Dans l’immédiat lendemain de la Seconde Guerre Mondiale l’US Navy chercha à conserver sa domination maritime mondiale. En effet ses escadres de sous-marins et ses nombreux navires de guerre avaient donné à l’Amérique une puissance non seulement militaire mais aussi diplomatique sans aucune commune mesure. Mais ce furent surtout les puissants porte-avions, et l’aéronavale qui allait avec, qui impressionnèrent la majorité des nations du monde, et en premier lieu celle qui risquait alors de s’en prendre aux Etats-Unis pour lui contester la suprématie planétaire : l’Union des Républiques Socialistes Soviétiques. L’URSS représentait une menace grandissante pour l’Amérique et celle ci se devait, pour asseoir sa domination maritime, disposer d’une force aérienne embarquée de haut niveau. C’est pourquoi dès le début de l’année 1945 elle chercha à acquérir des chasseurs embarqués à réaction. Après quelques relatifs échecs elle trouva l’avion qui lui convenait : le North American FJ Fury.
C’est en janvier 1945, alors que les forces américaines combattaient encore sur l’ensemble des fronts, que le Department of Navy (DoN, ministère américain de la marine) annonça qu’elle recherchait de nouveaux types de chasseurs embarqués à réaction. La réponse ne se fit pas attendre et trois constructeurs se détachèrent rapidement du nombre qui avait proposé des machines : Mc Donnell, North American, et Vought. Devant l’urgence de la situation l’US Navy décida de commander en série les avions des trois industriels. Ce furent le premier et le troisième de ces avions qui eurent la chance d’entrer en service en premier. L’avion de Mc Donnell devint le FH Phantom tandis que celui de Vought était le F6U Pirate. L’un comme l’autre étaient particulièrement peu efficace, car vraisemblablement conçus beaucoup trop vite. Les ingénieurs de North American prirent un peu plus leur temps.
Le résultat de leurs travaux donna le prototype désigné NA-134 qui se présentait sous la forme d’un monoplan à aile basse droite disposant d’un réacteur General Electric J35-GE-2 d’une puissance de 1735kgp, installé dans le fuselage. Ce réacteur nécessitant un important apport en oxygène obligea North American à équiper l’avion d’une entrée d’air de grande dimension dans le nez. Pour compenser cela l’avion disposait d’un complexe empennage droit. Le pilote prenait place dans un cockpit dont la verrière en forme de goutte d’eau rappelait fortement celle du P-51D Mustang. Au niveau de l’armement le NA-134 montrait bien qu’il était un chasseur pur, se limitant à n’emporter que six mitrailleuses de 12.7mm dans le nez. L’appareil fut commandé par la Navy à trente exemplaires sous la désignation de FJ-1 et désigné Fury. Il réalisa son vol inaugural le 27 novembre 1946.
Rapidement il s’avéra bien supérieur à ses deux concurrents, se payant même le luxe de devenir en juillet 1947 l’avion embarqué le plus rapide au monde avec une vitesse enregistré à Mach 0.87, donc assez proche du mur du son qui n’allait être franchi que quelques semaines plus tard par Chuck Yeager. Malgré ses qualités le FJ-1 ne sembla pas pleinement satisfaire l’US Navy. C’est la raison pour laquelle North Américain travaillait déjà sur une version améliorée, le futur FJ-2.
Entre temps les équipes de North American s’était lancé dans un programme encore plus ambitieux, celui du NA-140, alias XP-86, le prototype du futur F-86 Sabre que l’US Air Force allait envoyer combattre en Corée. Pour construire le NA-140 les ingénieurs américains s’étaient largement inspirés de leur expérience sur le NA-134. Toutefois des modifications majeures furent apportées, notamment en ce qui concernait l’aile, le propulseur, l’empennage, et une partie du fuselage. Toutefois le XP-86 conservait une certaine ressemblance avec celui qui était alors le meilleur chasseur embarqué des Etats-Unis.
