Durant la Seconde Guerre mondiale la majorité des avionneurs allemands utilisèrent l’outil industriel mis à leur disposition par les sociétés placées sous administration d’occupation. C’est ainsi que Focke-Wulf par exemple fabriqua des chasseurs Fw 190 en France au sein des usines de la SNCAC (Société Nationale de Construction Aéronautique du Centre) ou que Junkers construisit des Ju-52/3 chez Amiot à Colombes en région parisienne. De son côté Messerschmitt fit usiner une partie de ses chasseurs Bf 109 en Tchécoslovaquie dans les ateliers du constructeur Avia. Après guerre celui-ci continua ces assemblages mais avec un propulseur inédit donnant ainsi naissance à un nouveau chasseur : le S.199.
Tout commença en juillet 1945, lorsque l’aviation tchécoslovaque passa commande à Avia pour un lot de vingt Bf-109G-14 qui reçurent la désignation de S.99 au sein de la nomenclature locale. En fait, ces appareils étaient des chasseurs initialement en cours d’assemblage pour les besoins du Reich. Les S.99 entrèrent immédiatement en service, toutefois le pays ne pouvait se limiter à n’utiliser qu’un si petit nombre de chasseurs. C’est pourquoi l’état major tchécoslovaque passa commande pour une centaine d’autres exemplaires.
Malheureusement pour Avia ses stocks de moteurs Daimler-Benz DB-605 n’étaient pas inépuisables, et au bout d’une dizaine d’appareils il n’y en avait plus. C’est alors que l’avionneur se tourna vers le Junkers Jumo 211F, un moteur en ligne sensiblement équivalent. Toutefois ce propulseur n’avait jamais été monté sur un Bf-109. Ainsi motorisé le S.99 devint S.199, un appareil nouveau.
L’Avia S.199 se présentait sous la forme d’un monoplan à aile basse monomoteur monoplace. Son moteur Jumo 211F d’une puissance de 1350 chevaux actionnait une hélice tripale en métal. Le pilote prenait place dans un cockpit exigu mais disposait d’un bon champ visuel. Construit en bois et métal, le S.199 disposait d’un train d’atterrissage tricycle entièrement escamotable. Son armement se composait de deux canons mitrailleurs de calibre 20mm dans les ailes et de deux mitrailleuses de 13.1mm dans le nez. Le prototype du S.199 réalisa son premier vol le 25 mars 1947.
Loin d’être révolutionnaire ce chasseur frôlait même l’obsolescence à une époque où volaient dans le monde entier des avions à réaction. De surcroît d’un pilotage difficile, il ne se présentait pas forcément sous la forme d’un appareil idéal pour une aviation renaissante. Toutefois l’aviation militaire tchécoslovaque passa commande pour 550 exemplaires de série, dont 130 biplaces d’entraînement et de transformation qui reçurent la désignation de CS.199 dans la nomenclature locale.
Dans ce pays, les S.199 restèrent en service jusqu’au milieu des années 50, avant d’être remplacé par des Mikoyan-Gurevitch MiG-15 à réaction bien plus modernes et complexes. Mais dans une nation placée sous l’occupation soviétique la valeur des chasseurs nationaux était relativement faible. D’autant que le S.199 tirait ses origines d’un appareil allemand, ennemi idéologique absolu pour l’URSS.
Malgré ses défauts le S.199 fut exporté vers Israël en août 1948. Vingt appareils furent convoyés vers l’état hébreu via la France. Sur place, ils équipèrent le premier escadron de chasse créé, le Tayeset 101. Ils y reçurent le nom de baptême de Sakin. Ces avions avaient très mauvaise réputation auprès des pilotes israéliens, leur origine allemande n’y étant sûrement pas étrangère. En fait, ils furent activement mis en œuvre lors de la naissance de l’aviation israélienne, participant notamment à des missions d’interdiction contre les appareils militaires égyptiens qui violaient fréquemment l’espace aérien national.
Le Tayeset 101 conserva ses S.199 jusqu’en 1957, mais sans que ces avions ne participent l’année précédente à l’opération conjointe avec les Britanniques et les Français pour reprendre le canal de Suez. A partir de 1952 cette unité possédait également des Supermarine Spitfire LF Mk-IX tout aussi obsolètes. Leur remplacement fut le fait des Dassault Mystère IV.
Si extérieurement l’Avia S.199 ressemblait fortement au Messerschmitt Bf-109G, il n’en avait ni la maniabilité ni l’efficacité au combat. En effet, ce monomoteur était très délicat à piloter et disposait de capacités plus que médiocres. Les pilotes tchécoslovaques lui attribuèrent le sobriquet de « mule ». Comme quoi la réussite d’un avion tient souvent à sa motorisation. Dans ce cas précis le remplacement du DB-605 par le Jumo 211F fut loin d’être probant. Pourtant l’Avia S.199 permit à l’aviation israélienne naissante de se constituer. D’ailleurs un exemplaire reste préservé dans ce pays.
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