique Nord et ses bombardiers en piqué furent immédiatement mis en alerte. Bien que neutre l’Amérique craignait que ses alliances militaires avec la France et le Royaume-Uni ne tournent à son désavantage vis à vis de la Kriegsmarine et de ses redoutables U-Boots.
En ce même second semestre 1939, le Douglas SBD fut commandé en série pour lui succéder. Dans le Pacifique les Northrop BT-1 du VB-6 continuaient leurs missions à bord de l’USS Enterprise, tandis que d’autres étaient basés à Hawaï, sans rencontrer le moindre ennemi. En fait, aucun des deux porte-avions n’emporta jamais la quantité maximale possible de BT-1 à son bord. Si l’avion était jugé très manœuvrable lors des phases de piqués, il se révélait particulièrement inconfortable à l’appontage. À un tel point même que la majorité des accidents mortels que connut la flotte de BT-1 se produisit lors d’opération sur le pont des porte-avions. Bizarrement le décollage se passait généralement sans encombre. C’est en tirant des enseignements de cela que la crosse d’appontage du SBD Dauntless fut déplacée par rapport à celle du BT-1.
Au moment de l’attaque japonaise contre Pearl Harbor le matin du 7 décembre 1941, un total de seize Northrop BT-1 de la VB-6 étaient en desserrement sur un des terrains d’aviation. Aucun n’eut le temps de prendre les airs pour tenter de s’opposer à l’aéronavale nippone. Neuf furent totalement détruits et les sept autres endommagés. Trois de ces derniers, jugés irréparables furent finalement envoyé à la ferraille quelques jours plus tard. Ces avions sont comptabilisés parmi les plus de 350 appareils détruits ou endommagés ce jour là par les Japonais.
Les premiers Northrop BT-1 à quitter le bord furent ceux de la VB-5 embarqués sur l’USS Enterprise, et ce dès février 1942, au profit du Dauntless bien sûr. De leur côté les avions de la VB-6 durent attendre un peu plus longtemps. Tant et si bien qu’ils prirent à la bataille de Midway en juin 1942. En effet, huit BT-1 servaient encore à bord du porte-avion à ce moment là. Ils furent utilisés pour des bombardements contre les navires de guerre japonais. Ils participèrent notamment à la destruction du croiseur lourd Mikuma : un pilote de BT-1 revendiqua même l’avoir envoyé par le fond avec sa bombe de 454 kg. On sait qu’au moins un autre navire japonais fut lourdement endommagé par l’action des BT-1 de l’US Navy, le pétrolier ravitailleur Akebono Maru. L’ironie du sort veut qu’il ai été coulé deux ans plus tard par des Dauntless.
En juillet 1942, tous les Northrop BT-1 encore en état de vol furent rapatriés en Californie et versés à une unité d’entraînement avancé destinés aux pilotes appelés à voler sur des bombardiers en piqué. Leurs mitrailleuses furent déposées pour l’occasion. Ils y servirent jusque fin 1943, finalement remplacés par des Douglas SBD-2 Dauntless et des Canadian Car & Foundry SBW-3 Helldiver. Ainsi se terminait la carrière opérationnelle du BT-1.
Acteur mineur de la Seconde Guerre mondiale, il n’en demeure pas moins le premier véritable bombardier en piqué embarqué moderne à avoir porté les couleurs de la marine américaine. Le premier mais aussi le dernier. Puisque ceux qui lui ont succédé cumulaient la mission de bombardement en piqué et de reconnaissance armée. Le Northrop BT-1 n’a jamais été exporté.
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