L’un des segments du marché des avions de ligne court-courrier / régionaux les moins connus du grand public est celui des machines de moins de vingt places. Paradoxalement c’est un de ceux qui donne le plus de contrats aux forces militaires qui sont friandes de ces avions de tailles modestes mais généralement très polyvalents et passe-partout. Beaucoup de ces avions possèdent en outre des qualités d’atterrissage et de décollages courts qui en font quasiment des avions de brousses. L’un des plus surprenants de ces bimoteurs légers est américain : il s’agit du Beechcraft 1900 Beechliner.
Les origines de cet avion remontent à la toute fin des années 1970 quand l’avionneur Beechcraft chercha à s’implanter sur le marché émergent des avions de ligne de troisième zone, c’est à dire ceux réalisant des vols intérieurs dans les états américains eux-mêmes. À cette époque le marché était principalement tenu par des avions conçus et réalisés hors des États-Unis comme le BAe Jetstream 31, le De Havilland Canada DHC-6 Twin Otter, ou encore l’Embraer Emb 110 Bandeirante. Des avions qui réussissaient se partager ce juteux marché.
Les constructeurs américains en étaient quasi absents, Beechcraft n’ayant aucun avion à proposer et Cessna ayant renoncé depuis l’échec une vingtaine d’années auparavant de son Model 620 demeuré sans suite.
Pour mener à bien leur ambitieux projet les responsables de Beechcraft décidèrent de s’appuyer sur l’un de leurs fleurons : l’avion d’affaire Super King Air 200. Et pour ce faire les ingénieurs vont opter pour une solution économique et éprouver, à savoir emprunter des éléments à l’avion. Le premier, et pas des moindres, est sa voilure. Mais d’autres le sont aussi comme une partie de son avionique, son train d’atterrissage, ou encore des éléments de fuselage. Pour le reste les designers dessinent un avion nouveau qui au final sur vues d’artistes ressemble alors beaucoup à un gros King Air.
Il est officiellement désigné Beechcraft 1900 et baptisé Beechliner.
Extérieurement le Beechcraft 1900 Beechliner se présente donc sous la forme d’un monoplan à aile basse cantilever. Il est construit intégralement en métal et sa motorisation tourne autours de deux turbopropulseurs Pratt & Whitney Canada PT6A-65B d’un puissance nominale de 1115 chevaux entraînant une hélice quadripale en métal. Deux pilotes prennent places dans le poste de pilotage tandis que la cabine est prévue pour l’accueil de 15 à 19 passagers suivant les versions ainsi que d’un personnel navigant commercial.
Le premier vol du prototype intervint le 3 septembre 1982 et la certification de type fin novembre 1983. Sa carrière commerciale débuta aux États-Unis en février 1984.
Depuis le demi-échec du Model 99 Airliner une quinzaine d’années plus tôt l’avionneur n’avait produit aucun avion régional et il n’était donc pas vraiment attendu sur le marché. En fait la première version de série, juste désignée Beechcraft 1900 ne fut construite qu’à quatre exemplaires, dont l’un fut vendu à un client militaire, le premier : la Fuerza Aérea Boliviana qui utilisa l’avion dès 1984 comme machine de transport léger et d’évacuation sanitaire.
Par la suite le constructeur développa deux versions les Beechcraft 1900C et 1900D destinées aussi bien aux civils qu’aux militaires.
Dans cette seconde catégorie le principal client fut l’US Department of Defense qui acheta en 1989 un lot de 36 avions pour les besoins à la fois de l’US Army et de l’US Air Force comme avions de liaisons, de transport d’état-major, de transport de personnels, voire d’évacuation sanitaire. Ils ont été désigné C-12J Huron II, en référence aux C-12 Huron déjà en service alors dans ces deux armes. Livrés à partir de 1990 la majorité de ces avions vola en Europe ou à l’intérieur du territoire américain sans participer à des missions au plus près des zones de guerre.
Fin 2018 seule l’US Air Force conservait une poignée de ces avions, principalement en soutien des forces spéciales.
Il est à noter que l’US Navy de son côté a utilisé entre 1994 et 2007 un Beechcraft 1900D au standard civil en soutien de certaines opérations anti-drogues dans les Caraïbes. Ensuite il a été versé à l’AUTEC (pour Atlantic Undersea Test and Evaluation Center) et appuie les essais de ce centre implanté sur l’île d’Andros aux Bahamas. Bien que non officiellement désigné C-12J cet avion est bien propriété de l’aéronavale américaine, et n’est nullement loué à un contractor.
Outre la Bolivie et les États-Unis des Beechcraft 1900 Beechliner servent (ou ont servi) comme avions de liaisons et de transport léger sous les cocardes algériennes, australiennes, birmanes, colombiennes, égyptiennes, érythréennes, indonésiennes, ivoiriennes, péruviennes, sud-soudanaises, suisses, taïwanaises, tchadiennes, et thaïlandaises.
Il est à signaler qu’entre 2007 et 2010 un Beechcraft 1900D a volé sous cocarde française. Il n’appartenait pas à l’Armée de l’Air ou l’ALAT mais à la Direction Générale de la Police Nationale qui le mettait au service de la police aux frontières et du RAID. Immatriculé civilement F-GVTC il était intégralement peint en blanc et ne portait qu’une petite cocarde sur l’empennage. Il a depuis été revendu sur le marché commercial pour être utilisé comme avion régional.
Mais comme souvent avec ce type d’avion le bimoteur à turbopropulseurs de Beechcraft a également été adapté aux missions de reconnaissance et d’écoute électronique. C’est ainsi que deux pays africains, l’Algérie et l’Égypte, emploient des Beechcraft 1900D pour ce type de missions notamment lors d’opérations de contre-terrorisme islamique. Les Beechliner de reconnaissance algériens sont porteurs de camouflages alors que leurs homologues de transport de personnels sont peints aux couleurs du drapeau national.
En outre ils s’identifient aisément à leur carénage implanté sous l’intrados de fuselage et abritant les équipements propres aux vols de reconnaissance électronique.
Sans avoir été un franc succès internationale, en aucun cas comparable au King Air et Super King Air, le Beechcraft 1900 Beechliner ne peut pas être considéré comme un total échec. En fait il a eu à affronter une concurrence bien trop présente et de longue date pour pouvoir réellement s’implanter durablement.
Au total l’avion a été construit à un peu moins de 700 exemplaires dont la grosse majorité vole en Amérique du nord.
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