Depuis la fin des années 40, Antonov a su concevoir quelques-uns des meilleurs avions de soutien logistique militaire au monde. Malgré ses nombreux succès dans le transport militaire, le constructeur s’essaya parfois à d’autres types d’aéronefs. Parmi ces machines figure un très surprenant programme d’AWACS ayant des capacités de décollages et d’atterrissages sur courtes distances et sur tous les types de pistes : l’An-71.C’est en 1978 que Moscou demanda au bureau d’étude Antonov de réaliser un nouveau type d’avion de veille radar avancée (mieux connu sous l’acronyme anglophone d’AWACS) à partir de son avion tactique An-72.
A cette époque, la détection aéroportée soviétique reposait sur de puissants, mais lourds, Tupolev Tu-126. Ces avions étaient en plus en fin de vie opérationnelle et l’état major de l’Aviation du Front croyait plus en la propulsion à réaction qu’au turbopropulseur. Non pas que le nouvel avion devait remplacer le quadri-turbopropulseur, mais il devait en réalité lui apporter un certain soutien opérationnel, d’autant que le programme intéressait aussi l’AVMF, à savoir l’aéronavale soviétique. L’URSS ne disposait alors pas d’avion de détection de moyenne taille, contrairement aux USA avec leurs Grumman E-2C Hawkeye.
Si le concept était original, il faut bien comprendre qu’il était particulièrement difficile à concevoir pour les ingénieurs d’Antonov. En effet, le montage classique d’un radôme rotatif sur le dessus du fuselage aurait totalement anéanti l’effet de soufflage de l’extrados qui permet au biréacteur An-72 de décoller et de se poser sur de très courtes distances. En outre, le montage d’un radar à ouverture synthétique n’aurait pas lui aussi donné pleine satisfaction aux Soviétiques. La solution demeurait donc dans le classique radôme rotatif. Et c’est ainsi que les ingénieurs d’Antonov eurent l’idée de monter celui-ci en haut de l’empennage vertical de l’avion.
Antonov préleva donc deux avions sur les chaînes de production et commença le montage du radar. Pour ce faire, l’empennage fut profondément modifié, notamment parce que son orientation fut inversée et sa base redessinée. Pour permettre le fonctionnement du système de détection Antonov ajouta un APU sous la forme d’un réacteur d’appoint RD38-A d’une puissance de 2 900kgp. C’est ainsi que naquit le nouvel avion, désigné An-71. Celui-ci fut assemblé en quelques mois et réalisa son premier vol le 12 juillet 1985.
Rapidement l’avion fut découvert par l’OTAN qui lui attribua le nom de code de Madcap, entre autre parce que l’état-major américain ne croyait pas en l’avenir de cet étrange avion. Ce « chapeau de fou » était pour les occidentaux un projet délirant, mais surtout bien trop onéreux, même pour l’URSS. C’est la raison pour laquelle l’OTAN ne considéra jamais l’An-71 comme autre chose qu’un simple prototype.
L’avenir leur donna raison. Malgré des qualités de vol intéressantes, des capacités ADAC (décollage et atterrissage courts) réelles, et une portée radar visiblement supérieure à celle du Hawkeye, l’AWACS d’Antonov subit de plein fouet la fin de la Guerre Froide et la chute, vertigineuse, des budgets de développement en URSS puis en Russie. Toutefois, l’Aviation du Front conserva ses deux An-71 qui volaient alors sous les couleurs « civils » d’Aeroflot.
Finalement, les deux An-71 furent stockés à Kiev dès 1997, et ne servirent plus, jusqu’en 2001, année au cours de laquelle Antonov proposa son avion à l’export pour la Chine, l’Iran, et même la Turquie, qui tous trois refusèrent l’avion, soit au profit de développement locaux, soit au profit d’avions plus modernes comme le Wedgetail de Boeing. L’un des principaux défauts pour l’export du Madcap est qu’il n’a jamais été ravitaillable en vol.
Malgré l’échec commercial du Madcap, cet avion demeure certainement l’un des AWACS les plus surprenants.
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