En 1936, le gouvernement tchécoslovaque passa commande à Frantisek Novotny, alors ingénieur en chef d’Avia, d’un prototype de chasseur léger destiné à assurer des missions d’interception et de défense frontalière. Alors connu sous la désignation de B.35 celui-ci se présentait sous la forme d’un monoplan monoplace monomoteur. De construction mixte bois entoilé et métal, l’avion était assez élégant malgré son train d’atterrissage tricycle fixe caréné. Sa motorisation, assurée par un Hispano-Suiza en V, développait une puissance de 860 chevaux. Quant à son armement, il se composait d’un canon de 20 mm tirant au travers du pas de l’hélice et de deux mitrailleuses de 7.7mm dans les ailes. Ainsi gréé l’Avia B.35 réalisa son premier vol le 28 septembre 1938.
A l’époque, les volontés expansionnistes du IIIème Reich, conjuguées avec une série d’essais difficiles, conduisirent Avia à revoir sa copie et à commander un second prototype. Toutefois celui-ci n’eut pas le temps de voler avant que la Bohème Moravie soit envahie par les armées allemandes. Un troisième prototype fut alors demandé à Novotny, mais cette fois ci par le RLM, le ministère nazi de l’air. En effet, le B.35 intéressait au plus haut point la Luftwaffe qui se cherchait un monoplace léger et moderne destiné à la transformation opérationnelle de ses futurs pilotes de chasse. Sur ce troisième prototype les mitrailleuses Vickers anglais de 7.7mm furent tout bonnement remplacées par des MG allemandes de 7.92mm par ailleurs jugés plus fiables à long terme. Le carénage du train d’atterrissage avait lui aussi totalement disparu.
Au printemps 1939, ce troisième B.35 fut officiellement exposé, sous une livrée allemande fantoche, au salon aéronautique de Bruxelles sous la désignation d’Avia Av-135.
En fait, la Luftwaffe demanda à Novotny de revoir de nouveau sa copie mais cette fois de manière radicale. En effet, il n’était plus question d’un chasseur d’entraînement avancé ou même d’un appareil de défense frontalière mais tout bonnement d’un chasseur classique, à l’image des principaux avions de ce genre à l’époque comme le Messerschmitt Bf 109 ou encore le Morane Saulnier MS-406. Toutefois l’Av-135 était nettement plus léger. C’est ainsi que l’ingénieur tchécoslovaque développa le B.135.
Extérieurement, celui-ci était clairement issu du B.35 mais en plus moderne, plus fin, et plus racé. Il conservait une propulsion basée sur le moteur Hispano-Suiza français d’origine. Son armement fut revu avec un canon Oerlikon de 20 mm en lieu et place du Hispano d’origine. Les mitrailleuses MG de 7.92mm furent quant à elles conservées. Surtout le train d’atterrissage devenait rétractable, faisant ainsi gagné à l’avion des kilomètres par heure indéniables en vol, sans compter sa maniabilité qui s’en ressentait.
Rapidement, l’aviation royale bulgare fit savoir qu’elle recherchait un chasseur similaire à celui de Novotny et passa commande pour douze B.135 de série construits par Avia. Le premier d’entre eux quitta les chaînes d’assemblage au début de l’année 1942 et réalisa sa première mission opérationnelle en juin de cette même année. Les onze autres avions le suivirent rapidement, même si certains furent utilisés par la propagande allemande dans des livrées parfois plus que fantaisistes.
Au sein des forces bulgares, les Avia B.135 reçurent la désignation de DAR-11 et le nom de baptême Ljastuvka, c’est à dire hirondelle en français. Les DAR-11 étant principalement voués à assurer la défense aérienne de la principale base école du pays. Ils furent peu utilisés dans les premières années du conflit, leurs installations n’étant pas jugés prioritaires par les Alliés. De ce fait quelques responsables bulgares envisagèrent d’assembler localement cinquante exemplaires de plus du B.135 pour des missions de reconnaissance armée et d’entraînement avancé. Toutefois la Bulgarie n’ayant en réalité aucune structure industrielle aéronautique, couplé au fait qu’Avia n’avait aucun stock suffisant en moteurs français pour cette entreprise, cela ne déboucha sur rien et la production du DAR-11 en resta là.
Malgré leur fragilité et leurs capacités limitées les Avia B.135 bulgares connurent le feu contre l’aviation alliée. A l’été 1944, une vague de bombardiers escortés par des chasseurs Republic P-47 Thunderbolt, attaqua la petite base école sur laquelle étaient stationnés les chasseurs légers. Ceux-ci prirent l’air et furent, assez logiquement d’ailleurs, décimés par les lourds monomoteurs américains. Toutefois, il semble bien qu’au moins un bombardier fut abattu par les B.135 bulgares. Une victoire certainement collégiale. Quoiqu’il en soit après cette attaque américaine, il ne restait plus que trois DAR-11 encore en état de vol en Bulgarie. Ils attendirent, parallèlement à leurs pilotes, la fin de la guerre.
Appareil d’une conception intéressante en 1939, le B.135 était totalement obsolète en 1944 lorsqu’il dut affronter l’US Army Air Force. Il semble bien que les trois derniers chasseurs de Frantisek Novotny furent ferraillés. Pourtant un appareil, reconstruit à partir de plusieurs autres, est aujourd’hui exposé à Sofia dans le petit musée aéronautique national.
Pour la petite histoire l’ingénieur tchécoslovaque participa après-guerre au développement de l’Avia S.99 Turbina, une version locale du jet de combat allemand Messerschmitt Me 262 copiée au titre du dommage de guerre.
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