L’année 1918 vit apparaître quelques-uns des meilleurs avions d’armes de la Première Guerre mondiale. Suite au retour d’expérience des aviateurs la majorité des avionneurs des deux camps sut développer et produire des aéronefs de très grande qualité. Malheureusement pour certains l’Armistice du 11 Novembre vînt briser leur carrière de plein fouet alors que celle-ci s’annonçait brillante. L’un des exemples les plus fameux fut le Martinsyde F.4 Buzzard britannique.
C’est au printemps 1917 que l’avionneur Martinsyde lança sur fonds propres le développement d’un chasseur monoplace destiné au remplacement du SPAD S.VII. Pour autant aucune demande officielle n’avait été faite en ce sens, le Royal Flying Corps n’enregistrant que d’excellents retours de l’emploi du chasseur français. Pour autant l’industriel poursuivit son œuvre autour de l’avion désigné alors F.3.
L’ingénieur George H. Handasyde fut chargé de mener les recherches tandis qu’un accord de motorisation était signé avec Rolls-Royce autour de son moteur à douze cylindres en V Falcon Mk-III d’une puissance de 275 chevaux. Ce dernier équipait alors le Bristol F.2 Fighter.
Un prototype fut assemblé et vola en octobre 1917. Séduits par la machine les militaires britanniques en commandèrent six exemplaires de présérie dès le mois de novembre.
Pourtant le Martinsyde F.3 enregistra un premier obstacle quand le motoriste Rolls-Royce cassa le marché, ne pouvant pas fournir le nouvel avion et les autres appareils déjà motorisés par le Falcon Mk-III tels l’hydravion américain Curtiss Type H ou la version la plus récente de l’avion britannique de reconnaissance Royal Aircraft Factory R.E.7. Il fallait donc que Martinsyde trouve un nouveau moteur. Et comme nombre d’autres avionneurs à l’époque il se tourna vers le remarquable Hispano-Suiza 8F de facture française. Ce moteur à huit cylindres en V avait la particularité d’animer notamment le SPAD S.VII que le F.3 était censé remplacer. On appelle cela l’ironie du sort.
Ainsi modifié le F.3 devînt F.4. Il fut baptisé Buzzard.
La réception du premier Martinsyde F.4 Buzzard coïncida avec la disparition du Royal Flying Corps au profit de la Royal Air Force. Et clairement au début de l’été 1918 l’avion présentait des qualités de vols alors jugées exceptionnelles. Sous certains aspect il était même supérieur au SPAD S.XIII alors communément considéré comme le meilleur chasseur de la Triple Entente. Un combat simulé réalisé en août 1918 avec un Sopwith F.1 Camel révéla la supériorité du F.4 Buzzard. Une commande pour 1300 exemplaires fut alors signée, à la condition expresse que l’usinage des chasseurs soit réalisé en coopération. Si Martinsyde devait en assembler trois cents il était aussi prévu que Boulton & Paul en construise la majorité à savoir cinq cents exemplaires. Hooper Company et Standard Motors avaient pour tâche d’assembler respectivement deux cents et trois cents Buzzard.
Malheureusement pour la Royal Air Force le motoriste français n’ayant pas encore de chaîne d’assemblage en Grande Bretagne il fallait expédier les Modèle 8Fb par bateau, d’où un retard certain. Finalement les premiers avions ne furent pas livrés avant septembre 1918.
Quand l’Armistice fut signé le 11 Novembre 1918 seuls sept Martinsyde F.4 Buzzard avaient été livré, et aucun n’était opérationnels dans les rangs de la RAF. Ils ne le devinrent qu’en décembre de la même année. Le Buzzard devint donc de facto le premier chasseur de ce que les historiens allaient plus tard appeler l’entre-deux-guerres.
Extérieurement le Martinsyde F.4 Buzzard se présentait sous la forme d’un biplan d’envergure égale construit en bois entoilé et contreplaqué. Fin 1918 il était même l’avion disposant du plus fort pourcentage de contreplaqué dans son architecture. Pour le reste il était animé par un moteur à huit cylindres en V Hispano-Suiza 8Fb actionnant une hélice bipale en bois. Le pilote prenait place dans un cockpit à l’air libre tandis que l’avion possédait un train d’atterrissage classique fixe se terminant par un patin de queue.
L’armement se composait de deux mitrailleuses synchronisées Vickers de calibre 7.7 millimètres.
La fin des hostilités entraîna obligatoirement une vague d’annulations dans les marchés d’armement, l’aviation ne fut pas épargnée. Finalement la Royal Air Force ramena ses besoins en F.4 Buzzard de 1300 à… soixante exemplaires seulement. Tous devaient être assemblés par Martinsyde. Dès lors l’avionneur chercha des débouchés à l’export pour son avion. Et il en trouva.
C’est ainsi que de tels biplans furent vendus à des pays aussi différents que la Bolivie, l’Espagne, la Finlande, l’Irlande, la Lettonie, la Lituanie, le Portugal, et l’URSS. En outre la Belgique, le Canada, le Japon, et la Pologne l’ont essayé mais sans donné de suite à ce chasseur.
Le principal utilisateur fut l’aviation soviétique qui utilisa une centaine de Martinsyde F.4 Buzzard entre 1920 et 1930. Ces avions furent notamment employé lors d’opérations contre ceux que l’on nomme les Russes Blancs, les contre-révolutionnaires restés fidèles au pouvoir tsariste. Peu d’information existent cependant sur l’action des biplans de chasse d’origine britannique. Tout juste sait t-on qu’ils ont été remplacé par les premiers Polikarpov I-3 ainsi que par une partie des Tupolev I-4.
La Finlande de son côté conserva ses quinze F.4 Buzzard de leur entrée en service en 1920 à 1941. Cependant dès 1935 ils furent employés comme chasseurs de reconnaissance. Les avions finlandais pouvaient troquer leurs roues pour des skis afin de permettre de se poser sur la neige ou la glace durant les rigoureux hivers scandinaves.
Quelques exemplaires civils furent également réalisés, notamment en version biplace en tandem sous la désignation F.6.
Quand au début de l’année 1924 la société Martinsyde déposa le bilan l’entreprise Aircraft Disposal Company racheta les droits industriels du Buzzard, en faisant son propre avion sous la désignation ADC.1. Il se singularisait par un nouveau moteur en étoile Armstrong-Siddeley Jaguar de 380 chevaux. Huit exemplaires de série furent vendus en 1926 à la Lettonie qui possédait déjà un F.4 d’origine. Ils volèrent jusqu’en 1938.
Avec un total de 370 exemplaires construits le Martinsyde F.4 Buzzard n’a rien d’un chasseur anecdotique. Pourtant ce chiffre aurait dû être bien plus impressionnant si le retour à la paix n’en avait pas décidé autrement. De nos jours un exemplaire est magnifiquement préservé dans le musée de la force aérienne finlandaise.
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