Nation européenne certes mineure dans l’histoire aéronautique par rapport à la France, l’Italie, ou encore le Royaume-Uni la Yougoslavie sut pourtant durant toute son existence proposer des machines intéressantes. Toutes n’étaient pas révolutionnaires, certaines même restaient assez quelconques mais il y avait une constante : la volonté de conserver au maximum l’indépendance technologique vis à vis des grandes puissances. Et cela se traduisit au travers d’aéronefs très divers parmi lesquels un étonnant monomoteur d’entraînement primaire et intermédiaire autant utilisé comme avion que comme hydravion : l’Ikarus Aero 2.
Au lendemain de la chute des régimes fascistes et nazis la Yougoslavie se reconstruisait tant bien que mal, avec une force aérienne totalement décimée. Il ne lui restait pratiquement plus rien, hormis quelques vieux biplans dont la Luftwaffe n’avait voulu pas plus que la Regia Aeronautica. Il lui était aussi urgent de recruter et de former des pilotes. Or cette nécessité avait déjà été mise en avant cinq ans plus tôt, avant la chute du pays. À l’époque l’avionneur Ikarus avait remporté un contrat portant sur cinquante exemplaires d’un avion d’entraînement élémentaire appelé Aero. Malheureusement aucun n’avait eu le temps d’être livrés, et donc pris en compte.
Ikarus qui reprenait timidement ses activités, principalement autour du programme de chasseur monomoteur S-49, dut reprendre les assemblages de l’Aero. Cependant quelques menues améliorations furent apportées telles qu’un équipement radio. Ainsi disparut l’Aero demeuré à l’état de prototype et naquit l’Aero 2. Sur les cinquante appareils commandés en 1940 quinze furent construits après-guerre comme hydravions à flotteurs.
Extérieurement l’Ikarus Aero 2 était trahi par l’âge de sa conception. Monoplan à aile basse cantilever de construction mixte en tubes d’aciers et panneaux de bois il disposait d’un petit moteur britannique à quatre cylindres en ligne De Havilland Gipsy Major de 145 chevaux. Conçu autour d’un train d’atterrissage classique fixe il pouvait recevoir en lieu et place deux flotteurs afin d’en faire un hydravion. L’instructeur et son élève prenaient place dans un double poste de pilotage séparé à l’air libre. Chacun possédait son propre pare-brise. L’Aero 2 n’était, en outre, pas armé. Les premiers exemplaires sont entrés en service fin 1946.
En parallèle Ikarus travaillait à une version améliorée, rendant l’avion plus contemporain. Il faut dire que son architecture générale rappelait fortement les monoplans Caudron C.600 Aiglon français, Klemm Kl 35 allemands, ou encore Miles M.14 Magister britannique. Trois avions qui dataient d’avant-guerre. C’est ainsi qu’en 1948 la force aérienne yougoslave accepta au service des avions améliorés dotés d’un nouveau train d’atterrissage, de flotteurs plus robustes, d’un moteur tchécoslovaque Walter Minor à six cylindres en ligne de 160 chevaux, et d’un cockpit fermé et chauffé. Désormais l’Aero 2 avait tout d’un avion d’entraînement d’après-guerre.
Les cinquante premiers exemplaires furent alors désignés Aero 2B et Aero 2BH pour respectivement les versions terrestres et hydravions. Les «nouveaux» exemplaires furent eux désignés Aero 2E et Aero 2H, là encore pour les versions avions et hydravions.
Ces monomoteurs permirent aux écoles de pilotage de Yougoslavie de disposer rapidement d’appareils d’entraînement bon marché, construits en grande série, et facile d’emploi.
Surtout ils permettaient au maréchal Tito de conserver son indépendance face à Staline et son avionneur Yakovlev.
Ikarus tenta d’exporter son Aero 2 vers la Bulgarie et la Tchécoslovaquie mais Moscou refusa tout net cette possibilité.
Les deux cent quarante cinq Ikarus Aero 2 de série restèrent en service jusqu’en 1961. Pourtant leur remplacement commença dès 1958 et l’arrivée en unité des premiers UTVA Aero 3 conçus spécifiquement dans ce rôle. Il est à noter que trois avions de présérie Aero 2C, Aero 2D, et Aero 2F furent également assemblés.
Aujourd’hui un Aero 2E est préservé au sein des collections du musée aéronautique de Belgrade en Serbie.
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