On associe volontiers le nom Martin-Baker au siège à éjection, mais peu connaissent les avions particulièrement innovants développés par cette entreprise. Fondée en 1934 à Denham en Angleterre, Martin-Baker Aircraft est née d’un partenariat entre l’ingénieur irlandais James Martin et le pilote Valentine Henry Baker. Le premier avion développé par Martin-Baker fut un avion civil monoplan à aile basse, désigné MB1, qui prit l’air pour la première fois en 1935. Le MB1 incorporait diverses caractéristiques inhabituelles pour l’époque, dont un moteur monté à l’arrière du pilote et du passager. Malgré ses bonnes performances en vol, le MB1 ne connût pas de suites commerciales.
Répondant à la spécification F.5/34 du gouvernement britannique à la recherche d’un avion de chasse doté d’un moteur refroidi à l’air et pouvant opérer sous les tropiques, Martin-Baker proposa le MB2 motorisé avec un Napier Dagger III. Bien qu’affichant des performances respectables, le MB2 ne fut pas retenu suite aux essais de l’appareil effectués en 1938 par la Royal Air Force (RAF). Non découragé, James Martin poursuivit ses travaux de conception avec le MB3, en réponse à la spécification F.18/39 visant à trouver un successeur potentiel aux Hurricane et Spitfire de la RAF. Doté d’un moteur Napier Sabre de 24 cylindres ainsi que de six canons de 20 mm, le MB3 était l’avion de chasse le plus lourdement armé de son époque. En septembre 1942, soit deux semaines après le vol initial du MB3, le capitaine Baker perd la vie aux commandes de ce prototype fort prometteur, suite à une panne de moteur lors du décollage. La perte de son ami et associé, marqua le début d’une obsession chez James Martin, soit le développement du siège à éjection.
Désigné MB4, le prochain prototype était destiné à recevoir un moteur Rolls-Royce Griffon plus léger et fiable que le Napier Sabre. Perfectionniste à l’extrême, James Martin souhaita toutefois apporter une série d’améliorations aux plans de l’avion, ce qui fit en sorte que le MB4 ne quitta jamais la planche à dessin. C’est plutôt un appareil encore plus évolué, le MB5, qui vola pour une première fois le 23 mai 1944. Les premiers vols d’essais du MB5 démontrèrent la nécessité de corriger certains problèmes de dérive. Après ces ajustements, le MB5 était sans contredit le chasseur à hélices le plus évolué de son temps et s’attira rapidement nombre d’admirateurs. Le moteur Rolls-Royce Griffon 83 entraînait deux hélices contrarotatives, éliminant ainsi l’effet de couple et permettant au MB5 d’atteindre des vitesses inégalées pour un avion à hélices. Moins lourdement armé que le MB3, le MB5 était tout de même doté de 4 canons de Hispano Mk.II de 20mm emportant chacun 200 obus. James Martin fit preuve d’un souci particulier lors de la conception de l’appareil afin d’en faciliter l’entretien grâce à des panneaux détachables en quelques minutes et donnant accès aux diverses composantes conçues de façon modulaire pour être rapidement remplacées en cas de besoin. Le MB5 plaisait non seulement aux équipes d’entretien mais aussi aux pilotes car l’ergonomie de la cabine de pilotage était remarquable. Ceux qui ont eu le privilège de piloter le MB5 n’avaient que des commentaires élogieux pour ce chasseur fort manœuvrable, puissant et racé.
L’avènement de l’avion à réaction allait toutefois sceller le sort du MB5 de deux façons plutôt qu’une. Deux mois après le vol initial du MB5, la RAF prenait livraison de ses premiers Gloster Meteor. La course aux «jets» de combat était ainsi lancée, alors que les alliés disposaient déjà d’excellents chasseurs à hélices sortant en grande quantité des chaînes de montage tel le P-51Mustang, le Typhoon et même le Spitfire dans ses versions plus évoluées.
En 1945, le MB5 fit une démonstration mémorable lors du Farnborough Air Display aux mains du célèbre pilote acrobatique Jan Zurakowski qui affirma que c’était le meilleur appareil qu’il avait piloté. Le sort des avions de chasse à hélices était toutefois déjà scellé. N’eût été du perfectionnisme de James Martin qui n’avait de cesse de parfaire ses prototypes et de sa dévotion au développement du siège à éjection, le MB5 aurait pu joindre les rangs de la RAF avant la fin du second conflit mondial et sans doute devenir un avion légendaire. Le seul MB5 jamais fabriqué sombra plutôt dans l’oubli et connût une fin peu glorieuse comme cible dans un champ de tir.
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