L’une des particularités de l’avionneur De Havilland c’est d’avoir su ouvrir des subdivisions à l’étranger. Les pays choisis étaient d’anciennes colonies de l’empire britannique. La plus célèbre d’entre elles fut bien évidemment De Havilland Canada à qui on doit des machines aussi mythiques que l’avion de brousse DHC-2 Beaver, le transport tactique DHC-4 Caribou, ou encore le transport léger DHC-6 Twin Otter. Pourtant peu avant cet avionneur De Havilland inaugura une branche en Océanie : De Havilland Australia. Spécialisée dans la production locale d’avions britanniques cette société sut également développer quelques très rares machines. La plus réussie fut sans nul doute l’avion de transport léger DHA-3 Drover.
Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale l’avionneur De Havilland Australia chercha à développer son propre avion de transport léger. Fort de ses succès dans l’assemblage des avions d’entraînement D.H.82 Tiger Moth et des chasseurs-bombardiers D.H.98 Mosquito les responsables de l’entreprise demandèrent à la maison-mère britannique l’autorisation de développer un tel avion. Il faut dire qu’à l’époque De Havilland Australia ne jouissait pas de la même liberté que son homologue canadien. Tous les projets devaient être validés en Grande Bretagne. En fait les Britanniques ne voulaient pas revivre le cauchemar du développement du planeur d’assaut G-1/G-2 voulu par les Australiens et au coût faramineux.
L’avant-projet pour un bimoteur de brousse présenté à la mi-1946 fut rejeté car jugé trop ambitieux pour les capacités d’ingénierie en Australie. Un bras de fer s’engagea entre les deux entités : la maison-mère et la branche.
Finalement un accord fut trouvé à la fin de l’année 1946. De Havilland Australia allait avoir l’autorisation d’assembler une version trimoteur du D.H.104 Dove réservé au seul marché local. L’avion ne pourrait pas être vendu ailleurs qu’en Australie.
Le futur avion reçut la désignation de DHA-3 et le nom de baptême de Drover.
Le prototype du DHA-3 Drover fut assemblé à partir d’éléments d’un Dove fournis depuis le Royaume-Uni. La voilure et l’empennage furent retravaillés, ainsi que le nez de l’avion. Pour la motorisation De Havilland Australia eut l’obligation d’avoir recours à des moteurs De Havilland Gipsy Major Mk-II d’une puissance unitaire de 120 chevaux actionnant chacun une hélice bipale en métal et bois. Le poste de pilotage fut repensé pour un seul pilote tandis que la cabine pouvait accueillir huit passagers ou 925kg de fret léger. Pour le reste l’avion était assez moderne avec son train d’atterrissage classique escamotable et son usinage totalement métallique.
C’est dans cette configuration que le premier vol intervint le 23 janvier 1948.
Les vols d’essais mirent en lumière plusieurs défauts majeurs sur l’avion. Dans le même temps le second prototype vola pour la première fois le 12 décembre 1949. Et celui-ci prenait en compte les critiques des ingénieurs et pilotes d’essais. Le plus marquant était le fait que désormais le train d’atterrissage restait fixe, dégradant ainsi l’aérodynamique de la machine. À la même époque le De Havilland Australia DHA-3 Drover fut présenté à la Royal Australian Air Force qui recherchait alors un avion de soutien afin de remplacer ses bimoteurs légers Airspeed Oxford hérités de la guerre. L’avion de facture indigène ne fut pas retenu par les militaires.
Deux versions étaient proposés à la vente : le Drover Mk-1 et le Drover Mk-2. Ils différenciaient principalement par de menues écarts entre empennage, voilure, et fuselage. Bien que le premier avion arrive en service civil en 1949 il fallut attendre l’année suivante pour que l’appareil connaisse son client le plus emblématique : le Royal Flying Doctor Service.
Le RFDS est une organisation parapublique qui assure aussi bien des évacuations sanitaires aéroportées que le transport de personnels de soin vers les communes les plus reculées du territoire australien. Ils y remplacèrent les biplans monomoteurs De Havilland D.H.83 Fox Moth achetés avant-guerre.
Pour le Royal Flying Doctor Service le DHA-3 Drover s’avéra rapidement être un avion idéal. Compact, rustique, et surtout peu gourmand en carburant il pouvait facilement assurer les missions de transport de malades, voire de futures mamans.
En parallèle De Havilland Australia avait reçu l’autorisation de vendre l’avion à l’étranger, auprès de clients voisins. Quelques rares avions furent ainsi immatriculés en France et en Nouvelle-Zélande. C’est bien entendu aux Nouvelles-Hébrides et en Polynésie que volèrent les deux trimoteurs australiens achetés par une compagnie française. Ils ne virent jamais la métropole.
Bien que robuste le DHA-3 Drover connaissait un mal récurrent : les pannes de moteurs à répétition. En fait il apparut rapidement que les moteurs Gipsy Major Mk-II étaient inadaptés à cet avion. Une remotorisation eut lieu sous la forme du Drover Mk-3 équipé de Lycoming O-360-A à quatre cylindre en ligne de 180 chevaux actionnant chacun une hélice bipale en métal. Ces moteurs américains se révélèrent bien vite beaucoup plus adaptés à l’avion.
Pour autant le succès ne fut jamais au rendez-vous pour le De Havilland Australia DHA-3 Drover. Vingt machines seulement furent assemblés entre 1948 et 1957. L’avionneur conserva une chaîne de transformation des Drover Mk-1 et Mk-2 en Drover Mk-3.
Aucun client militaire ne l’acheta. Après la RAAF c’est la Royal New Zealand Air Force et la Royal Australian Navy qui refusèrent cet avion de transport léger.
De nos jours au moins deux De Havilland Australia DHA-3 Drover demeure en état de vol, participant régulièrement à des meetings aériens en Australie et en Nouvelle-Zélande. À l’image du Northrop YC-125 Raider le Drover fut un des rares trimoteurs conçu après la Seconde Guerre mondiale, une architecture jugée alors anachronique.
Le Drover est le seul avion De Havilland Australia réellement construit en série.
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