La Seconde Guerre mondiale fut à bien des égards une des époques les plus innovantes de l’histoire de l’aviation. Elle vit émerger de nombreux concepts jusque là inédits comme l’aviation a réaction ou encore la guerre électronique. D’autres furent approfondis tels le vol à haute altitude ou bien l’hélicoptère. Pourtant quelques rares domaines ne virent pas de progrès majeurs, à l’image de l’entraînement initial et intermédiaire des élèves. À tel point même qu’il n’était pas rare de croiser dans la quasi totalité des forces aériennes des biplans à l’allure assez vieillottes, même dans les années 1944 ou 1945. Dans la Luftwaffe l’un des exemples les plus frappants fut le Heinkel He 72 Kadett.
En janvier 1933 sous l’impulsion du chancelier Adolf Hitler la Reichswehr chercha à se doter d’un avion d’entraînement unique. À l’époque les écoles d’aviation reposaient sur une multitude de petits biplans et monoplans tels les Albatros L.82, BFW M.23, Klemm L.26 et Udet U.12 sans jamais avoir la moindre efficacité. La jeune Luftwaffe lança alors un programme en ce sens, obtenir un avion de formation basique et intermédiaire pouvant unifier toutes les écoles. Devant l’urgence de la situation plusieurs avionneurs répondirent à l’appel : Arado, Blohm & Voss (via son bureau d’étude Hamburger), Focke-Wulf, Gotha, ou encore Heinkel.
Chaque constructeur reçut pour instruction de développer et produire deux prototypes. Dans le même temps le Reichsluftfahrtministerium affecta à chacun une désignation en propre. L’avion de Heinkel devint He 72. D’une conception pour le moins totalement académique celui-ci se présentait sous la forme d’un biplan de construction mixte. Sur une structure en tubes d’acier les techniciens fixèrent du contreplaqué. La voilure en biplan à ailes décalées était de son côté recouverte d’un entoilement en tissus. Pour le reste il disposait d’un train d’atterrissage classique fixe doté d’une roulette de queue orientable. L’instructeur et son élève prenaient place dans un poste de pilotage biplace en tandem à l’air libre disposant d’une double commande. Le He 72 était mû par un Argus As 8B à quatre cylindres en V inversé d’une puissance de 140 chevaux.
C’est dans cette configuration que le premier prototype vola en juin 1933.
Quasi immédiatement La Luftwaffe passa commande pour les Arado Ar 66 et Focke-Wulf Fw 44 Stieglitz. Dans le même temps elle demanda à Heinkel de revoir son He 72 via le moteur à sept cylindres en étoile Siemens-Halske Sh 14. Ainsi remotorisé l’avion devint He 72B et vol en novembre 1933, quelques jours seulement avant l’avion de Gotha. Ce dernier, désigné Go 145 fut comme le He 72B commandé en série. Seul le Hamburger Ha 135 (représentant Blohm & Voss) ne dépassa pas le stade expérimental.
Les premiers Heinkel He 72B entrèrent en service dans la Luftwaffe en mars 1934. Rapidement ils furent affecté à la formation initiale et intermédiaires des meilleurs élèves issus des sélections en vol, c’est à dire ceux appelés à voler sur chasseurs et bombardiers. À la même époque l’avion reçut le patronyme de Kadett, cadet en français. L’avionneur proposa également un hydravion à flotteurs d’entraînement He 72Bw Seekadett afin de remplacer les Heinkel He 42. Cependant il ne réussit pas à convaincre les généraux allemands et ne dépassa pas le stade expérimentale. En 1935 du fait du programme d’avion de ligne dérivé en bombardier moyen He 111 la production du He 72 fut transféré à l’avionneur Fieseler. Celle-ci se termina deux ans plus tard avec la production du 768e et dernier exemplaire de série. Malgré des qualités indéniables et une robustesse avérée cet avion école n’attira pas les clients étrangers. Seule la Bulgarie acheta un lot de seize He 72B en janvier 1937.
Quand l’Allemagne nazie envahit la Pologne, projetant l’Europe dans la guerre, le Heinkel He 72 Kadett était encore l’un des trois principaux biplans d’entraînement de la Luftwaffe. Du fait de l’apparition progressive d’avions plus récents il fut rétrogradé à la seule formation initiale, et même parfois à la sélection en vol. Jugé très stable le He 72B fut engagé à partir de juillet 1940 dans une vaste opération de propagande visant à recruter toujours plus de pilotes. Des adolescents issus de l’organisation des jeunesses hitlériennes se virent ainsi offrir leurs baptêmes de l’air sur de tels biplans. La machine allemande d’endoctrinement fit le reste.
Lorsqu’en mai 1945 l’Allemagne nazie signa son armistice avec les Alliés plus de deux cent cinquante He 72 Kadett étaient encore en dotation dans les rangs de la Luftwaffe. Quelques uns furent alors réquisitionnés et testés par des pilotes d’essais américains et britanniques. À leurs yeux la conception de cet avion était révolutionnaire, le He 72 étant sans doute un des biplans d’entraînement parmi les plus réussis. Après guerre quelques avion démilitarisés servirent dans des écoles de pilotage en Allemagne de l’Ouest sous la désignation He 72B.3 Edelkadett.
Comme souvent avec Heinkel le He 72 Kadett donna naissance à une version améliorée. Désignée He 172 celle-ci vola en 1934 sous l’immatriculation civile D-EEHU. Elle se différenciait de l’avion de série par un nouveau capotage de moteur respectant les normes du NACA américain. Il fut notamment essayé avec des roues carénées avant de revenir à des roues classiques. Bien que nettement plus aérodynamique ce He 172 ne fut jamais produit en série. On ignore ce qu’il advint du lui.
Malgré son importance historique pour l’industrie allemande il semble bien qu’aucun Heinkel He 72 Kadett ne soit parvenu jusqu’à nous. Ce modèle fut le dernier avion d’entraînement conçu par l’avionneur.
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