Constructeur majeur de l’aviation civile américaine durant l’entre-deux-guerres l’industriel Stinson marqua son temps par ses avions simples et robustes. Majoritairement il s’agissait de monomoteurs, à l’exception de son très réussi trimoteur SM-6000 Airliner, et beaucoup connurent une brillante carrière. Pourtant comme à d’autres la Seconde Guerre mondiale lui fut fatale et dès 1945 sa disparition fut actée et ses actifs partagés entre les avionneurs Convair et Piper. Et le premier d’entre-eux récupéra notamment un avion militaire particulièrement réussi : le L-13 Grasshopper.
Les origines de cet avion remontent à la Seconde Guerre mondiale et plus particulièrement le tout début de l’année 1944. Elles reflétaient alors la volonté de l’US Army Air Force de disposer d’un nouvel avion de liaisons et d’observation permettant de remplacer les très réussis Aeronca L-3 et Piper L-4. Malgré toutes leurs qualités ces deux avions étaient jugés trop aisés à abattre par les DCA allemandes et japonaises. Et l’avionneur Stinson fut chargé de développer un tel avion.
Le cahier des charges prévoyait outre son moteur de 250 chevaux que l’avion puisse être tracté à l’arrière d’un camion voire d’une jeep, une fois les ailes repliées.
Les généraux américains espéraient aussi avec ce futur avion puisse permettre d’envoyer à la retraite ou de rendre à la vie civile les Bellanca L-11, Monocoupe L-7, Ryan L-10, et Stinson L-9. Ces quatre modèles représentaient à peine une trentaine d’avions au total, et avaient été pour la plus part réquisitionnés à un moment ou un autre du déroulement de la guerre. Leur utilité était souvent assez limitée.
Et les ingénieurs de Stinson travaillèrent assez vite, avec le concours des équipes du motoriste Franklin. Si bien qu’en janvier 1945 le prototype vola sous la désignation de Stinson XL-13.
Extérieurement l’avion reprenait les grandes lignes des autres avions de liaisons et d’observation en service aux États-Unis. Son aile haute, son train d’atterrissage classique fixe, son moteur en ligne O-425-6 actionnant une hélice bipale, ainsi que son poste de pilotage et sa cabine largement vitrés étaient très répandus sur ces avions. Par contre sa poutre de queue affinée ou encore son usinage entièrement en métal l’étaient beaucoup moins. En sommes le XL-13 était innovant dans la continuité.
Un second prototype vola en mars de la même année mais la fin des hostilités en Europe quelques semaines plus tard allait rebattre les cartes. Désormais l’US Army Air Force n’avait plus de besoin de 2200 à 2500 nouveaux avions de liaisons et d’observation. Pis l’attaque atomique contre le Japon et la fin de la guerre qui en découla faillit tué dans l’œuf le programme de Stinson.
Fort heureusement quelques généraux américains firent pression pour que le programme du XL-13 aille à son terme. Si bien qu’en décembre 1945 une commande fut officiellement passée pour 300 exemplaires de série sous la désignation L-13A. Comme d’autres avions de la «famille» avant lui il reçut le patronyme commun de Grasshopper.
Les premiers exemplaires de série entrèrent en service en octobre 1947. L’avion plut dès le départ à ses pilotes en raison de son excellent rapport entre masse et puissance du moteur. De l’avis général c’était un monomoteur facile à pilote et pardonnant beaucoup les éventuelles erreurs de pilotage.
Particularité notable : à partir de janvier 1948 ils furent livrés comme Convair L-13 Grasshopper. Le découpage de Stinson avait commencé. L’US Navy s’intéressa un moment à l’avion et un exemplaire lui fut transféré en août 1948 sous la désignation de XO1Y. Il s’agissait pour elle de trouver un successeur aux OY Sentinel alors en sa dotation et en celle de l’US Marines Corps mais le nouveau monomoteur se révéla assez peu adapté lors des simulations d’appontage réalisés à NAS Patuxent River. L’avion retourna dans l’US Air Force début 1949.
Il est à noté que c’est à la même époque que l’aviation américaine demanda à Convair de modifier un lot de vingt-huit avions en hydravions à flotteurs. Ils reçurent la désignation de L-13B. Le cahier des charges prévoyait que ces appareils puissent échanger leurs deux flotteurs contre des skis en cas de besoin. Ils avaient été conçu afin de pouvoir servir en Alaska.
Lorsque la guerre de Corée éclata en juin 1950 le Convair L-13A Grasshopper était l’un des deux principaux avions de liaisons et d’observation en service dans l’US Air Force. Le second était l’Aeronca L-16 Champion moins puissant et d’une architecture plus classique. En juillet 1950 l’US Army fit pression pour obtenir un certain nombre d’avions de liaisons et d’observation. La chaîne d’assemblage du L-13A étant fermé il fut décidé de saisir une quarantaine d’exemplaires sur les stocks existant et de les rétrocéder. Ces avions étaient destinés à servir aussi bien en Corée qu’au États-Unis.
Lors de ce conflit les Convair L-13 Grasshopper furent employés aussi bien pour transporter des officiers supérieurs que pour assurer la distribution du courrier au plus près des lignes ennemies. Ils observaient le champ de bataille et comme aux premières heures de l’aviation militaires ils réglaient les tirs de l’artillerie alliée. Une des missions moins connus de ces monomoteurs fut l’évacuation sanitaire. Une cinquantaine de L-13A fut repeinte spécialement d’une croix-rouge et adaptée au transport d’un blessé sur civière en lieu et place de l’observateur.
Lorsque la guerre de Corée prit fin à l’été 1953 un total de quarante-six Convair L-13 Grasshopper avait été perdu. Dans la majorité des cas le pilote ou l’équipage avait été tué ou capturé. Pourtant l’avion avait plutôt bonne réputation. Sa conception 100% métallique et sa puissante motorisation en faisaient un avion résistant bien à la DCA ennemie. Même criblé d’impacts de balles un L-13A pouvait souvent rentrer à sa base. Dès son retour au pays l’avion fut massivement versé aux unités de l’Air National Guard.
Aussi beaucoup furent surpris quand l’US Air Force décida en 1958 de (déjà) le retirer du service. Dans les pures missions de liaisons il fut remplacé principalement par le Ryan L-17 Navion tandis que dans celles d’observation et de réglage des tirs d’artillerie ce fut le fameux Cessna L-19 Bird Dog qui remplit ce rôle. Ce légendaire avion l’avait d’ailleurs surpassé en Corée, à bien des égards.
Jamais exporté le Convair L-13 Grasshopper fut souvent reconstruit après-guerre par divers industriels américains dans des modèles civils sur lesquels la motorisation fut modifiée. C’est ainsi que naquirent les avions de brousse Acme Centaur et Caribbean Traders Husky qui firent le bonheur de pilotes américains et canadiens des années 1950 aux années 1990. Plusieurs L-13 sont aujourd’hui préservés et exposés dans des musées aéronautiques américains.
Bien que moins innovant que le Boeing YL-15 Scout le Convair L-13 Grasshopper sut se démarquer de ses contemporains par son architecture et sa motorisation.
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