L’un des atouts aujourd’hui de l’US Air Force est sa capacité à mobiliser dans les délais les plus brefs une capacité de projection allant de l’avion de transport tactique à celui de transport stratégique. Il n’en a pourtant pas toujours été ainsi, il s’agit en fait d’un héritage de la Seconde Guerre mondiale et des combats menés aussi bien en Europe occidentale que dans le Pacifique. Avant cela le transport aérien militaire américain était plutôt chaotique, se résumant souvent à des avions de ligne acquis en petit nombre et utilisés sans réelle doctrine d’emploi. Le premier d’entre eux fut même un bimoteur qui n’intéressa pas les compagnies aériennes naissantes : le Martin T-1.
Dans l’immédiateté de la fin de la Première Guerre mondiale les avionneurs se lancèrent tous azimuts dans le développement d’avions militaires et civils. L’aviation commerciale était alors naissante, y compris aux États-Unis et tout était à inventer. L’hydravion Benoist XIV de la première liaison américaine, le 1er janvier 1914, était déjà totalement obsolète quant au début de l’année 1919 l’ingénieur Glenn L. Martin lança l’étude de son ambitieux Model 12.
Dérivé directement du bombardier MB-1 le Model 12 fut rapidement renommé GMP pour Glenn Martin Passenger.
Extérieurement l’avion ne pouvait nier sa filiation avec le fameux bombardier bimoteur dont il conservait les grandes lignes. Il fut même construit à partir de l’un d’entre eux, prélevé sur la chaîne d’assemblage.
Conçu pour accueillir douze passagers dans un confort assez sommaire le Martin GMP fut le premier bimoteur américain à disposer d’un poste de pilotage biplace côte à côte. Il ne s’agissait pas là d’une mesure de sécurité mais d’une réponse à la triskaïdékaphobie, alors très répandue aux États-Unis. Cette superstition donne des pouvoirs supposés maléfiques au chiffre 13. Or douze passagers et un pilote auraient eu pour résultat que treize personnes se retrouvent à bord de l’avion. En y ajoutant un copilote Glenn L. Martin conjurait le sort.
Le prototype du GMP réalisa son premier vol en mars 1919.
Malheureusement pour la société Martin l’avion se heurta rapidement à la féroce concurrence d’avions plus petits et moins onéreux. Les Airco D.H.4 et D.H.9 d’origine britannique avaient été démilitarisés et transformés pour accueillir entre trois et quatre passagers. Rapidement il se retrouva aussi face au très élégant Curtiss Model 19 Eagle lui aussi taillé pour accueillir moins de passagers, entre six et huit selon les distances à franchir.
Le coup de grâce vint en juillet 1919 lorsque l’homme d’affaire John M. Larsen fit voler son JL-6, un Junkers F-13 allemand construit sous licence américaine. L’époque était décidément aux avions commerciaux entre trois et huit passagers, jamais plus. Le GMP était donc trop gros pour le marché américain. Il en était de même en Europe.
Il fut ensuite proposé aux militaires comme GMT, pour Glenn Martin Transport.
De ce fait l’US Army Air Service en fit l’acquisition en septembre 1919. Basé à McCook Field dans l’Ohio le Martin GMT y reçut la désignation de T-1, signifiant qu’il s’agissait là du premier avion de transport militaire aux États-Unis. Sa première mission fut le transport des officiers de l’état-major américain lors des tournées d’inspection des différents casernements mais aussi pour la supervision des manœuvres aériennes et terrestres.
Dès l’été 1920 des essais de transport sanitaire, avec quatre blessés sur civières et deux soignants en accompagnement furent entrepris. Malheureusement les soubresauts lors des phases de décollages et d’atterrissages rendirent ces missions impossibles à réaliser. Des tests furent également entrepris pour l’acheminement de fret léger avec cette fois un peu plus de succès. Pour autant aucun GMT supplémentaire ne fut commandé par les militaires.
En parallèle, et fort de la dernière expérimentation, Glenn L. Martin lança le développement de la version dérivée désignée MP. Destinée initialement au transport de passagers sur des liaisons courtes elle fut finalement adoptée par l’US Mail, la poste américaine, pour du transport aérien de courrier. Six exemplaires furent achetés et employés de 1920 à 1924.
De son côté l’unique Martin T-1 vola jusqu’au 5 mars 1923, date à laquelle il s’écrasa à l’atterrissage suite à une collision aviaire. Une volée de corbeaux heurta son moteur droit causant la destruction de l’aile et du train d’atterrissage. Trois des dix personnes à bord de l’avion furent tués sur le coup. La carrière du premier avion américain de transport militaire venait de tragiquement se terminer.
Avion aujourd’hui passablement retombé dans l’oubli le Martin T-1 fut une des rares incursions de ce constructeur dans le domaine des avions de transport militaire. Le Martin RM-1, utilisé par l’US Coast Guard après la Seconde Guerre mondiale, fut lui une réussite plus franche dans ce domaine.
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