Dassault MD.453 Mystère III

Le radar aéroporté et la propulsion par réacteur sont apparus tous deux durant la Seconde Guerre mondiale avec des appareils comme le De Havilland Mosquito NF Mk-XV ou le Heinkel He 219A-7 Uhu dans le premier cas et le Bell P-59 Airacomet ou le Messerschmitt Me 262 Schwalbe dans le second. Il semblait donc logique qu’une fois la paix planétaire revenue les deux technologies soient réunies. C’est ainsi que naquirent les jets de chasse nocturne. Bien souvent il s’agissait en fait de chasseurs diurnes sur lesquels on greffa un radar pourtant dès la fin des années 1940 et encore plus au début de la décennie suivante de premiers avions de ce type furent ab initio. En France l’un des premiers exemples fut le Dassault MD.453 Mystère III.

C’est en février 1950 que Marcel Dassault reçut mandat de l’Armée de l’Air afin de développer un chasseur biplace en tandem dérivé de son MD.450 Ouragan et dédié à la chasse de nuit. L’ingénieur et homme d’affaire français choisit alors de désigner son avion MD.451 Aladin. Le radar devant être installé dans le nez ses équipes durent totalement redessiner l’appareil et ils choisirent de prélever sur les chaînes d’assemblage l’Ouragan numéro 11. L’avion fut renvoyé en atelier à Argenteuil, alors en Seine-et-Oise.

Les designers et ingénieurs de la société Dassault avaient un challenge à relever : créer de nouvelles entrées d’air latérales afin de dégager le nez occupé par le dit radar. Seul hic dans leur conception celui-ci était inconnu. Des modèles existaient bien aux États-Unis et en Grande Bretagne mais pas encore à l’époque en France. Malgré des travaux alors entrepris par la CFTH (la Compagnie Française pour l’exploitation des procédés Thomson-Houston) et par la CSF (la Compagnie générale de télégraphie Sans Fil) rien ne semblait disponible. Dans le même temps l’Armée de l’Air se rendit compte que si le MD.450 Ouragan était un excellent chasseur de jour il pourrait poser problème comme chasseur de nuit. Le programme du MD.451 Aladin fut donc amendé afin de donner naissance au MD.453.

Le 18 juillet 1951 cet avion devint donc le nouveau prototype de chasseur nocturne. Par rapport au MD.451 le MD.453 disposait d’évolutions comme la voilure en flèche du chasseur MD.452 Mystère II. Le nouvel avion reçut logiquement la désignation de Mystère III. Et cette fois devant l’incapacité des CFTH et CSF à fournir un radar français les ingénieurs de chez Dassault se tournèrent vers les Américains et les Britanniques. Deux radars furent essayés. Il s’agissait dans un premier temps de l’AN/APG-33 qui équipa notamment les Northrop F-89B Scorpion et Lockheed F-94C Starfire de l’US Air Force. Dans un second c’est l’AI Mk-17 alors emporté par les Gloster Javelin FAW Mk-7 de la Royal Air Force.

Un an jour pour jour après la transformation du programme MD.451 en MD.453 le Mystère III réalisait son premier vol. L’avion n’emportait alors aucun radar mais une masse inerte en lieu et place. Kosta Rozanoff était aux commande du prototype. À l’époque les mécaniciens de l’avionneur avaient eu l’idée d’inscrire la mention «Mystère de nuit» sur le nez de l’avion. Il venait de trouver son surnom. Ni l’AN/APG-33 américain ni l’AI Mk-17 britannique ne réussirent à s’insérer correctement dans le Mystère III. Aussi en décembre 1953 après un total de cent quarante-six vols d’essais le programme fut abandonné. Les deux avions de présérie un temps envisagés ne furent jamais produits.

Après l’arrêt de son développement et toujours sans le moindre radar le Dassault MD.453 Mystère III fut versé au Centre d’Essais en Vol où il servit durant plusieurs années comme avion de soutien. Il permit notamment de tester les fameux sièges éjectables E96 conçus par la SNCASO pour le… SO.4050 Vautour IIN. Il s’agit là du premier véritable jet de chasse nocturne conçu et réalisé en France à être entré en service dans l’Armée de l’Air. La boucle était donc bouclée pour le «Mystère de nuit».
Par la suite ce prototype fut envoyé à la ferraille. Il s’agissait du premier véritable «pointu» de l’industrie aéronautique française.