C’est en s’inspirant du F-86A que les équipes de North American conçurent le FJ-2. En effet à la différence du FJ-1 la nouvelle version disposait d’une aile en flèche, d’un empennage redessiné, et du même propulseur que le chasseur terrestre. Les six mitrailleuses laissaient la place à deux canons de 20mm. Cinquante exemplaires de cette machine furent commandés par l’US Navy qui les utilisa en priorité pour remplacer les derniers F6U Pirate.En outre l’US Marines Corps, qui recherchait alors un chasseur-bombardier pour remplacer en première ligne ses F4U Corsair s’intéressa de près au FJ-2. Un lot de 150 avions fut commandé sous la désignation FJ-2B. Ils se différenciaient dans leur armement par leur capacité d’emporter des bombes de 227kg sous les ailes.
Les évolutions du Fury continuèrent avec le FJ-3, encore amélioré, conservant l’aile en flèche, et qui fut numériquement la série la plus produite avec 538 exemplaires. Tous les FJ-3 servirent dans l’US Navy. En 1957 un lot de 80 FJ-3 fut modifié en FJ-3M afin de pouvoir emporter et tirer quatre missiles air-air AIM-9B Sidewinder. Le Fury devint le premier chasseur monoplace de l’US Navy à disposer de cette capacité. Une vingtaine d’autres furent modifié de manière à emporter un système de guidage pour drones. Ils furent désignés FJ-3D. La dernière série de Fury produite fut celle des FJ-4 qui se différenciaient encore plus par leurs quatre canons de 20mm, leur équipement permanent pour le tir de missile air-air, et par leur capacité tous temps améliorée. Le FJ-4 fut construit à 154 exemplaires tandis que l’US Marines Corps en acquit 222 supplémentaires en tant que chasseurs-bombardiers FJ-4B avec capacité de tir pour le missile air-sol AGM-12 Bullpup. Avec cette dernière série, les Marines purent vraiment donner la pleine mesure de leurs engagements militaires.
En septembre 1962 quand l’US Navy réaligna ses désignations sur l’US Air Force les FJ-3 encore en service devinrent des F-1C, les FJ-3M des MF-1C, les FJ-3D des DF-1C, les FJ-4 des F-1E et les FJ-4B des AF-1E. En effet malgré le fait que ces avions remontaient à la Seconde Guerre Mondiale les différentes versions du FJ-3 et du FJ-4 étaient encore en service, prouvant ainsi la robustesse du Fury.
Si durant la Guerre de Corée les F-86 Sabre de l’US Air Force s’adjugèrent quelques MiG-15 d’origine soviétique, les Fury n’en firent pas autant. En fait il ne semble même pas que les deux chasseurs se soient rencontrés durant le conflit. Par contre les FJ-2 et FJ-3 engagés en Corée descendirent quelques autres avions soviétiques, majoritairement des appareils à moteur à pistons.
Lorsque la Guerre du Viêtnam éclata seuls les AF-1E de l’US Marines Corps étaient encore embarqués sur les porte-avions américains. A l’instar des EF-10B, la désignation post-1962 des Douglas F3D Skyknight modifiés pour la guerre électronique, les AF-1E furent parmi les rares « premiers » jets embarqués à servir durant ce conflit. Toutefois leur utilisation fut restreinte, non pas par crainte de défaillance mais parce que le Pentagone hésitait alors à confier certaines missions à des avions embarqués. De ce fait les dix huit mois que les AF-1E passèrent dans la région furent finalement très calmes.
Les différentes versions du Fury furent finalement retirées du service en 1966 et remplacés par des Mc Donnell F-3H Demon et surtout par des Vought F-8 Crusader bien plus modernes. Quelques F-1E furent transformés en drones cibles sous la désignation de QF-1E et utilisés par l’US Navy dans le désert de Mojave jusqu’au début des années 80. Ils cédèrent leur place à des QF-86H, les seuls Sabre à avoir servirent dans la Navy. Le North American FJ Fury n’a jamais été exporté. La version d’origine FJ-1 fut le dernier chasseur conçu pour l’US Navy à emporter des mitrailleuses de 12.7mm comme armement principal.
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