C’est au cours des années 1920 que les forces britanniques inventèrent le concept d’aviation de coopération. Il s’agissait de proposer des avions très polyvalents capables de servir les intérêts des forces terrestres aussi bien dans des missions de reconnaissance armée que de soutien opérationnel au travers de ravitaillement en eau et en vivre. Si ces avions étaient au départ des biplans ils se sont peu à peu mués en monoplans à aile haute. Durant la Seconde Guerre mondiale, ce concept s’est généralisé aux autres grandes forces aériennes, tant dans les rangs des Alliés que de l’Axe. Au sein de la Luftwaffe le principal aéronef de ce type fut un petit monoplan parasol : le Heinkel He 46.
En 1930 alors que le réarmement allemand était une des pires craintes des états-majors britanniques et français, le Deutscher Luftsportverband qui sur le papier était une association sportive allemande commanda à l’avionneur Heinkel un monoplan à aile haute d’entraînement de nouvelle génération. Pour les services de renseignement cette association est avant tout un embryon de force aérienne et tout nouvel avion une potentielle menace sur l’avenir. Les ingénieurs de Heinkel décide de désigner le nouvel avion HE 46.
Les études allaient bon train, d’autant qu’en secret le cahier des charges prévoit que l’appareil puisse remplir des missions de reconnaissance, armée ou non. Son premier vol intervint en novembre 1931 sous la forme d’un avion d’entraînement biplan d’envergure inégal. Cependant un deuxième prototype, plus abouti était en préparation. Son l’architecture n’était pas sans rappeler ce qui se faisait alors en France chez Morane-Saulnier. En fait à ce moment là les services secrets français le considérait comme une simple copie allemande du MS.230. Encore deux autres prototypes furent construits dans la lancée.
Malgré l’acceptation par le communauté internationale en décembre 1932 du principe d’égalité des droits sur les question d’armement jamais le chancelier Hitler ne put le mettre en œuvre le poids politique et diplomatique de la France, hostile à toute forme de réarmement allemand s’y opposa. Finalement l’Allemagne se passa de l’autorisation de la Société des Nations. De ce fait une dizaine de Heinkel HE 46B, non armés, entrent en service en 1934 au sein du Deutscher Luftsportverband. Il s’agit bien entendu d’une diversion.
Quelques semaines plus tard le réarmement allemand est entériné sous la forme de l’acte de naissance de la Luftwaffe le 26 février 1935. Dans la foulée le RLM est créé, et avec lui la nomenclature allemande de désignation des aéronefs. Le HE 46 devient désormais He 46. Plus question d’avion d’entraînement celui-ci sera une machine de reconnaissance et de coopération terrestre. Les premiers exemplaires entrent en service opérationnel dès le mois d’avril 1935.
En fait les Allemands avaient fait fabriquer en masse le monoplan parasol par une demi-douzaine d’avionneurs autres que Heinkel dont Fieseler et Siebel. Quand il entra en service le Heinkel He 46 était le premier avion de reconnaissance allemand véritablement moderne.
Extérieurement le Heinkel He 46 se présentait sous la forme d’un monoplan parasol monomoteur de construction mixte bois et métal. Doté d’un cockpit biplace en tandem à l’air libre il était mu par un moteur à neuf cylindres en étoile Siemens SAM22B de 650 chevaux. Son armement se composait d’une mitrailleuse mobile MG15 de calibre 7.92mm installé en position sur affût annulaire et de vingt bombes légères de 10kg chacune installés sur des râteliers sous fuselage. Ces dernières pouvaient cependant être remplacés par un conteneur en bois permettant le transport de 160kg de charge marchande.
Si la principale version pour la Luftwaffe fut le Heinkel He 46C-1, dix-huit He 46C-2 dotés d’un moteur britannique Armstrong-Siddeley Panther de 560 chevaux furent vendus à la Bulgarie. Huit He 46E-2 furent quand à eux livrés à la Hongrie. Si les avions bulgares étaient globalement similaires aux avions allemands dans la définition de leurs missions les avions hongrois furent principalement engagés dans des missions d’observation diurne et de surveillance frontalière. En 1938 l’Espagne franquiste reçut vingt He 46C-1 de seconde main d’Allemagne.
En fait ces avions n’étaient pas des inconnus de l’autre côté des Pyrénées. En effet la terrible Légion Condor en utilisa une quarantaine dans des missions de reconnaissance autant que d’appui anti-personnels. L’année 1939 marqua le déclin du He 46. La Luftwaffe lui avait trouvé un remplaçant : le Henschel Hs 126.
Cependant environ 250 Heinkel He 46 participèrent à l’invasion de la Pologne en septembre de cette même année puis quelques mois plus tard à celles des Pays-Bas et de la Belgique. Quand la Luftwaffe attaqua la France près de deux cents d’entre-eux volaient encore en première ligne et beaucoup furent engagés dans des missions de reconnaissance et d’appui des forces terrestres. Cependant ils représentaient une cible de choix pour l’Armée de l’Air et près de cinquante d’entre eux furent abattus. Les aviateurs français avaient surnommés le He 46 le « Morane boche » tant son allure générale rappelait les avions Morane-Saulnier.
À partir de juin 1941 alors qu’Adolf Hitler décida de déclencher l’opération Barbarossa retournant ainsi ses troupes contre celles de son allié Joseph Staline la majorité des He 46C-1 encore en état de vol furent envoyés à l’est. Dans l’esprit des Allemands jamais la chasse soviétique ne pourrait surpasser la Luftwaffe. Grave erreur. En quelques semaines plus de 25 monoplans parasols furent envoyés au tapis. L’avion accusait désormais terriblement son âge.
Il fut alors décidé de déployer ces avions au sein des Nachtschlacht-gruppen chargés des missions de harcèlement nocturne des troupes soviétiques. Les équipages des Heinkel He 46 avaient comme mission de bombarder en pleine nuit, sans presque de lumière, les positions des fantassins soviétiques. Ils étaient souvent appuyés de Junkers Ju 87 dont la sirène jouait terriblement sur le moral des forces ennemies.
Finalement les derniers Heinkel He 46 furent retirés du service en février 1943. Ils étaient alors tout à la fois hors d’usage et complètement obsolète. Ainsi se terminait la carrière des 478 premiers avions de reconnaissance mais aussi premiers avions de coopération de l’aviation allemande. Bien moins célèbres que nombres de ses contemporains il eut pourtant le mérite d’être un des outils de la reconstruction de la Luftwaffe.
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