Au moment de son entrée dans la Première Guerre mondiale l’Amérique se rendit compte du retard conséquent qu’elle avait pris sur les pays européens en matière de construction aéronautique. Les frères Wright avaient véritablement créé l’aviation mais des pays comme l’Allemagne, la France, ou la Grande Bretagne avaient une capacité de production bien au-delà des espérances américaines. Il fallait y remédier. C’est pourquoi alors que ses soldats se battaient sur le front européen l’Oncle Sam décida de se lancer dans de vastes programmes aéronautiques plus ou moins ambitieux. L’un des plus réussis déboucha sur le premier véritable bombardier moderne conçu aux États-Unis : le Martin MB-1.
Quand au milieu des années 1910 Glenn L. Martin monta sa société de construction d’aéroplane l’autodidacte qu’il était connaissait ses limites. C’est pourquoi il s’entoura très rapidement de plusieurs jeunes ingénieurs dont certains allaient laisser leur nom dans l’histoire aéronautique : Donald Douglas et Lawrence Bell d’abord puis quelques années plus tard James McDonnell. Tous trois allaient ensuite chacun de leur côté fonder leurs propres entreprises qui furent florissantes.
C’est ainsi qu’en novembre 1917 l’US Department of War demanda aux quelques avionneurs américains de concevoir un bombardier lourd bimoteur capable de supplanter les meilleurs avions britanniques et français de l’époque. La société Martin releva le défi et chargea Donald Douglas et Lawrence Bell de développer un avant-projet.
Connu alors comme GMB (pour Glenn Martin Bomber) l’avion fut rapidement présenté sous la forme de maquettes et de plans d’artistes à l’état major de l’US Army. En février 1918 un prototype fut commandé.
Extérieurement le GMB était un avion assez académique quoique très moderne. Biplan haubané bimoteur doté d’un train d’atterrissage classique fixe et d’un empennage double dérive il était assemblé entièrement en bois et toile. Il était animé par deux moteurs à douze cylindres en V Liberty 12A d’une puissance nominale de 400 chevaux entraînant chacun une hélice bipale en bois. Le bombardier était servi par un équipage de trois membres prenant place à l’air libre : pilote, officier de bombardement, et mitrailleur embarqué.
L’armement se composait de cinq mitrailleuses Lewis de calibre 7.7mm. Deux étaient jumelées dans le poste de tir avant, deux dans le poste de tir dorsale, et une cinquième tirait depuis une trappe installée dans le fond de l’avion. Ces deux derniers postes de tir devaient être assurés par l’officier de bombardement. La charge de bombes de l’avion était alors limité à 200 kilogrammes.
Malgré une charge offensive bien inférieur à ce qui existait en France ou en Grande Bretagne il fut décidé en juillet 1918 de commander dix exemplaires de l’avion sous la désignation de Martin MB-1. MB-1 signifiant alors Martin Bomber numéro 1.
Le prototype réalisa son premier vol quelques jours seulement après la signature du contrat, au 17 août 1918. Avant que les avions n’entrent en service quelques améliorations furent apportées. Désormais l’équipage serait de quatre membres, l’officier de bombardement prenant place auprès du pilote et un second mitrailleur s’occupant des armes dorsales et ventrales.
En outre la charge de bombe fut revue à la hausse à 480 kilogrammes, faisant ainsi diminuer le rayon d’action.
Alors que les premiers avions de série n’entrèrent en service qu’en février 1919, donc après l’Armistice, le constructeur poursuivit le développement de son bombardier. Il développa ainsi un GMB-M (pour Glenn Martin Bomber-Miscelleanous) destiné aux missions de bombardement de nuit. Outre un équipage ramené à trois membres, la disparition de la mitrailleuse ventrale, et l’ajout d’une volumineuse radio le nouvel avion emportait des fusées éclairantes, un projecteur ainsi que deux feux de navigations. En mars 1919 l’US Army passa commande pour trois avions de ce genre en les désignant eux aussi MB-1. Ils furent livrés entre septembre et novembre 1919.
Fin 1919 les treize Martin MB-1 étaient les principaux bombardiers bimoteurs en service dans l’US Army Air Service. L’avionneur demanda alors aux militaires de lui rétrocéder un des GMB-M qui fut transformé en trimoteur afin de tester plusieurs aspects du vol longue durée. En fait il s’agissait de répondre aux interrogations posées par l’échec du Martin TA, un avion civil dérivé du GMB et conçu pour des vols records. Le GMB-M trimoteur vola ainsi quelques mois avant d’être retransformé en bimoteur et restitué à son propriétaire.
À la demande l’US Army l’avionneur développa le GMB-C, pour Glenn Martin Bomber-Cannon. Pourvu d’une charge de bombes ramenée à 150 kilogrammes l’avion devait emporter un armement défensif très impressionnant : un canon de calibre 37mm en position dorsal et un second de calibre 76mm sans recul dans le poste de tir avant. Les militaires américains voulaient ainsi étudier un concept apparu alors en Grande Bretagne. D’un côté comme de l’autre de l’Atlantique nord celui-ci demeura sans suite et après l’assemblage d’un prototype ainsi qu’une vingtaine d’heures de vols le GMB-C fut stoppé net. L’avion fut désarmé et versé à l’US Army Air Service comme machine d’entraînement avancé.
L’histoire prétend que lorsque le canon de 76mm tirait l’avion perdait 30% de sa vitesse, le rendant très instable, toujours à la limite du décrochage.
Les Martin MB-1 restèrent en service dans l’US Army Air Service jusqu’en mars 1929, sans jamais être engagés en opérations. Pour autant deux d’entre eux assurèrent des missions de sécurisation des intérêts américains autour du canal de Panama entre l’été 1924 et la fin 1925.
S’il ne fut jamais exporté le Martin GMB n’intéressa pas que l’US Army Air Service. L’US Navy acheta une version de bombardement et de torpillage pour ses bases aéronavales. Dix avions furent commandés en septembre 1919. Huit d’entre eux étaient des Martin MT-1, pour Martin Torpedo numéro 1, et deux des MBT-1, pour Martin Bomber Torpedo numéro 1. Sur ces derniers la charge de bombe était remplacée par une énorme torpille Mk-IX de 750 kilogrammes. En raison seuls les deux mitrailleuses dorsales étaient conservées. Les MBT-1 furent de leur côté globalement des MB-1 repeints aux couleurs de la jeune aéronavale américaine.
L’US Navy utilisa ces dix avions entre septembre 1920 et septembre 1921 avant de les céder à l’US Marines Corps qui les fit voler jusqu’en juin 1928. Il est cependant à signaler que les deux uniques MT-1 furent perdus en exercices, le premier en mai 1922 et le second en février 1923. Malgré leur courte carrière ils permirent à l’aéronavale des États-Unis de défricher le domaine de vol des bombardiers torpilleurs bimoteurs.
Avions méconnus aujourd’hui les Martin MB-1 et leurs versions aéronavales furent pourtant parmi les premiers véritables bombardiers modernes américains. Le positionnement de leurs mitrailleuses en postes de tir dorsal, avant, et ventral préfigure ce qui allait exister une vingtaine d’années plus tard avec des machines légendaires comme le Boeing B-17 Flying Fortress ou le Consolidated B-24 Liberator.
En 2021 il ne reste plus aucun MB-1 préservé dans le monde.
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