Pour beaucoup la configuration triréacteur est quasi entièrement réservée aux avions de transport civil. Les machines les plus célèbres avec cette architecture sont les avions de ligne Boeing 727 et Tupolev Tu-154M, ainsi que le jet d’affaire Dassault Falcon 900. Si bien que lorsqu’un avion militaire apparaît avec trois réacteurs, il s’agit bien souvent d’une machine dérivée d’un avion de ligne, comme par exemple le ravitailleur en vol américain KC-10 Extender, dérivé du Mc Donnell Douglas DC-10. Pourtant, quelques triréacteurs militaires originaux existent, mais ont souvent demeurés confidentiels à l’image du prototype de bombardier Martin XB-51.
Tout commença en 1944, lorsque l’US Army Air Force (USAAF) chercha un successeur à ses avions d’attaque au sol Douglas A-26 Invader en service en Europe et en Afrique du Nord. Le cahier des charges prévoyait que le nouvel avion devait être un jet et pouvoir atteindre une vitesse de croisière à moyenne altitude de l’ordre de 800km/h. Mais surtout, il devait être apte à voler à basse altitude et à procéder à des frappes conventionnelles en ressources. Malgré l’intérêt d’un tel contrat, seul le constructeur Martin y répondit et proposa un nouvel modèle dont les esquisses laissaient entrevoir un avion particulièrement original et novateur. L’avion fut désigné Model-234 dans la nomenclature du constructeur.
Lorsque le contrat de développement fut signé en juillet 1945, l’USAAF lui attribua la désignation de XA-45. Toutefois la donne changea radicalement quelques semaines avec la fin de la Seconde Guerre mondiale. Suite à la fin des hostilités, les bombardiers Martin B-26 Marauder furent retirés du service, et remplacés par les Invader. Ainsi le XA-45 devait prendre la suite d’un avion « nouveau » dans l’arsenal américain. De ce fait, la désignation du nouveau jet de Martin changea également. Pourtant si l’A-26 devint le B-26, il en fut tout autrement pour le XA-45 qui ne put garder son numéro, du fait de l’existence à cette époque du North American B-45 Tornado alors en cours de développement. Le XA-45 devint donc le XB-51. Du fait du changement de politique entre un avion d’attaque au sol et un bombardier, les équipes de Martin découvrirent la concurrence du Douglas XB-43.
Extérieurement, le XB-51 se présentait sous la forme d’un monoplan à aile basse en flèche à incidence variable. Il possédait un train d’atterrissage monotrace escamotable, un peu à la manière du bombardier soviétique Yakovlev Yak-28 Brewer, et deux petites balancines de bouts d’ailes. La propulsion était assurée par trois réacteurs General Electric J47 d’une poussée unitaire de 2355kg. Ceux ci étaient montés sous le fuselage au niveau du bord d’attaque de voilure pour deux d’entre eux et à la base de l’empennage en T, sous son arête pour le troisième. Niveau armement, il disposait d’une soute pivotante pouvant même être larguée en vol, capable de recevoir un peu plus de quatre tonnes et demi de bombes. Huit canons de calibre 20mm devaient également être installés pour assurer l’autodéfense du bombardier. Le premier vol du XB-51 eut lieu le 28 octobre 1949.
Lors des essais en vol, l’avion se révéla largement supérieur à son homologue de Douglas, si bien que celui-ci fut rapidement éliminé. L’US Air Force commanda même un second prototype du XB-51, qui vola assez rapidement en avril 1950. Pourtant la Guerre de Corée venait de donner un second souffle au Douglas B-26 Invader. C’est la raison pour laquelle, un nouveau cahier des charges fut lancé en septembre de cette même année pour Martin et son triréacteur mais également pour les autres constructeurs, y compris étrangers.
Si le Martin XB-51 était alors un des avions les plus prometteurs en cours de développement aux Etats-Unis, il faut souligner que le constructeur était engagé dans beaucoup d’autres marchés, et notamment pour le compte de la toute jeune NASA avec les fusées RTV-N-12 Viking.
Assez rapidement le XB-51 fut surpassé par un avion britannique, l’English Electric Canberra. Pourtant les deux triréacteurs ne furent pas pour autant envoyés à la ferraille ou dans un stock quelconque. En effet, l’US Air Force les conserva jusqu’en mai 1952, époque à laquelle le second prototype s’écrasa à l’atterrissage tuant ses deux membres d’équipages. En fait, jusqu’à cette date les deux avions servirent au développement d’armes diverses. Il faut souligner que les huit canons prévus initialement ne furent jamais montés.
En guise de consolation, Martin fut sélectionné pour assembler sous licence le Canberra, désigné B-57 dans la nomenclature de l’aviation américaine.
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