L’entrée des États-Unis dans la Seconde Guerre mondiale permit aux Britanniques et à leurs alliés de gagner en puissance industrielle. L’Amérique produisait tout en très grande quantité, y compris des appareils d’un genre totalement nouveau : les drones. Contrairement à une idée reçu ceux-ci ne sont nullement apparus avec le 21e siècle, ils existaient déjà au siècle dernier. Et l’un des plus étonnants apparus à cette époque fut conçu pour mener des missions de torpillage depuis les porte-avions de l’US Navy en patrouille en Atlantique aussi bien que dans le Pacifique : le Naval Aircraft Factory TDN.
Au lendemain de l’attaque japonaise contre Pearl Harbor ayant entraînée les États-Unis dans la Seconde Guerre mondiale de nombreux programmes militaires furent mis en branle. L’un d’entre eux concernait l’acquisition par l’US Navy d’un aéronef radiopiloté destiné à tirer des torpilles depuis les porte-avions. Seuls deux avionneurs y répondirent : Interstate et le Naval Aircraft Factory. Chacun se vit gratifier d’une commande pour quatre prototypes. Le cahier des charges prévoyait que l’engin puisse cependant accueillir un pilote à l’intérieur d’un rudimentaire poste de pilotage. Les prototypes commandés reçurent les désignations d’Interstate XTDR et de Naval Aircraft Factory XTDN.
Les amiraux américains avaient été clairs : ils ne voulaient pas de machines trop complexes. La technologie des drones était alors encore balbutiante malgré l’existence depuis quelques années d’engins cibles radiopilotés. Afin de pouvoir porter et tirer une torpille de 2000 livres, soit environ 910 kilogrammes, le XTDN se devait d’être bimoteur. La recherche de la motorisation idoine fut longue mais finalement le Naval Aircraft Factory jeta son dévolu sur le Lycoming O-435 à six cylindres en ligne. Initialement conçu pour l’aviation civile celui-ci développait 220 chevaux et actionnait une hélice bipale en bois. La construction de ce drone faisait d’ailleurs appel en grande partie au bois et au contreplaqué, considéré comme des matériaux non stratégiques. Le métal et les alliages étaient réservés aux bombardiers, chasseurs, hydravions, et autres avions de transport.
Le premier XTDN réalisa son vol, piloté, le 15 novembre 1942. Il dut attendre le 23 décembre suivant pour enfin décoller en mode radiopiloté.
Ce qui surprenait au premier abord avec lui c’était son importante garde au sol : un mètre cinquante-cinq. Quand il était piloté l’aviateur se tenait à près de trois mètres du sol dans un petit cockpit non fermé. Malgré des essais assez décevant en matière de tir de torpille les quatre XTDN furent produits. C’est l’un d’eux qui en juillet 1943 devint le premier aéronef radiopiloté à apponter sur un porte-avions de l’US Navy. Il s’agissait alors de l’USS Sable, croisant sur le lac Michigan. Quelques semaines après cette grande première le couperet tomba : l’Interstate XTDR lui fut préféré. Pourtant cent exemplaires du XTDN furent commandés comme TDN-1. S’ils n’allaient jamais être appelés à torpiller quoi que ce soit ils allaient cependant beaucoup voler.
Les premiers Naval Aircraft Factory TDN de série entrèrent en service actif en octobre 1943. Leur fonction première était d’apprendre aux radiopilotes de l’US Navy à apponter. Pour cela ils devaient être capables de le piloter mais aussi donc de le radiopiloter. Et très vite les officiers supérieurs à bord de l’USS Sabre se rendirent compte que les quatre à six drones pilotés se trouvant en permanence sur le pont d’envol pouvaient leur rendre bien des services. Moyennant la dépose d’une planche de contreplaqué installée derrière le pilote ils avaient accès à un espace vide dans lequel ils pouvaient transporter jusqu’à dix kilogrammes courrier. Le TDN-1 s’était mué en mini Carrier Onboard Delivery. Par contre l’USS Wolverine n’employa de son coté que très marginalement le TDN-1. Aucun ne fut jamais affecté à son bord.
Les Naval Aircraft Factory TDN-1 furent également utilisés comme cibles volantes radiopilotées, bien plus pour l’entraînement des artilleurs de la DCA embarquée que pour celui des pilotes de chasse. De par leur taille ces drones simulaient bien mieux les avions japonais que les petits Radioplane TDD-2 pourtant nettement plus nombreux. C’est sans doute la raison pour laquelle certains étaient encore employés comme tels une fois la paix revenue à l’été 1945. L’US Navy conserva en effet ses drones TDN jusqu’à l’été 1947, les remplaçant dans le rôle de cibles volantes par des McDonnell KDD et des Naval Aircraft Factory KD2N nettement plus modernes.
Malheureusement aucun Naval Aircraft Factory TDN n’est parvenu jusqu’à nous. L’Amérique n’a donc pas préservé le moindre exemplaire de son premier drone embarqué. Les photographies de ces vieux drones pilotés sont souvent assez amusantes à regarder, à une époque ou les UAV sont désormais omniprésents et qu’aucun d’entre eux n’accueille de pilote dans un cockpit.
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