Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale le Royaume-Uni disposait d’un des arsenaux aériens les plus puissants de la planète. Bon nombre de ses aéronefs était de facture américaine. Ils avaient été acquis grâce au fameux plan de prêt-bail, une loi qui servit également à pallier les carences au sein des forces canadiennes ou encore soviétiques. Pourtant le gouvernement britannique voulait revenir petit à petit à une production locale et lança tous azimuts des programmes de développements aéronautiques. L’un d’eux concerna un avion d’entraînement avancé qui déboucha sur la commande en série de deux modèles différents. L’un d’entre-eux était l’Avro Athena.
Au début du printemps 1945 alors que les combats en Europe se focalisaient surtout autour de l’Allemagne nazie l’Air Ministry lança à Londres un programme visant à doter la Royal Air Force d’un avion d’entraînement avancé. Le futur appareil devait être à même de remplacer à la fois les North American Harvard mais également une partie des Percival Proctor. Il fut institué autour de la Specification T.7/45. Il s’agissait en fait d’une des fiches les plus ambitieuses de son époque puisque l’Air Ministry exigeait que le futur appareil ne possède pas un moteur à pistons mais un turbopropulseur. En outre il devait être triplace.
Le turbopropulseur était en 1945 l’un des deux modes de propulsion à la mode avec le réacteur. Il était notamment plus récent que ce dernier, et globalement plus complexe à concevoir mais aussi plus robuste. Problème majeur cependant : à cette période aucun avion n’avait jamais volé avec une telle motorisation. Du coup les candidats ne se bousculèrent pas au portillon. Chacun observait ce que l’autre allait proposer.
Au début du mois d’août 1945 cinq constructeurs s’étaient déclarés intéressés : Airspeed, Avro, Boulton-Paul, De Havilland, et Miles. Quand quelques semaines plus tard le Gloster Trent Meteor fit son premier vol prouvant l’efficacité du turbopropulseur les candidats n’étaient plus que deux. Car aussi performant que soit alors le turbopropulseur il était également très capricieux et compliqué de mise en œuvre.
Avro et Boulton-Paul se retrouvèrent donc seuls en lice. Le premier avançait son Type 701 et le second son P-108. Deux prototypes de chaque furent commandés.
Mais dès le départ Avro peina à concevoir un tel avion. Non pas que la tâche lui était insurmontable. L’avionneur avait déjà créé des monomoteurs d’entraînement dans les années 1930 au travers du Prefect ou plus loin encore avec le fameux Avro 504. Mais cette fois c’est la technologie du turbopropulseur qui le bloqua. Tous les essais statiques de montage sur son premier prototype se soldaient par des échecs. Et dans le même temps on annonçait que Boulton-Paul progressait.
En fait les deux constructeurs étaient au même point mais le concurrent d’Avro jouait à fond la carte de la désinformation. Et ça marchait car au fur et à mesure que le temps passait la Royal Air Force ne voyait rien venir et l’Air Ministry commençait à redouter un double échec.
Avro testa deux modèles de turbopropulseurs sur son Type 701 : l’Armstrong-Siddeley Mamba ASMa.3 puis quelques semaines plus tard le Rolls-Royce RDa.1. Le premier développait 1010 chevaux et le second 1400. Pourtant ni l’un ni l’autre ne réussit à satisfaire aux exigences.
C’est pourtant ainsi gréé que le premier prototype vola le 12 juin 1948. À cette époque l’avion avait été baptisé Athena T Mk-1. L’Athena T Mk-1A concernait la version dotée du RDa.1.
Avant même ce vol inaugural sur Mamba ASMa.3 l’Air Ministry avait changé son fusil d’épaule en requalifiant le programme. La Specification T.7/45 avait été annulée et remplacé à l’automne 1947 par la T.14/47. Celle-ci ne concernaient que les avions d’Avro et de Boulton-Paul. Aucun nouveau constructeur n’y était admis. Désormais le futur avion devrait disposer d’un moteur à pistons Rolls-Royce Merlin Mk-35. Il faut dire que les stocks de celui-ci étaient énormes.
Les quatre prototypes Athena virent leurs turbopropulseurs déposés et remplacés par ce moteur. Mais il semblait déjà trop tard pour Avro. Boulton-Paul avait remporté le marché et son P-108 fut connu alors sous la désignation de Balliol.
Conscient pourtant des moyens financiers engagés par Avro l’Air Ministry fit un geste en ne rejetant pas catégoriquement l’avion. Une commande fut passée pour quinze exemplaires de série, destinés à la Central Flying School. Avec cette commande officielle l’avionneur pouvait voir son chantier de développement entièrement remboursé par le contribuable britannique. Les premiers Avro Athena T Mk-2 entrèrent en service dans la RAF en mars 1950. Il est à noter qu’entre temps ils étaient passés d’avions d’entraînement avancé à avions d’entraînement intermédiaire. Ils assuraient ainsi la transition entre les modèles plus légers comme le De Havilland Canada DHC-1 Chipmunk et les modèles plus avancés comme le Boulton-Paul Balliol ou encore évidemment les premiers Gloster Meteor T Mk-7 à réaction.
Leur carrière fut fulgurante. En effet à l’été 1952 la Royal Air Force ordonna le retrait du service des quatorze Avro Athena T Mk-2 encore en état de vol. Ils survécurent encore quelques mois comme plastrons au sol pour la formation des mécaniciens et furent finalement rayés des cadres en février 1953. C’est à dire moins de trois ans après leur entrée en service.
S’il s’agissait d’une mode à l’époque elle ne s’applique pas à cet avion : aucun Athena ne fut revendu sur le marché civil. Le monomoteur en question n’avait pas bonne réputation, notamment en raison de pannes récurrentes dans son système hydraulique.
Pour autant l’avionneur Avro utilisa un exemplaire sous l’immatriculation civile G-ALWA pour des prospectives à l’étranger. Mais là encore il ne suscita aucun intérêt. Au retour d’un vol de présentations en Inde l’Athena T Mk-2 en question fut envoyé à la ferraille.
Ainsi s’achevait la très courte carrière d’un avion à la conception chaotique.
En fait rien ne dit aujourd’hui que cet Avro Athena était réellement un mauvais avion, ou tout du moins intrinsèquement. Ce sont les modifications apportées à sa conception qui le rendirent fragile et finalement inapte à servir durablement. D’autant qu’il apparut à une époque où les avions se dépréciaient très rapidement. Il demeure au final un des rares véritables plantages de son constructeur sur le marché militaire.
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