Avec l’avènement dans les années 50 des premiers avions à réaction, mais également des premiers hélicoptères modernes les militaires commencèrent à s’intéresser à un concept assez innovant : l’ADAV (pour Avion à Décollages et Atterrissages Verticaux, VTOL en anglais) impossible à mettre en place avec les appareils à hélice. Ce concept permettait de conserver le rayon d’action et la vitesse d’un jet en les combinant avec la facilité d’emploi des voilures tournantes. Des essais furent menés dans quatre pays : Etats-Unis, France, Royaume Uni, et Union Soviétique. C’est dans le troisième de ceux ci que vola au début des années 60 un des prototypes les plus extraordinaires de tous les temps : le Hawker-Siddeley P.1127 aussi appelé Kestrel.
C’est en 1957, qu’une équipe menée par l’ingénieur britannique Sidney Camm, par ailleurs concepteur du chasseur Hawker Hurricane de la Seconde Guerre Mondiale, et par son homologue français Jean Wibault, fabricant du chasseur Wib-7 des années 30, fut montée sous la houlette du constructeur Hawker-Siddeley, et notamment de sa branche motoriste Bristol-Siddeley. L’industriel décida de monter son programme, destiné à fournir à l’OTAN un chasseur ADAV, sous la désignation de P.1127.
Cette machine fut assez rapidement assemblée, d’autant que le gouvernement britannique décida d’apporter un coup de pouce au programme en passant commande pour deux prototypes à la fin de l’année 1959. Le P.1127 se présentait sous la forme d’un monoplan à aile haute en flèche dotée d’un cockpit monoplace et d’un train d’atterrissage monotrace, doté également de deux roulettes de balancines en bout d’ailes. Le secret de l’avion résidait dans son turboréacteur Bristol-Siddeley Pegasus Mk-5 d’une poussée de 6 810 kg disposant de tuyères vectorielles permettant d’orienter le jet d’air chaud. Afin d’amortir le choc de l’atterrissage vertical, l’avion fut doté d’un train d’atterrissage particulier donnant une inclinaison vers l’arrière au P.1127. Bien que destiné à servir de prototype à un chasseur il ne fut pas armé. Il n’était pas ravitaillable en vol.
Le premier Hawker-Siddeley P.1127 réalisa son vol inaugural le 19 novembre 1960. Lors de ce premier vol le P.1127, que le Ministry of Defence (MoD, ministère britannique de la défense) baptisa Kestrel, décolla de manière classique. Pour voir arriver les premiers décollages et atterrissages verticaux il fallut attendre le 8 septembre 1961, et le second prototype. Celui ci avait d’ailleurs volé pour la première fois quelques jours plus tôt le 7 juillet 1961.
Après le premier vol ADAV, le MoD passa commande pour quatre prototypes supplémentaires. Le premier de cette série servit d’avion de démonstration au programme, et notamment en direction de l’OTAN. Il fut présenté au public à Farnborough en 1962 et l’année suivante au Bourget. C’est d’ailleurs lors de ce salon que l’avion fut perdu, le pilote réussissant à s’éjecter.
En 1963, la Luftwaffe, la RAF, l’US Air Force, l’US Army, et l’US Navy s’associèrent au programme et passèrent commande à Hawker-Siddeley d’un total de neuf avions. Les deux premiers désignèrent l’avion Kestrel, tandis que l’US Air Force et l’US Navy désignaient les leurs XV-6A, alors que l’US Army nomma le sien VZ-12. Les essais furent menés directement par les équipes de Hawker-Siddeley et par les pilotes d’essais de ces pays.
En 1964, la RAF commença à présenter son avion sous la désignation de Kestrel FGA Mk-1 comme son futur chasseur standard. Toutefois cette avion n’emportait que des armes factices, ne disposant ni de systèmes d’armes ni de branchement pour le tir des missiles, ou même pour l’activation d’éventuels canons.
Fin 1965, le programme du P.1127 Kestrel fut abandonné au profit d’une version améliorée qui allait donner naissance quelques semaines plus tard au premier chasseur ADAV véritablement opérationnel, le Hawker-Siddeley Harrier GR Mk-1 de la RAF. De leurs côtés les XV-6A et VZ-12 préfigurèrent l’utilisation de cette machine par les Américains. Il est surprenant que l’US Marines Corps, qui utilise actuellement l’AV-8B Harrier II n’est pas été consulté pour son ancêtre. Pour la petite histoire la NASA a également utilisé un XV-6A pour tester différents domaines de vol, et notamment la manoeuvre du module lunaire de la mission Apollo IX.
Aujourd’hui, à l’exception de l’appareil craché au Bourget, tous les P.1127 Kestrel sont préservés dans des musées aéronautiques allemands, américains, et britanniques. Il est original que le nom de Kestrel a de nouveau été repris pour désigner un appareil britannique destiné aux Américains, le VH-71 Kestrel, futur Marine One du Président des Etats-Unis, la version de transport de hautes personnalités de l’Agusta Westland AW-101, ex EH-101.
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