Durant la Seconde Guerre mondiale le besoin de formation de nouveaux pilotes était énorme dans toutes les forces, que ce soit les Alliés autant que l’Axe. L’Italie fasciste n’y faisait pas exception. Comme la majorité des autres forces aériennes sa Regia Aeronautica fit appel à des biplans pour l’entraînement de base de ses pilotes. Son avion standard était le petit monomoteur Caproni Ca.100.
Au début du printemps 1926 l’avionneur italien Caproni chercha à obtenir une licence de production de l’avion d’entraînement civil et de tourisme De Havilland D.H.60 Moth. Son objectif était de le convertir dans un but militaire. Malgré les bonnes relations existant alors entre la Grande Bretagne et l’Italie les négociations n’aboutirent jamais. Finalement Caproni dut se résoudre à acheter deux avions auprès des Britanniques.
Chez De Havilland personne ne doutait du fait que les Italiens allaient le copier.
Et cela ne tarda pas puisque sur les deux avions furent immédiatement disséquer dès leur arrivée sur le sol italien en décembre 1926. Le premier servit exclusivement pour des vols d’essais tandis que le second était démonté pièce par pièce. Caproni découvrait les joies de la copie illégale alors même qu’il s’agissait d’un des avionneurs les plus respectés de son temps. En parallèle une équipe d’ingénieurs commença à étudier plusieurs motorisations possibles : Blackburn Cirrus Minor de 90 chevaux, Colombo S.63 de 145 chevaux, De Havilland Gipsy de 85 chevaux, ou encore Fiat A.50 de 85 chevaux. Et rapidement l’évidence leur sauta aux yeux. Seul De Havilland pouvait propulser leur copie du DH.60 Moth.
Non sans un certain culot les Italiens passèrent alors un accord avec l’entreprise britannique. Mais pour cela ses dirigeants voulaient d’abord voir à quoi ressemblait le nouvel avion. Était-ce vraiment une copie pure et dure ou bien un avion dérivé. Et ils ne furent pas déçu.
Désigné Caproni Ca.100 l’appareil ressemblaient encore beaucoup à son original mais avec de très grosses différences. À commencer par la voilure. Si le Ca.100 demeurait un biplan il était désormais d’envergure inégale inversée. C’est à dire que le plan inférieur de voilure était plus large que le plan supérieur, 10.00 mètres contre 8.35 mètres. Habituellement c’était l’inverse. Le train d’atterrissage avait également été redessiné tout comme le poste de pilotage à l’air libre.
Finalement début 1928 un accord fut signé entre Caproni comme maître d’œuvre de l’avion et De Havilland comme motoriste pour un total de 250 Gipsy Mk-I. Tout était rentré dans l’ordre.
C’est dans cette configuration donc que l’avion vola pour la première fois à l’été 1928. La jeune Regia Aeronautica n’a alors que cinq ans mais elle est déjà puissante dans l’Italie de Mussolini. Or en 1929 elle décide de faire du Caproni Ca.100 son principal avion d’entraînement. Elle en commande 250 exemplaires. L’accord avec De Havilland est revu à a hausse et finalement c’est 500 moteurs Gipsy Mk-I qui sont livrés entre 1928 et 1933. Très vite les jeunes pilotes italiens autant que leurs instructeurs découvrent cet avion agréable à piloter, qui pardonne beaucoup d’erreurs, et permet même d’exécuter des figures de voltige aérienne. Le Ca.100 devient même la coqueluche des meetings aériens italiens.
En 1930 Caproni et Macchi étudient conjointement une version hydravion à flotteurs sous la désignation Ca.100 Idro. Construite à une demi-douzaine d’exemplaires elle est vendue uniquement en Italie et permet l’année suivante de battre un record du monde pour hydravion à flotteur en atteignant l’altitude de 5018 mètres. Les pilotes aux commandes s’appellent Antonini et Trevisan. Fort de ce succès l’hydravion est vendu à trente exemplaires supplémentaires auprès de la Regia Marina, la marine de guerre italienne. Au début de la Seconde Guerre mondiale certains exemplaires furent dotés d’un moteur en étoile Farina T58 et affecté à des missions de surveillance portuaire.
