Dans l’inconscient collectif l’AWACS se présente sous la forme d’un avion de ligne transformé par l’adjonction d’un radar sur le dessus du fuselage, soit de forme rectangulaire dans le cas du radar à ouverture synthétique, soit de forme circulaire dans le cas, plus classique, des radômes rotatifs. Toutefois quelques essais furent menés afin de trouver des alternatives à ces solutions. Parmi celles-ci figurent un Boeing 707 transformé par l’ajout d’un volumineux radar dans le nez, qui malgré certaines qualités, ne suscita pas l’intérêt de clients réels : l’I.A.I. Phalcon.
Les origines de cette machine remontent au milieu des années 80 quand la Fuerza Aeréa de Chile (FAC, aviation militaire du Chili) fit savoir qu’elle recherchait un nouveau système de détection reposant notamment sur une petite flotte d’avions radar, et sur plusieurs appareillages disposés au sol. La FAC décida de demander à l’équipementier israélien Bedek, une filiale du géant I.A.I. de concevoir ce système.
Si les radars basés au sol existaient déjà, Bedek eut plus de mal avec l’avion radar. A cette époque les machines du type AWACS se comptaient sur les doigts d’une seule main. Outre l’omniprésent Boeing E-3 Sentry, il existait quelques avions, souvent à l’état de prototypes, en Union Soviétiques. Si l’US Department of Defence refusa rapidement de vendre ses Sentry au Chili, celui-ci ne pouvait pas, pour des raisons aussi politiques que diplomatiques, acquérir des avions militaires auprès de Moscou.
C’est la raison pour laquelle Bedek demanda à la FAC de lui fournir un avion servant de base de travail. Cette machine, un Boeing 707-320C de transport stratégique, fut livrée en Israël en 1988. Immédiatement les équipes de Bedek procédèrent au démontage total de l’avion. Ce n’est qu’en septembre 1990 que l’avion fut remonté avec cette fois-ci trois radars. Deux à ouverture synthétique montés chacun de part et d’autre de l’avant du fuselage dans des carénages proéminents, un peu à la manière des RC-135W River Joint de l’US Air Force, et surtout un surprenant radar de veille Elbit/ELM installé dans le nez de l’avion.
En dehors de cela, l’avion ne reçut que peu de modifications extérieures, si ce n’est une série d’antennes sur le dessus du fuselage. Toutefois à l’intérieur un important câblage fut monté afin de relier les radars aux différentes consoles de travail des opérateurs radars. Des cabines furent également installées pour le repos des équipes lors des phases de vol. Au niveau structurel, le train d’atterrissage fut renforcé, et un réceptacle de ravitaillement en vol fut installé sur le dessus du fuselage, un peu à la manière des bombardiers américains. La firme I.A.I. nomma son nouvel avion Phalcon.
Les premiers essais de roulage eurent lieu dès novembre 1992. Ce qui frappa le plus était la très faible garde au sol de l’avion, en raison principalement du volume de son radar « de nez ». Malgré quelques petites modifications cette garde au sol ne varia pas, et obligeait donc l’avion à servir à partir de pistes en dur assez longue pour une approche en douceur. Le premier vol de l’avion intervint le 12 mai 1993.
Quelques jours plus tard le Phalcon fut officiellement présenté au grand public, mais aussi et surtout aux possibles clients, lors du Salon du Bourget 1993. L’appareil impressionna, mais aucune commande ne fut passée.
Bien qu’officiellement appartenant à la FAC l’avion fut utilisé durant près de deux ans par I.A.I. et Bedek pour des vols de démonstration et de présentation. Cet avion ne portait alors aucune marque militaire, se limitant au seul port de l’immatriculation 4X-JYI et à celui du logo d’I.A.I. sur son empennage et à l’arrière du cockpit.
C’est finalement en mai 1995 que le seul et unique Phalcon construit fut livré au Chili. Il fut immédiatement affecté au Grupo 10 de la Fuerza Aeréa de Chile, une unité basée sur la partie militaire de l’aéroport international de Santiago du Chili. La FAC décida de changer le nom de Phalcon vers celui de Condor.
Au sein du Grupo 10, le Condor sert aux côtés d’autres machines multimoteurs comme les C-130 Hercules de transport, les Boeing 707 servant eux aussi au transport, les deux KC-707 de ravitaillement en vol, et les avions de transport de hautes personnalités de la FAC, deux 737-400 et un 767-300 de ligne. Afin de soutenir l’action du Condor, la FAC a fait l’acquisition en 1995 de deux Beechcraft King Air 350 et, puis en 2008 d’un Gulfstream G550, tous trois modifiés pour des missions de surveillance aérienne.
Toutefois ces avions sont loin de disposer d’une capacité de patrouille équivalente à celle du Condor, qui peut demeurer en vol pendant douze heures, sans même subir de ravitaillement en vol. De même la portée du radar, de l’ordre de 300km est très supérieure à celle des King Air ou du G550.
En décembre 2008, la FAC fit savoir qu’elle désirait remotoriser le Condor avec des réacteurs CFM-56 plus modernes, plus puissants, mais surtout plus économiques et silencieux que les Pratt & Whitney JT3D-7 d’origines. Cependant les restrictions budgétaires ont reporté ce chantier à 2015.
Aujourd’hui si la Heyl Ha Avir ne dispose d’aucun Phalcon, il est à noter toutefois que quelques uns de ses avions de surveillance aérienne sont directement dérivés de celui ci, sans pour autant emporter le radar de nez de l’avion.
Le retrait du service du Condor au Chili ne semble pas d’actualité avant les années 2025, étant donné le chantier de remotorisation. Il faudra donc encore compter quelques années pour ceux qui désirent voir voler dans les cieux sud-américain ce très surprenant AWACS.
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