Si le 20e siècle fut sans conteste possible celui des avions le 21e sera (ou est déjà) celui des drones. Les aéronefs télépilotés sont désormais omniprésents dans les forces aériennes, aéronavales, et terrestres. Ils y remplissent des missions très diverses allant de la surveillance urbaine à l’appui tactique rapproché en passant par le réglage des tirs d’artilleries ou bien évidemment le rôle de cibles volantes, ce pourquoi ils furent conçus au départ. Si la plus part des drones militaires ont été pensé dès le départ comme des engins destinés aux forces de défense il arrive cependant que dans de très rares cas ils émanent d’appareils civils. L’exemple le plus frappant nous vient des États-Unis : le Boeing MQ-27 ScanEagle.
Au milieu des années 1990 le bureau d’étude indépendant Insitu, basé à Bingen dans l’état américain de Washington, s’intéresse au tracking aérien des bancs de poissons et de mammifères marins. Sa démarche est alors autant commerciale qu’écologique. Ses dirigeants souhaitent apporter un outil bon marché au service des pécheurs de maquereaux et de thons qui utilisent la technique dites de sennes tout en proposant de suivre les migrations de dauphins et d’épaulards. Le drone prend forme et est baptisé SeaEagle.
Extérieurement il se présente sous la forme d’un fuselage allongé sans empennage vertical et disposant d’une voilure droite se terminant par des winglets. L’Insitu SeaEagle peut être catapulté depuis la plage arrière d’un gros chalutier ou bien depuis la terre ferme via à une remorque spécialement conçu. Il vole ensuite grâce à son petit moteur deux temps d’une puissance de 0.7 cheval. Son autonomie de six heures et demi en fait dès 2000 un outil apprécié des grandes sociétés de pèches de la côte est des États-Unis. Il commence même à intéresser des entreprises en Europe et au Moyen-Orient.
Un an plus tard Insitu a l’idée de développer une version améliorée destinée aux opérations militaires et baptisé ScanEagle. S’il reprend les grandes lignes et la philosophie du SeaEagle le nouveau drone est bien plus moderne avec son aile en flèche, son moteur à hélice propulsive deux temps d’un cheval et demi de puissance, et son autonomie désormais portée à quinze heures de vol. Le prototype du ScanEagle réalise son premier vol le 20 juin 2002. Dès le départ il intéresse l’US Army et l’US Marines Corps qui voient en lui un bon moyen d’observer le champs de bataille, notamment dans la guerre alors naissante d’Afghanistan. L’invasion de l’Irak de Saddam Hussein quelques mois plus tard allait leur donner raison. Non seulement le ScanEagle est un drone parfaitement adapté aux opérations militaires mais en plus sa rusticité en fait un complément efficace des engins télépilotés plus complexes.
Après l’US Army et l’US Marines Corps ce sont l’US Navy et l’US Coast Guard qui découvrent les avantages qu’elles peuvent tirer de ce drone. Grâce à l’emploi de sa catapulte hydraulique l’Insitu ScanEagle est un outil idéal pour l’observation maritime, notamment dans le cadre de la lutte contre les trafics de drogues et d’êtres humains. Très silencieux, volant à une bonne altitude, et disposant de senseurs derniers cris ils deviennent des auxiliaires parfaits pour les gardes côtes américains qui peuvent les lancer depuis les plages arrières de leurs cotres. En 2008 la société Boeing absorbe Insitu avec qui elle travaillait déjà depuis plusieurs années. La raison sociale du ScanEagle change de ce fait.
La puissance commerciale de Boeing permet au drone de connaître des ventes à l’export un peu partout dans le monde : Afghanistan, Arabie-Saoudite, Australie, Brésil, Cameroun, Canada, Colombie, Espagne, Grande Bretagne, Indonésie, Irak, Italie, Japon, Kenya, Liban, Lituanie, Malaisie, Pakistan, Pays-Bas, Philippines, Polognes, République Tchèque, Roumanie, Singapour, et enfin Vietnam. En 2022 le Pentagone décide de livrer un nombre non révélé de ScanEagle à l’Ukraine afin de l’aider à se libérer de l’invasion russe.
Il est intéressant de voir que parmi tous ces pays utilisateurs plusieurs ont achetés leurs drones pour une utilisation navale, similaire à celle des États-Unis. On en retrouve ainsi dans les marines australiennes, brésiliennes, colombiennes, espagnoles, indonésiennes, lituaniennes, ou encore singapouriennes.
Connu dans les forces américaines comme MQ-27A pour la version d’origine à nez pointu et MQ-27B pour celle à nez arrondi et empennage vertical le ScanEagle est désigné CU-169 dans la nomenclature canadienne et ScanEagle RM.1 dans celle du Royaume-Uni. Dans la Royal Navy justement ces drones volent depuis les destroyers Type 45 et les frégates Type 23. Ils y sont entrés en service en mai 2015.
Toujours produit en 2022 et toujours proposé à la vente auprès des pays acquéreurs de matériels américains le Boeing MQ-27 ScanEagle a connu deux dérivés officiels et un officieux. Les deux premiers sont le ScanEagle 3 et le RQ-21 Blackjack. Le troisième est le Yasir, développé par l’entreprise iranienne Qods à partir de trois exemplaires abattus entre 2003 et 2006 en Irak. Le Yasir a été construit sans aucune autorisation américaine par le principe de rétro-ingénierie. Il est considéré comme moins efficace que le ScanEagle même si objectivement aucune étude sérieuse n’a permis de comparaisons.
Il est intéressant de voir qu’en raison d’une entrée tardive dans la nomenclature américaine le Boeing MQ-27 ScanEagle possède une séquence plus récente que le RQ-21 Blackjack qui pourtant dérive de lui. En 2022 des pourparlers étaient en cours pour une éventuelle vente de ce drone à l’Allemagne, à la Grèce, ou encore au Qatar.
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