Entre la fin novembre 1939 et la mi-mars 1940 l’Union Soviétique tenta d’envahir et d’annexer la Finlande. On appela cette période de la Seconde Guerre mondiale la Guerre d’Hiver. L’Ilmavoimaat participa d’âpres combats contre les troupes de Staline grâce à un arsenal assez hétéroclite composé d’avions allemands comme les Heinkel He 115 et Klemm Kl 35 ou encore britanniques tels les Blackburn Ripon et Bristol Blenheim. Elle employa également quelques machines de facture indigène. Un des avionneurs étrangers les plus féconds pour la Finlande fut Fokker avec son chasseur monoplan D.XXI mais également un robuste biplan de reconnaissance armée : le C.X.
À la fin de l’année 1933 Fokker est non seulement le plus florissant des avionneurs néerlandais mais aussi un de ceux vendant le plus d’appareils en Europe. Ses avions et hydravions, tant civils que militaires rencontrent régulièrement le succès sur les marchés internationaux. Son biplan de reconnaissance C.V et ses dérivés directs C.VI et C.IX se sont très bien vendus mais voilà ces avions vieillissent par rapport aux exigences de l’époque. Anthony Fokker pousses ses équipes à y remédier d’autant que son monoplan parasol C.VIII n’a pas vraiment convaincu, même pas aux Pays-Bas.
Les équipes de designers et d’ingénieurs décident donc de revenir aux fondamentaux : biplan biplace en tandem doté d’un train classique. Le nouvel avion reçoit la désignation de Fokker C.X, son développement est lancé sur fonds propres.
Afin d’assurer la motorisation de son futur avion Fokker décide de passer deux accords industriels avec deux motoristes différents : Hispano en France et Rolls-Royce au Royaume-Uni. Le prototype de l’avion est d’ailleurs prévu pour recevoir un Hispano 12YCrs d’une puissance de 860 chevaux tandis que le premier exemplaire de présérie reçoit lui un Rolls-Royce Kestrel Mk-V de 850 chevaux. Ces deux moteurs à douze cylindres en V donnent au Fokker C.X un fort faux air de biplan Hawker.
Par ailleurs l’avion de reconnaissance néerlandais présentait un fuselage de construction mixte en tubes d’aciers et plaques de contreplaqué tandis que la voilure est assemblée en bois et feuilles d’aluminium. L’une des originalité de l’avion provient alors de son cockpit en tandem dont seule la partie avant, celle du pilote, dispose d’un cockpit semi-fermé. L’observateur demeure lui à l’air libre. L’armement se compose de deux mitrailleuses de calibre 7.92mm, l’une montée en position de chasse et la seconde sur affût mobile arrière servie par l’observateur. Des points d’ancrage sous le plan inférieur de voilure et en intrados de fuselage sont installés afin de permettre au C.X d’emporter jusqu’à 400 kilogrammes de bombes.
Le premier vol du prototype intervient en mars 1934. Quelques mois plus tard l’avion est convoyé par rail jusqu’à Paris afin d’être exposé au Grand Palais pour le désormais traditionnel salon aéronautique. Il y fait forte impression.
À cette occasion un accord industriel est passé entre Fokker et son concurrent britannique Airspeed qui se propose de construire sous licence le C.X sous la désignation A.S.22 Spaniel.
L’idée est alors de présenter cet avion dans le cadre de la Specification 23/33 relative à un biplace de reconnaissance armée destiné au remplacement du Westland Wapiti alors opérant au Moyen-Orient. L’Airspeed A.S.22 Spaniel est littéralement balayé par le Hawker Hardy qui gagne le contrat. On entendra plus jamais parler de la version britannique du C.X.
La première commande de l’avion est logiquement néerlandaise. La Koninklijk Nederlands Indisch Leger en charge des missions coloniales aux Indes Néerlandaises achète treize machines en décembre 1934. Elle est imité quelques mois plus tard par la Koninklijke Luchtmacht qui décide d’acquérir vingt exemplaires. Si les avions coloniaux sont bien tous livrés en juin 1937 avec le Rolls-Royce Kestrel Mk-V du contrat de développement les quinze premiers avions destinés aux missions métropolitaines reçoivent eux des Kestrel Mk-IIB de seulement 670 chevaux. Rolls-Royce connait en effet à cette époque une pénurie de main d’œuvre et ne peut pas fournir tous ses moteurs. Résultat les premiers Fokker C.X métropolitains ne peuvent pas remplir de missions avec charges de bombes. Il faudra attendre octobre 1938 et la livraison du dernier exemplaire commandé pour que les premiers soient renvoyés en ateliers pour voir leur motorisation modifiée selon les termes initiaux du contrat.
En avril 1936 la Finlande passe commande pour dix avions dont la principale caractéristique extérieure est de dispose d’un moteur à neuf cylindres en étoile Bristol Pegasus Mk-XXI de 835 chevaux en lieu et place des Hispano et Rolls-Royce d’origine. Leur armement est modifié, les mitrailleuses néerlandaises d’origine laissent la place à des Vickers britanniques. À Noël de la même année un contrat de production locale sous licence est signée avec VL qui s’engage à produire trente avions supplémentaires dans les mêmes caractéristiques que les avions commandés au printemps.
Les Fokker C.X participent activement à la Guerre d’Hiver assurant des missions de reconnaissance diurne et nocturne contre les forces soviétiques et même de temps en temps des missions d’attaque et de harcèlement contre celles-ci. Maniables et finalement assez rapide avec leur vitesse de croisière de 275 kilomètres heures les C.X peuvent facilement échapper aux Polikarpov I-16 de la chasse soviétique. Une fois le calme revenu VL termine le contrat de licence en assemblant en 1942 les cinq derniers avions. Cependant seuls quatre sortent des ateliers, le cinquième étant détruit dans un incendie d’origine criminelle.
De ce fait l’Ilmavoimaat n’alignera jamais plus de trente-neuf C.X.
Les Fokker C.X néerlandais affrontent, chacun dans leur région du globe, les forces de l’Axe : Allemagne nazie aux Pays-Bas et Japon aux Indes néerlandaises. Si les seconds sont rapidement surclassés par l’aviation nippone il en est autrement des avions basés en Hollande. Ils ont même l’occasion de frapper des colonnes de troupes allemandes.
Au moins trois d’entre eux réussissent à rejoindre la Grande Bretagne juste avant la capitulation néerlandaise. Ils y forment le noyau de l’aviation néerlandaise libre.
Aucun Fokker C.X néerlandais n’a survécu à la guerre. En revanche quelques exemplaires finlandais sont demeurés en service jusqu’en 1954. L’un d’entre eux est par la suite revendu à un collectionneur qui malheureusement s’est tué à bord lors d’un crash survenu à l’été 1958. Il s’agissait du dernier Fokker C.X encore en état de vol.
Avion mythique aux Pays-Bas où il symbolise une partie de la résistance de 1940 contre l’envahisseur hitlérien le Fokker C.X demeure aujourd’hui encore un des meilleurs avions d’arme néerlandais de l’entre-deux-guerres. Un exemplaire reconstruit à partir de plusieurs avions est aujourd’hui exposé dans le musée aéronautique Schipol.
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