Lorsque la Seconde Guerre mondiale éclate en septembre 1939, la Fleet Air Arm ne dispose pas de réels avions de chasses embarqués, en tout cas pas d’appareils susceptibles d’intercepter les Messerschmitt Bf-109 de la Luftwaffe. Sa capacité de protection des navires de la Royal Navy ne repose que sur des avions sous-motorisés et obsolètes à l’image des biplans Sea Gladiator. Néanmoins ce rapport de force n’a que peu d’effet sur l’activité en Atlantique Nord, chemin des convois de matériels américains. L’armistice franco-allemand au printemps 1940 va profondément changer la situation, forçant la Royal Navy à se chercher un nouveau chasseur capable d’intercepter les appareils allemands décollant des côtes ouest de l’hexagone. Privilégiant la navalisation d’un appareil déjà existant à la conception d’une machine neuve, l’Amirauté commande à Hawker l’avion qui deviendra pour les trois années à venir son principal chasseur embarqué : le Sea Hurricane.
Décollant d’aérodromes bordant l’Atlantique, notamment dans la région de Bordeaux, les Heinkel He-111 et les puissants Focke-Wulf Fw-200 de la Luftwaffe conduisent des opérations de lutte antinavire contre les convois reliant les États-Unis à l’Angleterre et l’Écosse. Ces multimoteurs servent parfois également à guider les redoutables U-boots de la Kriegsmarine afin que ceux-ci attaquent plus discrètement et avec plus de précision. Si les sous-marins nazis sont à la charge du Coastal Command, les avions de la Luftwaffe opérant au-dessus de l’océan reviennent à la Fleet Air Arm.
Cependant devant le volume important de navires alliés coulés par l’Allemagne l’Amirauté demanda de modifier un premier lot de 50 Hurricane Mk-I en Sea-Hurricane Mk-IA. Cette série était alors considérée comme un pis-aller, sachant que ces chasseurs devaient être catapultés depuis n’importe quel bâtiment de la Flotte, à l’exception des porte-avions. Une fois en l’air les pilotes devaient fondre sur les avions de la Luftwaffe, tenter de les abattre, et revenir se poser sur l’eau avant d’être récupérer soit par un hydravion soit par le navire lui-même. L’avion était bien entendu perdu après chaque mission.
On surnomma ces appareils « Hurricat« . Dans la dure réalité des choses, les pilotes qui réussissaient à ne pas se faire abattre par les mitrailleurs des appareils allemands, périssaient la plupart du temps dans l’amerrissage de leur appareil, ou alors mouraient de faim et de froid dans l’eau glacé de l’Atlantique. Le cockpit du Sea-Hurricane étant trop petit pour embarquer un dingy !
Après cette désastreuse mésaventure, la Royal Navy commanda en août 1941 un premier lot de 340 Sea-Hurricane Mk-IB appelés à servir sur porte-avions. Se différenciant des versions terrestres par leur crosse d’appontage et par des volets très légèrement plus grand, ces Sea-Hurricane ne tardèrent pas à devenir la monture favorite des pilotes de la Fleet Air Arm. Grâce à cet avion, les pilotes de la Royal Navy commencèrent à reprendre la maîtrise du ciel au-dessus de l’Atlantique Nord, mais également en Méditerranée.
Sur ce second théâtre d’opérations les Sea-Hurricane se retrouvèrent souvent nez-à-nez avec les Macchi MC-202 de la Régia Aeronautica et avec les Focke-Wulf Fw-190 de la Luftwaffe. Si les chasseurs italiens ne représentaient pas une menace très sérieuse pour les avions de la FAA, il en était autrement des Fw-190. En effet ceux-ci étaient souvent plus maniable et mieux armés que les Sea-Hurricane. C’est ce qui conduisit Londres à acquérir 400 exemplaires d’une version plus lourdement armée, le Sea-Hurricane Mk-IC. Ce dernier délaissait ses mitrailleuses de 7.7 mm pour de puissants canons de 20 mm.
Ainsi équipés les porte-avions britanniques d’escorte n’avaient plus peur des vagues de bombardiers et d’hydravions que leur envoyait la Luftwaffe. Mais les Sea-Hurricane assuraient également des missions offensives. En avril 1943, plusieurs dizaines de Sea-Hurricane Mk-IB et Mk-IC ont participé à une attaque aérienne contre des navires allemands et italiens mouillant au large de la Tunisie. Si les navires ont été pris à partie par les Fairey Swordfish et Grumman Avenger larguant leurs torpilles, les Sea-Hurricane ont eu fort à faire avec les avions de l’Afrikakorps, réussissant toutefois à abattre quatre Messerschmitt Bf-110, deux Junkers Ju-87, et deux Dornier Do-17. Lors de cette attaque deux Sea-Hurricane Mk-IB furent détruits par la Flak.
A partir de janvier 1944, les Sea-Hurricane Mk-IB commencèrent à laisser la place en première ligne aux tous nouveaux Mk-IIC dotés d’un système radio tout-temps naval capable de communiquer avec n’importe quel navire allié. Les Sea-Hurricane Mk-IB rejoignirent alors les Grumman Martlet de la FAA dans les unités de seconde ligne et sur certains porte-avions d’escorte entre l’Angleterre et l’URSS.
A l’instar des Hurricane et Spitfire de la Royal Air Force, les Sea-Hurricane de la Royal Navy portaient des décorations à même d’identifier leurs éventuels propriétaire personnels. Seulement ces avions n’étaient ainsi peint que du côté droit, de manière à être immédiatement identifiés par le patron du pont d’envol depuis le château du porte-avions.
La Fleet Air Arm n’est pas le seul et unique utilisateur du Sea-Hurricane. La Royal Canadian Navy acquis en 1943 un lot de 56 Hurricane Mk-IIB qu’elle fit transformer en Sea-Hurricane Mk-IB. Ce furent les seuls machines de ce type à être doté d’armes de 12.7mm de calibre. Ces appareils servirent au sein des Squadrons 803 et 825 jusqu’après la guerre. Ils furent remplacés à partir de 1948 respectivement par le Sea Fury et le Firefly. Les Sea-Hurricane du Squadron 825 furent les premiers appareils à apponter sur le HMCS-Magnificent, le premier porte-avion canadien post-1945. Malgré leur achat en temps de guerre les Sea-Hurricane canadiens n’ont quasiment jamais connu le feu.
Deux autres pays ont utilisé des Sea-Hurricane : l’Irlande et le Portugal. Dans les deux cas, il s’agissait d’avions de la FAA saisis après un atterrissage forcé sur des terrains de ces pays « neutres ». L’Irish Air Corps récupéra un Sea-Hurricane du Squadron 806 tandis que la Força Aeréa Portuguesa reçu un avion du Squadron 815. Si l’avion portugais a été rétrocédé en 1946 à la Grande-Bretagne contre deux Spitfire Mk-IX, son équivalent irlandais resta en service jusqu’en 1947 comme chasseur puis jusqu’en 1956 comme avion d’instruction pour les futurs mécaniciens au sol.
Si pour beaucoup de gens le Spitfire fut « le chasseur » de la RAF durant le second conflit mondial, le Sea-Hurricane reste son équivalent immédiat dans la Royal Navy, et ce malgré l’apparition du Seafire. Les 1350 exemplaires assemblés attestent de la confiance que l’Amirauté avait en cette machine.
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