Avec moins de 300 kilomètres de côtes à surveiller Israël n’est pas à proprement parler une puissance maritime. Néanmoins ses côtes, majoritairement situées sur la Méditerranée, représentent un objectif militaire de premier plan pour quiconque aurait des velléités de frapper ou d’envahir l’état hébreu. C’est l’une des raisons qui a conduit la Heyl Ha’Avir à se doter à la fin des années 1970 d’un avion de construction locale spécialement dédié à la surveillance maritime : l’IAI Sea Scan.
Comme souvent en Israël c’est en réponse à une attaque terroriste que les militaires ont réagi. Le 4 mars 1975 un groupe de huit combattants appartenant à l’OLP (Organisation de Libération de la Palestine) attaque l’hôtel Savoy de Tel Aviv, la capitale économique de l’état hébreu. Dans cet attentat huit civils et trois soldats israéliens sont tués par le commando. Les investigations démontreront qu’ils sont arrivés au petit matin par la mer à bord de canots pneumatiques motorisés légers. Pour les autorités israéliennes c’est la preuve que leurs côtes ne sont pas sûres. A la différence de toutes les grandes puissance du monde leur pays ne dispose alors d’aucun avion de patrouille maritime. Il faut y remédier.
En effet l’attaque de l’hôtel Savoy a prouvé que la surveillance des eaux territoriales par les seules vedettes de la marine israélienne ne suffit pas. Heyl Ha’Avir doit disposer au plus vite de ses propres avions. Deux possibilités s’ouvrent alors aux généraux : acquérir des avions à l’étranger ou concevoir leur propre appareil. Aucune chance que les Britanniques et les Français n’acceptent alors de vendre de tels avions et le Lockheed P-3C Orion américain est alors considéré comme trop onéreux par les décideurs israéliens. Surtout c’est un chasseur de submersibles, et la menace sous-marine n’est pas prioritaire à Jérusalem. Il reste alors la transformation de machines locales, et là deux possibilités existent : le biturbopropulseur léger Arava ou le jet d’affaire Westwind.
Assez logiquement c’est ce second avion qui est choisi. Cependant à l’époque les finances israéliennes ne sont pas au beau fixe et seuls trois avions peuvent être acquis par Heyl Ha’Avir. Et le ministère de la défense refuse de payer pour un prototype. Ce sera donc un avion de présérie et deux de série. Ils sont baptisés Sea Scan.
Un biréacteur d’affaire IAI Westwind est prélevé sur les chaînes de montage et on lui attribue une avionique militaire : un radar de recherche maritime AN/APS-504, un FLIR rétractable et une caméra nocturne LLTV de conception indigène, mais aussi un détecteur d’anomalies magnétiques. Ce dernier équipement est spécialement monté à la demande de la marine israélienne qui veut profité des IAI Sea Scan pour disposer enfin d’un véritable matériel de repérage à distance des submersibles en plongée. Ces avions sont aussi gréés pour emporter sous les ailes deux missiles air-mer Gabriel AS Mk-III, ayant une portée allant de 40 à 65 km. C’est dans cette configuration que l’avion de présérie réalisa son premier vol en août 1978.
Les essais en vol furent très vite menés, les impératifs politiques menant à une entrée rapide des avions en service. Ils furent déclarés opérationnels en 1979. Pourtant le Sea Scan n’était pas exempt de défauts majeurs. D’abord il était trop exigu pour un équipage de sept membres (trois aviateurs pour le pilotage de l’avion et quatre marins pour la conduite de la mission) ensuite son rayon d’action devenait ridiculement court dès lors qu’il emportait ne serait-ce qu’un seul missile Gabriel AS Mk-III.
Ce second défaut fut rapidement comblé. En fait les Sea Scan opéraient avec la méthode du hunter-killer développé par les Américains et les Britanniques durant la bataille de l’Atlantique pendant la Seconde Guerre mondiale. Un Sea Scan réalisait une mission de reconnaissance et dès qu’il repérait une cible un second décollait et le rejoignait pour couler le navire en question. À l’époque en dehors de ces biréacteurs, aucun avion d’arme de Heyl Ha’Avir ne disposait en effet de moyens air-mer.
En 1989 les trois avions furent renvoyés chez le constructeur pour y subir un important chantier de refonte. Il fallait les adapter désormais à la mission de recherches et de sauvetages en haute mer. Un second skydôme fut installé ainsi qu’une chaîne SAR aéro-largable.
A partir de 2000 les trois IAI Sea Scan n’ont plus jamais pris les airs avec leurs missiles Gabriel AS Mk-III, une partie des General Dynamics F-16C/D acquis par Israël ayant gagné cette capacité. Désormais les biréacteurs n’étaient plus que des avions de reconnaissance.
Acteurs discrets de la défense israélienne les trois Sea Scan ont été retiré du service dans les rangs de Heyl Ha’Avir au début de l’année 2016, soit plus de 35 ans après leur entrée en service. Pas mal pour des avions conçus à la va-vite et exposés quotidiennement aux embruns et à la corrosion qui en résulte. Ils ont été remplacé par des Beechcraft Super King Air 200 spécialement modifiés. Dans la nomenclature israélienne ces avions étaient baptisés Shahaf.
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