Dans le monde aéronavale la torpille a toujours été considérée comme la meilleure arme pour lutter contre les sous-marins ennemis. Qu’elles soient lancées par avion ou par hélicoptère elles demeurent très en vogue auprès de l’ensemble des forces navales dans le monde. Toutefois d’autres pistes furent étudiées dans le passé pour lancer ces armes, parmi lesquels un engin à mi-chemin entre le missile de croisière et le drone, le Latécoère Malafon.
Les origines de ce programme remontent au milieu des années 1950 lorsque l’avionneur Latécoère et l’état major de la Marine Nationale décidèrent de doter les navires de guerre français d’un système permettant de tirer des torpilles sur des submersibles éloignés de ceux ci, c’est à dire au delà du rayon d’action de ces armes. En effet à cette l’hélicoptère de lutte anti sous marine n’en était qu’à ses balbutiements, et peu de bâtiments de guerre étaient aptes à les recevoir. Cependant à cette époque la détection des sous-marins ennemis avait progressé, avec notamment la mise au point des sonars flottants et de ceux tractés par les navires eux mêmes.
C’est ainsi que les travaux de Latécoère débouchèrent sur le développement d’un engin volant, propulsé à la fois par un lanceur à vapeur, similaire aux catapultes des porte-avions, installé directement sur les navires de la Marine, et par un accélérateur à poudre, fonctionnant durant quatre secondes et envoyant l’engin à environ un kilomètre du lanceur. Pour le reste du trajet le drone finissait son vol en planant.
Désigné Malafon il était composé d’un tube en métal dans lequel on installait une torpille type L4 dont la pointe avant dépassait, et d’une voilure basse dotée de deux fusées éclairantes de bout d’ailes. Un empennage double dérive octroyait à l’appareil une certaine stabilité en vol. Pour son guidage le Malafon possédait un calculateur couplé à un système de transmission radio.
C’est dans cette configuration que le drone réalisa son vol inaugural au cours de l’année 1958. Les essais se déroulèrent sur huit années, principalement pour des raisons de mise au point du système de guidage. En effet son système d’arme très simple tournait autour d’une torpille existant déjà. En effet la torpille L4, d’une longueur de 3.13 mètres et d’un calibre de 533mm avait un rayon d’action, après immersion, de cinq kilomètres, pouvant même descendre jusqu’à 300 mètres de profondeur. Sa masse de 540kg autorisait son emploi à partir de la plus part des aéronefs en service en France. Sa masse représentait environ 40% de celle du Malafon lors de son décollage.
Finalement cet engin volant fut officiellement accepté au service dans la Marine Nationale à partir de 1966. À cette époque le Malafon était un des système de lutte anti sous marine parmi les plus précis au monde. Cependant sa taille et sa masse nécessitaient qu’il soit employé à partir de bâtiments de guerre de taille respectable. C’est ainsi qu’au cours de sa carrière il fut monté à bord de navires assez différents. En reçurent donc les escorteurs d’escadre des classes D’Éstrées et La Galissonnière, ainsi que les frégates des classes Suffren et Tourville. Sur ces navires dénués de plateforme pour hélicoptère les Malafon permettaient de combattre efficacement les submersibles ennemis, et en priorité ceux du Pacte de Varsovie.
Après le tir du Malafon, sa torpille était expulsée du corps de l’engin et pénétrait dans l’eau avant d’engager le combat avec sa cible. Par la suite l’engin planant terminait sa course avec un parachute. Il pouvait être récupéré en mer par son navire lanceur, ou par un hélicoptère embarqué comme l’Aérospatiale SA-321 Super Frelon ou le Sikorsky HSS-1, deux machines en service dans l’Aéronautique Navale à l’époque où le Malafon servait en France.
Les années 1980 virent une nette diminution dans l’usage du Malafon par les unités de la Marine Nationale, à cause notamment de la mise en service par cette dernière de l’hélicoptère britannique Westland Lynx. Finalement le Malafon fut retiré du service en 1997, devenu totalement obsolète, notamment du fait de l’apparition des torpilles de nouvelles générations. Appareil typiquement français le Latécoère Malafon fut certainement un des engins sans pilote parmi les plus surprenants de l’histoire aéronautique. D’une conception particulière cette machine ne connut pas de succès à l’export. Aujourd’hui un de ces engins est visible au Musée de la Marine à Paris.
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