Face à la menace sans cesse renouvelée de la toute puissante Marine Impériale japonaise, l’US Navy basait une partie de sa doctrine d’emploi de l’arme aérienne sur les bombardiers-torpilleurs embarqués, et principalement sur le Grumman TBM Avenger, un monomoteur puissant mais toutefois facilement interceptable. Afin de compenser ces carences, l’US Department of War décida d’acquérir un nouvel avion, mais la fin des hostilités en décida autrement, et c’est ainsi que la marine américaine faillit utiliser l’un des plus puissants, si ce n’est le plus puissant bombardier torpilleur de tous les temps : le Douglas TB2D Skypirate.
Si les pertes enregistrées par les unités volant sur Grumman TBF Avenger dans la Guerre du Pacifique ne furent pas catastrophiques, c’est en partie du fait de leur protection quasi-permanente par les chasseurs embarqués de l’USNavy et des Marines, principalement des Grumman F6F et des Vought F4U. La mise au point par le Japon de nouveaux chasseurs-bombardiers impliquait que la marine des États-Unis reporte ses chasseurs sur la protection des navires mais aussi sur les bombardiers stratégiques de l’US Army Air Force. À cette fin, l’US Navy chargea en octobre 1943 l’avionneur Douglas de concevoir rapidement un nouveau torpilleur qui devait avoir la double capacité d’autoprotection et de vitesse, en plus de ses capacités de vol à basse altitude et de précision, inhérentes à sa mission si particulière de lutte anti-navire et anti-sous-marine.
Les ingénieurs américains travaillèrent donc dans l’urgence et s’inspirèrent en grande partie du Douglas A-26 Invader, tout en modifiant celui-ci en le faisant passer rien moins que de bimoteur à monomoteur. L’envergure des ailes fut, elle aussi, accrue. Son train d’atterrissage fut modifié, et on installa un nouvel empennage monobloc de grande taille rectangulaire. Afin de le rendre apte aux opérations sur les porte-avions américains, le prototype fut doté d’un nouveau type de crosse d’appontage. Le cockpit fut prévu pour un équipage de trois personnes, dont un responsable de torpillage. La soute à armement fut modifiée afin de permettre l’emport interne de deux torpilles de 900 kilos chacune, tandis que des points d’ancrage furent installés sous les ailes. Mais l’une des grandes nouveauté provenait du très puissant moteur Pratt & Whitney à hélices contra-rotative de 3350 chevaux.L’appareil fut désigné TB2D par l’US Navy qui le désigna également Skypirate. De son côté le constructeur baptisa son appareil Devastator II en référence au TBD Devastator des années 1930. Le premier prototype effectua son vol inaugural en janvier 1945.
Les premiers essais en vol démontrèrent toutes les qualités de l’appareil, qui réussissait à emporter une charge quatre fois supérieur à l’appareil qu’il était chargé de remplacer, tout en étant plus grand, mais également plus rapide que la plupart des bombardiers terrestres moyens bimoteurs de l’US Army Air Force, comme le Martin B-26 Marauder. Le Skypirate était en fait à ce moment précis, le plus gros monomoteur construit au monde. Lors de ses premiers essais d’appontage le TB2D était même le plus gros avion embarqué au monde !
La fin des hostilités en Europe, au lendemain du 8 mai 1945, fit que les États-Unis et leurs alliés concentrèrent leurs efforts sur le Japon visant désormais sur son effondrement total. Malgré son isolement de plus en plus criant, l’empire nippon continuait à disposer de sa puissante flotte de guerre qui faisait peser une menace constante sur les îles occupées par les Marines et les troupes du Commonwealth britannique, ainsi que sur les bâtiments de l’US Navy. La nécessité de faire entrer en service le TB2D Skypirate devenait de plus en plus pressante. L’US Navy décida en juin 1945 de commander 450 exemplaires du bombardier torpilleur à Douglas. L’avionneur devait confier une partie de la production de ceux-ci à Lockheed et à Cessna.
Toutefois la fin de la Seconde Guerre mondiale arriva plus vite que les responsables de Douglas ne l’avaient espérée. Une baisse drastique des budgets alloués aux forces armées américaines s’en suivit. L’aéronavale américaine décida en septembre 1945 de stopper définitivement le programme du TB2D et annula les commandes. Seuls les deux prototypes furent donc assemblés.
L’abandon du Douglas TB2D Skypirate marqua aussi le glas pour les torpilleurs monomoteurs à pistons dans l’US Navy, puisque le réacteur avait fait son apparition et que le turbopropulseur était en plein développement. Il fallut attendre le Grumman S-2 Tracker de patrouille maritime embarqué pour trouver un avion d’arme embarqué aussi lourd pour la mission de lutte anti-sous-marine.
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