Fletcher FD-25 Defender

Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale l’émergence de mouvements de guérillas assistés idéologiquement et subventionnés par l’URSS fit apparaitre un nouveau marché pour des avions d’appui tactique rapproché. L’avenir de ces avions s’annonçait radieux suite à l’apparition de conflits armés en Asie, à l’image de la guerre de Corée dirigée par les États-Unis ou encore de celle en Indochine contre la présence coloniale française. Plusieurs avionneurs se lancèrent alors dans le développements d’aéronefs de ce genre, avec plus ou moins de réussites. Une des machines les plus surprenantes à l’époque fut le Fletcher FD-25 Defender américain.

Au début des années 1950 la société Fletcher était un avionneur mineur aux États-Unis, surtout connu pour ses drones essayés par l’US Army Air Force et par l’US Navy durant la guerre du Pacifique. Elle essaya de rebondir en épousant les théories autour des avions d’appui tactique et d’attaque légère. Elle décida de lancer son FD-25 Defender.

Son idée fut de développer un avion léger étudié aussi bien en monoplace qu’en biplace. Dans un premier temps l’avionneur travailla sur une cellule et une voilure assemblées en acier et magnésium. L’idée était que le monoplace s’appelle FD-25 et le biplace en tandem FD-25A. Dans les deux cas la motorisation était articulée autour d’un six cylindres en ligne Continental E-225-8 de 225 chevaux actionnant une hélice bipale en métal. Afin de simplifier au maximum sa conception l’avion ne disposait d’aucun armement interne, et uniquement de charges installées sous voilure. Réservoirs de napalm, roquettes de 127 millimètres, nacelles de mitrailleuses, et autres bombes à fragmentation représentaient l’arsenal du Defender. Pour le reste l’avion ressemblait plus à un appareil d’aéroclub qu’à autre chose avec sa voilure basse cantilever à dièdre accentué et son train d’atterrissage classique fixe.

En juillet 1952, quelques semaines seulement après son premier vol le Fletcher FD-25B Defender fut officialisé comme version de série. Il s’agissait d’un monoplace. Trois exemplaires furent produits à la demande de l’US Department of Defense afin de répondre à divers essais comparatifs. Il intéressait en fait l’US Army comme avion d’observation armée mais ne réussit jamais ses tests. Le FD-25B Defender ne remplaça de ce fait jamais le très rustique Aeronca L-16. Les trois exemplaires furent finalement rendus à l’avionneur peu avant Noël 1952. Quelques semaines plus tard les responsables de l’avionneur prirent l’étonnante décision de confier les droits industriels et commerciaux de l’avion à une toute petite société japonaise appelée Toyo Aircraft. Il s’agissait en fait d’une branche de l’entreprise qui travaillait avec l’aval de l’administration alliée d’occupation du Japon. L’aluminium coûtant moins cher que le magnésium il le remplaça finalement dans les productions asiatiques à venir.

Fletcher avait en effet identifié l’Asie comme le marché porteur pour le FD-25 Defender. Expédier la chaîne d’assemblage de cet avion anti-guérilla au Japon permettait de dégager de la place pour son best seller en devenir : le FU-24 de travail agricole. Et contre toutes attentes Toyo enregistra une commande de la Royal Cambodian Air Force pour neuf avions en deux lots. Il s’agissait d’un pour cinq monoplaces destinés à l’attaque au sol et quatre pour des biplaces en tandem d’observation et de transformation opérationnelle. Les forces cambodgiennes conservèrent ces appareils de 1954 à 1972 et les employèrent notamment lors d’accrochages frontaliers avec la Thaïlande. À cette occasion au moins deux d’entre eux furent perdus du fait de la DCA adverse. En 1956 c’est la Republic of Vietnam Air Force qui fit l’acquisition de cinq avions de ce type pour des soutiens aux opérations spéciales. Quatre étaient des monoplaces et le dernier un biplace. Le sort final de ces avions est inconnu, tout juste sait-on qu’ils ont été un temps utilisés par des pilotes américains appartenant à la CIA. Le Sud-Vietnam n’a sans doute jamais armer ses FD-25 Defender, préférant les employer pour de la surveillance et de l’observation.

Au final donc la carrière de ce monomoteur a été chaotique, un peu à l’image de sa conception et surtout de sa commercialisation. Aujourd’hui au moins un Fletcher FD-25 Defender vole encore aux États-Unis lors de meetings aériens. Immatriculé N240FD il porte une élégante livrée noire et se produit régulièrement dans les rassemblements de L-birds et de warbirds où il passe plutôt inaperçu.