Dès les années 1960 et l’émergence du chasseur supersonique Mirage III le Générale Aéronautique Marcel Dassault se fit une spécialité de développer des versions adaptées à chaque mission de ses avions. La reconnaissance photographique à caractère tactique en fit partie. Après le succès du Mirage IIIR il devint évident que le chasseur bombardier Mirage 5 devrait être lui aussi adapté à ce genre de rôle. C’est ainsi que naquit à la fin de cette décennie le Dassault-Breguet Mirage 5R.
Quand en 1965 Israël passe commande auprès de Dassault pour cinquante chasseurs Mirage 5J le cahier des charges prévoit que l’avion emporte un équipement de reconnaissance. Le choix se porte alors sur une caméra OMERA60 de focale 75 millimètres orientée sur le côté gauche du monoréacteur. Le blocage des avions deux ans plus tard suite à l’embargo décidé par le Président de la République Charles de Gaulle n’y change finalement rien. Pris en compte par l’Armée de l’Air et renommés Mirage 5F ces avions ont conservé l’équipement de prises de vues.
Aussi dès 1967 l’avionneur clodoaldien décide de proposer une version de reconnaissance de son Mirage 5, sous la désignation de Mirage 5R. Doté d’un nez redessiné qui accueille cinq caméras il possède en outre une suite d’avionique axée autour d’un radar à effets doppler et du détecteur infrarouge Cyclope. Il conserve le châssis de deux canons DEFA 552 de calibre 30 millimètres alimentés chacun à 125 obus permettant à ces appareils d’assurer leur autodéfense. Mirage 5R ne sera finalement jamais autre chose qu’un nom commercial.
Le premier client de cette version est en 1968 la Force Aérienne Belge qui en plus de ses soixante-trois Mirage 5BA (pour Belgique Attaque) choisit d’acquérir vingt-sept Mirage 5BR (pour Belgique Reconnaissance) en vue de remplacer les Republic RF-84F Thunderflash de la 42e Escadrille. Comme les versions de chasse ils seront eux aussi assemblés localement. C’est la SABCA qui contractuellement assure cette fonction. Les caméras choisies par la Belgique sont fabriquées par le société britannique Vinten. Entrés en service à partir de 1971 les Mirage 5BR participent à plusieurs missions tactiques pour le compte de l’OTAN, notamment le long de la frontière entre les deux Allemagne. Ces avions, ainsi que les pilotes belges jouissent alors d’une très bonne réputation auprès des Alliés. Ils sont finalement retirés du service en 1994, une fois la guerre froide terminée et l’utilité d’un avion de reconnaissance tactique bien moindre en Belgique.
Quatre Mirage 5BR ont cependant été revendu en 1995 à la Fuerza Aérea de Chile qui les a utilisé jusqu’en 2010, en fait surtout pour des missions frontalière le long de la cordillère des Andes.
Après la Belgique c’est la Colombie qui choisit en 1970 d’acquérir deux avions désignés Mirage 5COR (pour COlombie Reconnaissance) et livrés à partir de 1972. C’est l’Escuadron 212 de la Fuerza Aérea Colombiana qui les mettra en œuvre, principalement pour des missions de reconnaissance frontalière. Doté de cinq caméras OMERA 33 dans le nez ils n’ont jamais été engagés au combat et quittent finalement le service actif en 2002.
Cette même année 1970 la société Dassault-Breguet enregistre sa deuxième plus grosse commande de Mirage 5R. La Libye achète dix avions assez différents baptisés Mirage 5DR (pour Décembre Reconnaissance) dotés des mêmes cinq caméras OMERA 33 que les avions colombiens mais aussi d’une caméra panoramique OMERA AA6-40… en lieu et place d’un réservoir de carburant. Le sort exact de ces avions est mal connu. Ce qui est sûr c’est qu’en 2010 plus aucun ne volait en Libye. Le mot Décembre dans sa désignation marque simplement le mois de signature du contrat entre Paris et Tripoli.
Deux ans après les contrats colombiens et libyens c’est l’émirat d’Abou Dhabi (aujourd’hui partie intégrante des Émirats Arabes Unis) qui concrétise son contrat pour douze intercepteurs Mirage 5AD avec trois Mirage 5RAD. Ces lettres signifient Reconnaissance Abou Dhabi. Conservant le radar à effet doppler et le détecteur infrarouge Cyrano tous deux de série ainsi que les cinq caméras OMERA 33 de facture française ces avions reçoivent en outre une caméra oblique OMERA AP61 installée sur le flanc gauche. Un an seulement après la signature du contrat, en 1973 donc, l’Abu Dhabi Air Wing disparait au profit de la jeune United Arab Emirates Air Force. En 1985 ils sont finalement remplacés par les huit Dassault Aviation Mirage 2000RAD, les seuls et uniques avions de reconnaissance conçus à partir de ce delta de nouvelle génération !
Le constructeur français devra alors attendre dix ans avant de pouvoir de nouveau vendre son Mirage 5R. Abou Dhabi avait acheté ses avions en 1972 l’Egypte en fait de même en 1982. Financés par l’Arabie Saoudite et désignés Mirage 5SDR (pour SauDi Reconnaissance) ils emportent cinq caméra OMERA 35-1, une caméra oblique OMERA AP61 orienté à gauche, et le détecteur infrarouge Super Cyclope conçu pour le Mirage F1. Fin 2023 l’Égypte est le dernier pays à faire encore voler de manière opérationnelle le Mirage 5R. En 2005 l’Egypte a racheté deux Mirage 5RAD pour cannibalisation. Aujourd’hui ces avions de reconnaissance tactique sont totalement obsolètes. Leur remplacement n’est cependant pas à l’ordre du jour.
Malgré ses qualités indéniables le Dassault-Breguet Mirage 5R a été boudé par plusieurs clients du Mirage 5 comme le Gabon, le Pérou, ou encore le Zaïre. Version dérivé de ce chasseur le Mirage 50 ne connut pas spécifiquement de version de reconnaissance même s’il pouvait de série emporter une caméra oblique OMERA AP61 sur flanc gauche. De nos jours on retrouve des Mirage 5BR en exposition au musée du 1er Wing et au musée Spitfire tous deux sis en Belgique ainsi qu’au Museo Nacional Aeronautico de Santiago du Chili.
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