Durant la Seconde Guerre mondiale l’une des particularités de l’aviation navale impériale japonaise était de disposer à la fois d’aéronefs (logiquement) embarqués mais aussi de modèles terrestres. Et dans cette seconde catégorie on retrouvait aussi bien des chasseurs comme le Mitsubishi J2M Raiden, que des bombardiers moyens tel le Mitsubshi G3M Rikko, ou encore des avions de reconnaissance à l’image du Kyushu Q1W Tokaï. Aucun de ces appareils n’était apte à l’embarquement sur les porte-avions nippons, n’ayant tout simplement pas été pensé pour cela et ne disposant donc d’aucun équipement de navalisation. La marine impérial disposa même d’intercepteurs lourds capables d’évoluer à haute altitude. L’un d’entre eux pourtant ne dépassa jamais le niveau expérimental. Il s’agissait du Nakajima J5N Tenrai.
Au printemps 1943 les services de renseignement japonais apprirent que l’US Army Air Force était en passe de recevoir un nouveau modèle de bombardier lourd, à même de survoler l’archipel. Celui-ci s’annonçait comme bien plus moderne encore que les plus récentes versions du Consolidated B-24 Liberator.
L’information fut prise suffisamment au sérieux par les différents états-majors du pays pour que l’aviation et la marine impériales décident chacun de son côté de commander de nouveaux avions. Kawasaki et Mitsubishi en furent chargés pour la force aérienne nippone et Nakajima pour l’aéronavale.
Le choix de cet avionneur par les amiraux japonais était loin d’être innocent puisqu’il avait déjà fourni l’intercepteur lourd alors en dotation, le remarquable bimoteur J1N Gekko.
Conservant la même architecture générale de monoplan à aile basse cantilever de construction métallique doté de deux moteurs en étoiles le nouvel avion reçut la désignation de J5N et le patronyme de Tenrai, le « tonnère céleste » en français.
Pour autant l’ingénieur en chef Katsuji Nakamura et son bras droit Kazuo Ohno décidèrent que le J5N ne serait pas un J1N amélioré. Pour sa motorisation ils firent appel à un moteur maison : le NK9H Homare 21 à dix cylindres en étoile d’une puissance nominale de 1990 chevaux. Il entraînait une hélice quadripale en métal. On retrouvait alors des Nakajima Homare aussi bien sur l’avion de reconnaissance embarqué Nakajima C6N Saiun que sur le chasseur terrestre Kawanishi N1K-1J Shiden. Pour armer leur avion les deux ingénieurs et leur équipe eurent l’idée d’avoir recours à quatre canons de deux calibres différents placés dans le nez. Deux étaient ainsi de 30 millimètres et les deux autres de 20 millimètres.
La marine impériale avait passé commande pour deux prototypes et quatre exemplaires de présérie. Il était même prévu que les deux derniers soient des biplaces, dans l’optique à la fois d’une version d’entraînement avancée et d’une de chasse nocturne terrestre.
Le premier prototype du Nakajima J5N Tenrai réalisa son vol inaugural le 13 juillet 1944. Et cela ne se passa pas du tout comme prévu.
En effet le bimoteur était instable, particulièrement difficile à piloter et possédait un champ de vision assez réduit. Surtout à cette époque le Japon n’avait plus totalement la maîtrise de son ciel, en raison de la présence des chasseurs de l’US Army Air Force et de l’US Navy à proximité immédiate de ses côtes. Le J5N devait donc ne voler qu’au-dessus des terres et ne surtout pas s’approcher du Pacifique. Un détail certes mais qui a son importance quand on parle d’un futur chasseur naval, même terrestre.
L’armement ne fut installé qu’à partir du premier avion de présérie, désigné J5N1. Pour autant les essais en vol de ces bimoteurs se passaient toujours aussi mal. L’avion n’arrivait même pas à atteindre la vitesse de 600 kilomètres heures alors que son cahier des charges indiquait qu’il devait voler en croisière entre 650 et 675 kilomètres. En outre il était incapable de virer sur l’aile, celle-ci accusant une envergure trop importante.
En outre le système de tir interdisait des rafales simultanées de 20 et 30 millimètres. Le pilote devait choisir un des deux calibres et s’y tenir jusqu’à ce que l’arme n’ait plus d’obus avant de passer à l’autre calibre.
Entre les deux prototypes Nakajima J5N et les quatre exemplaires J5N1 de présérie les accidents furent multiples, heureusement jamais mortels. Le programme fut officiellement stoppé début février 1945, la marine impériale japonaise l’estimant incapable d’évoluer sans une trop profonde reprise. Surtout à l’époque elle pariait désormais sur les Mitusbishi J8M et Nakajima J9N à réaction.
Jamais le Nakjima J5N Tenrai ne reçut de nom de code dans la nomenclature alliée. En effet les services de renseignement américains et britanniques ne découvrirent son existence réelle qu’après la fin des hostilités.
Ironie de l’Histoire les Kawasaki Ki-96 et Mitsubishi Ki-83 conçus comme lui pour abattre le Boeing B-29 Superfortress ne dépassèrent pas plus le stade expérimental alors même que le bombardier américain fut un des instruments de la fin de la guerre du Pacifique.
Aucun J5N Tenrai n’est parvenu jusqu’à nous.
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