Autre version dérivée qui apparut à la même époque : le Ca.113. Caproni la développa à la demande expresse du gouvernement bulgare qui réclamait un avion d’entraînement civil et militaire. Quelques aménagements furent réalisés au niveau de la voilure et du fuselage afin d’accueillir le moteur en étoile Piaggio Stella P.VII de 370 chevaux. Énorme gain de puissance entre le Ca.100 d’origine et ce Ca.113, c’est pourquoi le fuselage fut renforcé.
Deux avions furent cependant construits avec un moteur différent : un Walter Castor II tchécoslovaque de 240 chevaux. Ils furent utilisés pour divers vols de représentation par les pilotes d’essais italiens Mario de Bernardi et Renato Donati. Ce dernier fit même entrer le Caproni Ca.113 dans l’Histoire en s’octroyant à ses commandes un record du monde d’altitude toutes catégories confondues. Le 11 avril 1934 il atteignit 14433 mètres.
Outre ces deux pilotes d’essais la célèbre aviatrice italienne Carina Negrone établit le record d’altitude féminine jusque là détenue par Maryse Hilsz. En volant à bord de son Caproni Ca.113 jusqu’à l’altitude de 12043 mètres elle pulvérisa le record de la Française de 754 mètres. Nous étions alors le 20 juin 1935. Elle réalisa par la suite plusieurs autres vols records, sans jamais dépasser cette altitude. Negrone conserva son Ca.113 jusque dans les années 1950.
À la même époque le Caproni Ca.113 fut sélectionné comme avion de formation initiale par les forces aériennes bulgares. Outre deux avions de présérie un total de 105 exemplaires fut produit localement dans une usine appartenant à l’avionneur italien.
Dans les forces bulgares le Ca.113 était connu comme KB Chuchuliga. Il servit de 1935 à 1945. Plusieurs exemplaires furent utilisés durant la Seconde Guerre mondiale pour des missions de liaisons aériennes.
Outre le Ca.113 un lot de vingt-cinq Ca.100 fut vendu à l’export au Pérou. Ils y volèrent jusqu’au début des années 1950. Deux pays testèrent également le biplan italien mais sans succès : l’Autriche et le Portugal. Chacun acheta un avion mais sans jamais en commander plus. Enfin l’aviation franquiste reçut gracieusement une dizaine de Ca.100 après l’intervention italienne. Ils furent conservés par l’Ejercito del Aire jusqu’au milieu des années 1940.
Durant la Seconde Guerre mondiale l’Italie et la Grande Bretagne se trouvaient chacun dans un camp. Du coup les livraisons de moteurs De Havilland Gipsy devinrent impossibles. Aussi beaucoup de Caproni Ca.100 durent être modifiés. Ils reçurent des moteurs Isotta-Fraschini Asso 80R de facture italienne légèrement plus puissant puisque développant 115 chevaux.
Lorsque la Seconde Guerre prit fin en Europe au printemps 1945 environ cent cinquante Ca.100 volaient encore sous cocarde italienne. Plusieurs d’entre-eux avaient même conservés leurs Gipsy Mk-I d’origine.
Au moins deux avions furent saisis par les forces alliées, dont un rapatrié auprès de la Royal Air Force en Angleterre.
Aujourd’hui quelques Caproni Ca.100 demeurent en état de vol dont un hydravion à flotteurs. D’autres exemplaires, ainsi qu’un Ca.113, sont préservés dans différents musées italiens dont bien entendu celui de Vigna di Valle.
On considère que ce biplan a été construit à un peu plus de 820 exemplaires, y compris les Ca.113. Le Caproni Ca.100 a donné naissance au Ca.164 bien plus moderne.
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