La Première Guerre mondiale vit la naissance de la quasi totalité des concepts aéronautiques contemporains, à l’exception cependant des drones et hélicoptères apparus réellement durant le conflit mondial suivant. Souvent éclipsé par celui du bombardement léger, très proche, le concept d’attaque au sol et d’appui aérien rapproché ne comportait alors pas vraiment de bombes mais plutôt des mitrailleuses permettant le tir en rafales en direction des troupes ennemis. C’est pourquoi les avions destinés à ce rôle remplissaient également généralement des missions de chasse lourde voire de chasse nocturne. Ce fut notamment le cas au sein des forces allemandes du redoutable Junkers J.I.
Quand en janvier 1917 l’Idflieg lança le principe dit «J» d’avions d’attaque au sol et de chasse lourde trois avionneurs allemands y virent l’occasion de montrer leur savoir-faire. Ce fut le cas d’AEG et d’Albatros qui avaient alors pignons sur rue mais également d’un constructeur beaucoup plus confidentiel : Junkers. Sa production était jusque là anecdotique et s’élevait à moins de dix avions. Ses modèles J 1 et J 3 n’avaient pas dépassés le stade de prototype et son chasseur J 2 n’avait été produit qu’à six exemplaires.
Aussi les autorités allemands décidèrent de commander sans trop y regarder les AEG J.I et Albatros J.I directement en série et acceptèrent que Hugo Junkers et son ingénieur associé Otto Mader avancent leur propre avion. Celui-ci était alors connu sous la désignation constructeur de Junkers J 4.
Par rapport à ses «concurrents» cet avion était très ambitieux. Autour d’un puissant moteur Benz Bz IV à six cylindres en ligne d’une puissance de 200 chevaux les deux ingénieurs avaient conçu un sesquiplan haubané dont le fuselage et la voilure étaient assemblés en métal. Comme depuis le début de ses travaux en aviation Hugo Junkers ne croyait pas dans l’assemblage en bois et toile et ne pariait que sur l’acier et la tôle ondulée.
Le premier composait l’intégralité du fuselage en forme de baignoire tandis que la seconde était à la base de la voilure et des haubans. La tôle des ailes permettaient d’alléger l’avion vis-à-vis de l’acier. Niveau armement le Junkers J 4 emportait deux mitrailleuses synchronisées LMG 08/15 et une MG 14 montée sur affût mobile arrière, toutes trois d’un calibre de 7.92 millimètres. La MG 14 avait été installée de manière à pouvoir tirer en rafale vers le bas, contre les troupes britanniques et françaises.
Le premier prototype vola fin février 1917 et le prototype finale, celui en configuration de combat en juin de la même année. Une première commande fut passée pour cent quatre-vingt-dix exemplaires sous la désignation de Junkers J.I.
Les premiers exemplaires entrèrent en service au sein de l’aviation impériale allemande en août 1917. Et dès le départ l’avion impressionna malgré une prise en main parfois un peu délicate du fait de sa masse élevée. Et dès le mois de novembre de la même année la commande de la Luftstreitkräfte fut portée à deux cent vingt-deux exemplaires du Junkers J.I. L’avion était très efficace notamment contre les mitrailleuses de la chasse de la Triple Entente mais également ceux de la DCA. Du fait de sa structure métallique et des cinq millimètres et demi d’épaisseur de ses blindages le J.I encaissait bien les tirs.
Malgré une revendication française durant l’offensive de printemps en mai 1918 aucun Junkers J.I ne fut réellement perdu du fait de l’ennemi. L’avion tombé entre les lignes de l’armée française le fut plus vraisemblablement suite à une panne que du fait des tirs nourris venus du sol.
Quand la Première Guerre mondiale prit fin le 11 novembre 1918 tous les Junkers J.I n’avaient pas encore été produits. Les derniers quittèrent les chaînes d’assemblage en janvier suivant avant d’être rapidement envoyés à la ferraille. Britanniques et Français essayèrent ce curieux sesquiplan plus lourd que la moyenne mais aussi redoutablement bien protégé. Les pilotes de la Royal Air Force le surnommèrent «Flying tank» tant le blindage était omniprésent chez lui.
De nos jours seul le Musée de l’Aviation et de l’Espace du Canada sis à Ottawa préserve et expose un Junkers J.I. C’est donc une de ses pièces maîtresses. Tout premier avion métallique construit en grande série ce sesquiplan tient de ce fait une place à part dans l’histoire de l’aviation, comme le Junkers F-13 quelques temps plus tard pour l’aviation civile commerciale.
Junkers est, avec la société française Breguet, un des rares avionneurs à avoir fourni des avions militaires durant les deux conflits mondiaux.
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