Durant l’entre-deux-guerres et la Seconde Guerre mondiale, la Royal Air Force utilisa des avions dits de coopération terrestre. Véritables couteaux suisses de l’aviation militaire de « Sa Majesté » ceux-ci pouvaient aussi bien remplir des missions d’observation, de reconnaissance aérienne, d’attaque légère, de liaisons, que de ravitaillement des troupes de l’armée britannique. Certains d’entre eux, à l’image du Westland Lysander, sont même entrés dans la légende des airs. Le premier de ces avions de coopération terrestre était un petit biplan conçu dans les années 1920, l’Armstrong Whitworth Atlas.
C’est en 1922 que les responsables de la RAF et de la British Army posèrent les premières ébauches de ce qui allait devenir l’aviation militaire de coopération terrestre. En fait les généraux britanniques avaient observés les Français et leur aviation coloniale, et avaient décidés de s’en inspirer. Certes leurs appareils ne seraient pas uniquement destinés aux opérations ultramarines, mais ce facteur ne devait pas être sous-estimé. C’est ainsi qu’ils réussirent à convaincre l’Air Ministry de lancer un programme dans ce sens.
Celui-ci prit la forme de la Specification 8/24 émise en 1924 pour fournir des avions de série à la RAF dès fin 1926 ou début 1927. Assez étrangement les avionneurs britanniques furent plutôt frileux à l’idée de ce nouveau concept d’avion, qui n’était pas né dans la tête de leurs ingénieurs mais dans celles des militaires. Si bien que seuls trois constructeurs réellement répondirent à l’appel : Armstrong Whitworth, De Havilland, et enfin Short.
Il est à noter que hormis le premier d’entre eux qui proposait un avion radicalement nouveau désigné Atlas, les deux autres avaient dans leurs escarcelles respectives des projets déjà connus et déjà rejetés lors de précédents programmes. De Havilland proposait son DH.42A Dingo, issu du prototype de chasseur Dormouse, tandis que Short avait amélioré son Springbok sous la forme du S.8B. Un prototype de chaque avion fut commandé par l’Air Ministry.
Rapidement il apparut que les responsables britanniques s’intéressaient à l’Atlas. Il faut dire que les ingénieurs d’Armstrong Whitworth avaient conçu leur avion en suivant à la lettre les demandes des militaires.
Ainsi l’appareil se présentait sous la forme d’un biplan construit en bois et métal, avec quelques parties entoilées. Sa propulsion était assurée par un moteur en étoile Armstrong-Siddeley Jaguar Mk-IV d’une puissance de 400 chevaux entraînant une hélice bipale en bois. En outre l’Atlas disposait d’un train d’atterrissage classique fixe renforcé, pour permettre à l’avion de se poser sur des terrains sommaires. Le pilote et le copilote-observateur prenaient places dans un double cockpit en tandem à l’air libre. L’armement de l’avion se composait de deux mitrailleuses de calibre 7.7mm, l’une synchronisée tirant en position de chasse, et la seconde montée sur un affût annulaire arrière et servie par le copilote-observateur. Une charge de bombes de 200 kg pouvait être emportée sous voilure. Cependant celle-ci pouvait laisser la place à quatre réservoirs d’eau potable de 45 litres chacun, destinés au ravitaillement des troupes en avant-postes.
C’est dans cette configuration que le prototype de l’Atlas vola pour la première fois le 10 mai 1925.
La compétition fut finalement remportée par l’Atlas et une première commande en série pour 270 avions fut passée fin 1925. Cependant les essais en vol avaient démontrés une certaine instabilité et une sous-motorisation relative de l’avion. Ces défauts furent corrigés, notamment par le remplacement du moteur Jaguar Mk-IV par un Mk-IVC de 450 chevaux.
Les premiers Armstrong Whitworth Atlas Mk-I entrèrent en service dans la RAF début 1927. Ils furent immédiatement envoyés dans les colonies, notamment en Afrique et au Proche-Orient. A la fin de cette année là tous les avions étaient en service, et le principe de coopération terrestre sembler parfaitement fonctionner. Tellement bien que la Royal Air Force demanda de nouveaux avions, plus adaptés aux opérations en environnements secs que les Atlas.
Là encore Armstrong Whitworth proposa une machine dérivé de son biplan, et désignée Ajax. Mais celui ci n’eut pas la chance de son « grand frère ». Il fut rejeté au profit du Hawker Audax. Pourtant en unités l’Atlas ne connaissait que peu de détracteurs. Tout au plus le système d’accrochage des réservoirs d’eau potable était à revoir, mais sûrement pas son armement.
Ainsi en 1930 plusieurs de ces biplans furent utilisés dans l’actuelle Palestine pour contrer une rébellion locale qui voulait chasser l’empire britannique. Ce fut la première fois que des avions de coopération terrestre lâchaient leurs bombes de 50 kg sur des cibles ennemies, et pas la dernière. L’armée britannique disposait désormais d’avions militaires, aux capacités reconnues pour appuyer ses troupes. La Royal Air Force conservait néanmoins son indépendance, malgré le fait qu’elle mettait avions et pilotes au service des fantassins. Chacun y trouvait de facto son compte.
À l’été 1927 il apparut nécessaire que la RAF dispose d’un avion d’entraînement destiné à former les futurs pilotes d’avions de coopération terrestre. Pour éviter de prendre trop de retards dans l’entrée en service plein et entier des biplans Armstrong Whitworth, il fut décidé de commander des avions qui en seraient dérivés. Ainsi naquit l’Atlas Trainer. Il fut construit à hauteur de 175 exemplaires. Il fut souvent appelé Atlas T Mk-II.
Désormais l’aviation britannique pouvait former ab-initio ceux qui allaient coopérer avec l’armée.
Les Armstrong Whitworth Atlas Mk-I commencèrent à quitter le service actif en 1934, et leur retrait fut définitif fin 1935. Les Atlas T Mk-II de leurs côtés restèrent dans les rangs de la RAF jusqu’en 1937, laissant définitivement la place à des Hawker Hart d’entraînement.
L’Atlas connut un succès réel à l’export, avec des avions vendus au Canada, à la Chine, à l’Égypte, et à la Grèce. Lors de la guerre sino-nippone au moins deux Atlas tombèrent entre les mains des Japonais qui l’essayèrent et l’estimèrent dépassés. Il faut dire qu’on était alors en 1938. Il est à noter que les Atlas grecs furent construits sous licence localement, et que plusieurs d’entre eux étaient encore en service lors de la capitulation du pays face aux armées nazies en 1941. Ce sont vraisemblablement les seuls avions de ce type à avoir participé à la Seconde Guerre mondiale.
Avion robuste, rustique, et aimé de ses équipages l’Armstrong Whitworth Atlas fut longtemps la référence en matière de coopération terrestre. Au total il a été construit à 480 exemplaires. Deux d’entre eux sont actuellement préservés au Royaume Uni.
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