Dans l’histoire de l’hydraviation le constructeur allemand Heinkel tient une place à part. Car à la différence des autres grandes entreprises du domaine il s’est spécialisée dans les hydravions à flotteurs et non ceux, plus académiques, à coque. Et force est de constater que Heinkel a eu raison car ses réalisations ont servi dans les rangs de la Luftwaffe du début à la toute fin de la Seconde Guerre mondiale. Parmi les plus représentatifs figure un monomoteur robuste et bien pensé : le He 60.
Le développement de cette machine est, assez étrangement, totalement lié à celui d’un autre hydravion à flotteurs de chez Heinkel : le bimoteur He 59. Conçu en même temps par le même bureau d’étude, placé sous l’autorité du chef ingénieur Reinhold Mewes, les deux hydravions avaient beaucoup en commun. Tellement même que lorsque Heinkel présenta le programme de développement de son He 60 aux autorités du gouvernement Hitler il le qualifia de He 59 monomoteur.
Ce qui à priori n’aurait pas du être une bonne solution car cela plaçait les deux machines dans une position de redondance fut finalement une idée de génie.
En effet la Luftwaffe cherchait tous azimuts à se doter de matériels lui permettant de rattraper le retard de la démilitarisation de l’Allemagne consécutive au Traité de Versailles de 1919. Quelques jours avant le premier vol du prototype de ce Heinkel He 60 le tout jeune RLM (ministère nazi de l’air) passa commande pour un lot de 81 machines au standard He 60A dont six de présérie.
Finalement le premier vol eut lieu en janvier 1933 et les premiers exemplaires de série entrèrent en service en juin de la même année.
Rarement on avait vu un développement aussi court. Et du coup on aurait pu craindre un travail bâclé de la part des équipes Heinkel mais il n’en fut rien.
Extérieurement le Heinkel He 60 se présentait sous la forme d’un hydravion à flotteurs biplan de construction mixte bois et métal. Sa propulsion était assurée par un moteur à douze cylindres en ligne BMW type VI identique à celui équipant le He 59. L’équipage constitué d’un pilote et d’un radio-navigateur-observateur prenait place dans un cockpit biplace en tandem à l’air libre. L’armement se composait d’une mitrailleuse MG15 de calibre 7.92mm installée en position arrière sur affût annulaire. Cette arme était censé pouvoir protéger l’avion des chasseurs ennemis.
À l’usage le Heinkel He 60 ne démontra en fait que deux défauts. Le premier était un armement jugé trop léger pour mener des missions de reconnaissance côtière. Ce qui fut corrigé en partie avec le He 60B et sa capacité d’emport pour 250kg de bombes sous le plan inférieur de voilure et sous le fuselage. Le second, plus difficile à contrer était une relative sous-motorisation notamment pour les exemplaires embarqués à bord de navires de guerre et lancés par catapultes. Un He 60B fut modifié en He 60B-3 avec un moteur Daimler-Benz DB 600 de 900 chevaux, du même genre que celui qui allait quelques temps plus tard motoriser le chasseur Messerschmitt Bf 109, mais les essais montrèrent trop d’instabilité.
Du coup le RLM décida de laisser ce défaut de côté et de poursuivre la construction du He 60 comme tel.
Au He 60B succéda sur les chaînes d’assemblage le He 60C sur lequel la charge de bombe avait été déposé au détriment d’un équipement radio plus moderne.
Lorsqu’en 1936 la Luftwaffe eut enfin la pleine dotation de ses Heinkel He 60 le constructeur reçut une commande de la part des forces nationalistes espagnoles. Les troupes franquistes achetèrent six exemplaires désignés He 60E et globalement identiques aux He 60C. Dans le même temps la Kriegsmarine acheta vingt exemplaires sous la désignation de He 60D afin d’assurer la surveillance rapproché de ses ports et arsenaux.
Malgré son extrême petitesse l’aéronavale allemande tenait absolument à continuer d’exister.
Quand l’Allemagne nazie envahit la Pologne à l’été 1939 le Heinkel He 60 était encore le principal hydravion de surveillance et de reconnaissance côtière en service dans les rangs de la Luftwaffe. Pourtant des modèles plus récents et plus modernes allaient petit à petit prendre sa succession comme l’Arado Ar 196. Pour autant la guerre était loin d’être terminée pour l’hydravion biplan.
L’état-major de la Luftwaffe décida de le réaffecter à partir du printemps et de l’été 1941 à la surveillance des îles grecques placées alors sous occupation allemande. Les He 60 de la Luftwaffe avaient la lourde tâche de devoir contrôler et éventuellement intercepter les navires, et notamment britanniques, qui croisaient dans la région. Une tâche qu’ils effectuèrent jusque fin 1943 quand la maîtrise du ciel avait changé de camp dans la région.
Ainsi se termina la carrière de ce robuste et assez simple hydravion dans la Luftwaffe.
À la même époque les nazis offrirent cinq Heinkel He 60B déclassés à leur allié bulgare qui les utilisa comme hydravions d’entraînement et de liaison. Ils étaient alors désarmés. On ignore ce qu’il en est advenu.
Et quid des machines de l’aéronavale allemande ? Eh bien elles volèrent jusqu’au début de l’année 1944 afin de continuer à surveiller les ports sous contrôles allemands, y compris en Belgique et en France. C’est d’ailleurs un He 60D qui fut le seul aéronef de la Kriegsmarine à attaquer les troupes anglo-canadiennes lors du débarquement avorté de Normandie en août 1942. L’hydravion, basé au Havre, mitrailla à plusieurs reprises les plages entre Dieppe et Le Tréport.
S’il ne peut fondamentalement pas prétendre avoir été l’un des hydravions les plus fameux de la Seconde Guerre mondiale le Heinkel He 60 demeure cependant une bonne machine et un serviteur dévoué. Et ce malgré son défaut de sous-motorisation jamais résolu.
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