Lorsque l’on aborde le cas des hélicoptères développés en Europe occidentale on pense généralement à la France ou à l’Italie, et ensuite sans doute à la Grande Bretagne. Ces trois pays ont en effet profondément marqué leur époque dans ce domaine au travers de constructeurs comme Aérospatiale, Agusta, et Westland. Pourtant d’autres s’y essayèrent souvent avec succès à l’image de M.B.B. en Allemagne qui produisit quelques machines de qualité. À la fin des années 1980 le constructeur se lança dans le développement d’un appareil profondément moderne mais malheureusement demeuré sans suite, ou tout du moins dans sa forme originale : le M.B.B. Bö 108.
En juin 1985 l’hélicoptériste Messerschmitt-Bölkow-Blohm présentait au salon du Bourget le prototype de son biturbine léger BK 117 A3M destiné au marché militaire. Pourtant sur le stand du constructeur ouest-allemand existait aussi une série de vues d’artistes autour d’un nouvel appareil alors désigné Bö 108. Le projet avait été lancé quelques semaines plus tôt dans l’espoir de surfer sur le succès de ce BK 117 germano-japonais. Sauf que désormais M.B.B. le développait seul, sans l’apport de Kawasaki.
Les grandes lignes de M.B.B. Bö 108 semblaient reprendre celles du BK 117 mais adoptant un aérodynamisme accru. L’intention de Messerchmitt-Bölkow-Blohm était clair : trouver un successeur à l’Alouette III française. Il faut dire qu’il s’agissait là de l’hélicoptère léger le plus construit encore à l’époque en Europe occidentale. Pourtant les finances de M.B.B. n’étaient alors plus vraiment au beau fixe.
Les ingénieurs en charge du programme Bö 108 eurent comme premier défi à relever de trouver une motorisation adapté à leur futur hélicoptère. Il avait été choisi que l’appareil serait biturbine. Leur choix se porta sur la turbine américaine Allison 250-C20R-3.
C’est autour de ces deux turbines que le prototype fut assemblé à partir du printemps 1988. Extérieurement la filiation entre ce M.B.B. Bö 108 et le BK 117 était saisissante mais l’appareil disposait aussi de sa propre identité. Avec son rotor principal quadripale, son atterrisseur à patins, et son nez largement vitré il n’était pas sans rappeler le Bö 105 du même constructeur. La cabine fut pensée pour six places : cinq passagers et un pilote dans un confort plutôt haut de gamme. Le Bö 108 était principalement construit en métal mais faisait aussi appel à 20% de matériaux composites.
C’est dans cette configuration que le premier vol eut lieu le 15 octobre 1988 sous l’immatriculation civile allemande D-HBOX.
Les premiers essais en vol démontrèrent des qualités intrinsèques intéressantes. Mais surtout le M.B.B. Bö 108 commençait à intéresser de futurs clients civils. Pour autant beaucoup lui reprochaient un prix annoncé trop élevé par rapport à son véritable concurrent du moment : l’Aérospatiale AS.355 Écureuil 2. Les difficultés financières de M.B.B. obligèrent le gouvernement fédéral ouest-allemand à injecter douze millions de marks dans le programme. Un soutien qui n’était pas gratuit puisque Berlin obligea le constructeur à proposer une version développée autour de turbines européennes.
Après avoir scruter les possibilités, notamment chez Rolls-Royce en Grande Bretagne et Turboméca en France, les ingénieurs allemands jetèrent leur dévolu sur ce second motoriste. Ils développèrent un second prototype doté de deux turbines françaises Arrius TM-319-1B d’une puissance unitaire de 480 chevaux.
L’appareil fut assemblé début 1991 et réalisa son premier le 5 juin de la même année sous l’immatriculation civile D-HBEC. Pourtant c’est bien le premier prototype que Messerschmitt-Bölkow-Blohm présenta quelques jours plus tard à la grand-messe du Bourget.
Beaucoup de professionnels et de passionnés remarquèrent alors qu’en plus des marquages MBB l’hélicoptère portaient ceux inconnus alors d’Eurocopter.
En fait depuis plusieurs mois déjà Paris et Berlin avaient négocié la fusion des branches voilures tournantes d’Aérospatiale et de Messerschmitt-Bölkow-Blohm au sein d’une nouvelle entité franco-allemande. Celle-ci prit le nom d’Eurocopter et fut finalisée en décembre 1991. Quelques semaines plus tard en janvier 1992 naissait Eurocopter !
Or le Bö 108 était dans la corbeille de mariage. Pourtant l’hélicoptère ne plaisait pas dans l’état aux décideurs français qui choisirent le reprendre en profondeur. Non pas qu’ils craignaient que l’hélicoptère fasse de l’ombre à l’Écureuil 2 mais dans son état actuel ils ne le trouvaient pas réellement innovant. Finalement le Bö 108 fut abandonné à l’été 1993. Ainsi disparaissait le dernier hélicoptère allemand.
Et naissait surtout le premier hélicoptère européen. Car les dirigeants et ingénieurs allemands et français donnèrent une seconde vie au M.B.B. Bö 108 en lui greffant un rotor anti-couple caréné type Fenestron. Quelques améliorations aérodynamiques furent apportées à celui qui devint après son premier vol en février 1994 l’Eurocopter EC135. En 2020 cette machine est toujours produite sous la désignation Airbus Helicopters H135 et est un véritable best-seller européen.
Aujourd’hui le M.B.B. Bö 108 est passablement retombé dans l’oubli. Pour autant le second prototype est exposé au Hubschraubermuseum de Bückeburg, le principal musée allemand sur le thème des hélicoptères.
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